Vaclav Havel, huit mois après

L'ex-président Vaclav Havel avec sa femme Dagmar, photo: CTK

Vaclav Havel a quitté le Château de Prague, au début de février 2003. Président d'abord de la Tchécoslovaquie puis, dès le 1er janvier 1993, de la République tchèque, ses fonctions présidentielles se sont étendues sur près de 13 ans. Même si, aujourd'hui, il ne se trouve plus sur le devant de la scène politique, la fascination pour Havel ne s'amoindrit guère. Que fait-il et comment se porte-t-il aujourd'hui ? Le magazine du quotidien Lidove noviny a cherché, dans une édition récente, une réponse à cette question. Alena Gebertova l'a lue pour vous.

L'ex-président Vaclav Havel avec sa femme Dagmar,  photo: CTK
« A la différence de l'ex-président américain Bill Clinton, qui rédige ses mémoires et se fait inviter à des congrès internationaux, l'intérêt de Vaclav Havel est tout autre. Il suit le régime castriste à Cuba, le régime Lukaschenko en Biélorussie ou la situation en Géorgie gouvernée par Shevarnadze. Le destin de la dissidente birmanienne Aun Schan Su Tij ne le laisse pas indifférent non plus », peut-on lire dans le magazine de Lidove noviny qui rappelle qu'Havel, encore en tant que président de la République, avait participé à la conférence de Miami, organisée par les ex-prisoniers politiques de Cuba.

Son plus proche collaborateur actuel, le jeune Jakub Hladik, explique :« Durant toute sa vie, Vaclav Havel s'est concentré sur la lutte pour les droits de l'homme. Il n'est pas à même, bien sûr, de visiter toutes les régions. Il a cependant un outil de combat de taille, la parole ».

Vaclav Havel, qui habite, avec sa femme Dagmar, une somptueuse villa de Prague, s'est ouvert un bureau dans le centre-ville, rue Vorsilska. Sa tâche, et celle de ses trois collaborateurs, est, par exemple, de répondre au courrier - entre trente et quarante lettres par jour - qui arrive du pays et de l'étranger. Et aussi de choisir parmi les très nombreuses invitations qui lui sont adressées. Il va sans dire que Vaclav Havel ne peut tout accepter ; l'une des manifestations à laquelle il a participé, en tant qu'invité honorable, a été la remise solennelle du prix Charlemagne à Valéry Giscard d'Estaing, président de la Convention, en mai dernier, à Aix-la-Chapelle.

Le magazine de Lidove novinyécrit qu'au cours de cette année, Vaclav Havel s'est vu décerner quatre distinctions d'Etat, deux au pays et deux à l'étranger, et tout un panel de prix et de médailles. Certains sont dotés de sommes que l'ex-président utilise pour la marche de son bureau. Il est intéressant de noter qu'à ce jour, Vaclav Havel ne dispose d'aucune rente présidentielle. Pourquoi ?

« Depuis l'expiration du mandat de Vaclav Havel, le 2 février dernier, les législateurs ne sont pas arrivés à un consensus en ce qui concerne la rente présidentielle, peut-on lire dans le magazine, qui continue : ainsi, l'ex-président tchèque doit se satisfaire de gardes du corps offerts par le ministère de l'Intérieur et d'une retraite de 20 000 couronnes par mois, l'équivalent de près de 650 euros. Le projet de loi intitulé « L'assurance du président de la République après la fin de ses fonctions » sera soumis en novembre prochain, en troisième lecture, au Parlement ».

Vaclav Havel a, tout le monde le sait, une santé fragile. Point étonnant, donc, qu'après treize années d'activités politiques intenses il ait voulu consacrer une partie de sa « liberté » retrouvée au repos. Il s'est donc d'abord rendu dans les Caraïbes, avant d'entreprendre un voyage en voiture à travers l'Europe et de s'installer, en été, pour deux mois environ, dans son chalet de Hradecek, en Bohême du nord.

La question capitale qui intéresse tous ceux qui apprécient les brillantes qualités intellectuelles de Havel ou qui aiment ses pièces de théâtre est de savoir s'il s'apprête à écrire quelque chose. Voici la réponse du magazine Lidove noviny :

« Après avoir quitté sa fonction de président de la République, Vaclav Havel a pris part à deux autogramiades organisées à l'occasion de la réédition de certaines de ses oeuvres. D'un autre côté, il n'a signé à ce jour aucun nouveau texte. Il s'avère donc que, très prochainement, on ne saurait s'attendre à une oeuvre littéraire de sa plume. »

Selon le secrétaire Jakub Hladik, déjà cité, d'autres activités ont empêché Vaclav Havel de se concentrer de façon systématique sur ses projets littéraires. Il y en a pourtant deux ou trois que ce dernier envisage sérieusement. Il s'agit, par exemple, d'un trialogue, sous forme littéraire, entre Havel, l'ex-dissident polonais Adam Michnik, chef de Gazeta Wyborcza, et le politologue britannique, Timothy Garton-Ash. Vaclav Havel aimerait aussi écrire une pièce de théâtre, inspirée en quelque sorte par le roi Lear. Un livre autobiographique s'inscrit également dans les projets littéraires de Havel.

Si l'on ne peut lire, pour l'instant, un nouvel ouvrage de Havel, on peut, en revanche, se procurer le plaisir de lire un nouveau livre sur Havel. Ce dernier est, en effet, l'objet d'un ouvrage paru aux éditions L'Aube et intitulé « Vaclav Havel, président philosophe ». Une confession de son auteur, Mme Geneviève Even-Granboulan, professeur à l'Université de Tours et maître de conférences à l'Institut d'Etudes politiques à Paris :

« Je pense que Vaclav Havel est un exemple de ce que l'on peut appeler l'intellectuel engagé, c'est à dire un homme courageux qui défend ses idées et qui est prêt à donner sa vie pour ses idées. Dans la période communiste, bien sûr, le risque était présent sans arrêt et, à l'heure actuelle, il poursuit cette activité de défenseur des droits de l'hommes. Il s'agit par exemple de dissidents de Cuba. La personnalité de Havel est très représentative de ces individus que l'on peut donner en exemple aux générations futures. Quand Patocka, son maître à penser, parlait des héros de notre temps, alors je pense que Havel peut prendre rang parmi ces héros de notre temps ».