Vins, spiritueux et cognacs français se présentent à Prague

Photo: Franck Alasseur

Jeudi se déroulait à Prague le Salon des vins, spiritueux et cognacs français. Un salon pour les professionnels exclusivement, organisé tous les ans par la société Sopexa depuis 2005, afin de promouvoir les liens commerciaux entre producteurs et importateurs ou points de vente. C’était aussi l’occasion de faire le point sur la situation du marché en temps de crise. Rencontre avec Nicolas Goldschmidt qui représente la Sopexa, puis avec plusieurs des exposants.

« Le but est d’aider les producteurs français à l’export et de développer les ventes des produits agro-alimentaires français. C’est pour cela que chaque année la Sopexa organise des mini expositions comme ce salon, dans différents pays. Celui-ci est en fait une tournée qui a lieu dans trois pays d’Europe centrale et de l’Est. Cette semaine, les exposants étaient à Bucarest en Roumanie, ensuite à Varsovie, puis à Prague. Le but pour eux, est de trouver des importateurs, ou pour ceux qui en ont déjà, de trouver des restaurants, des cavistes ou des vinothèques, des hôtels qui seront intéressés pour proposer leurs vins. »

Si vous le faites chaque année, c’est que ça marche... Quels sont les objectifs que vous avez atteints ces dernières années ?

« C’est difficile car on n’a pas toujours les retours des producteurs. On a une partie du feed-back, on sait que certains sont distribués et même si certains ont déjà des importateurs, ils continuent à venir, car c’est l’occasion en une semaine d’aller à la rencontre de trois pays, de maintenir le contact avec l’importateur ou de rencontrer le client final, les points de vente, qu’ils peuvent aller rencontrer ensemble. »

Que recherchent les acheteurs en République tchèque ?

« C’est toujours la question. Si seulement j’avais la réponse ! En fait, chaque importateur a son histoire. Il y a des importateurs historiques qui sont là depuis la révolution de velours, qui sont là depuis des années, qui travaillent avec des grandes maisons, qui sont bien établis et ont leur gamme. Avec l’adhésion de la République tchèque à l’Union européenne en 2004, le processus administratif s’est largement simplifié donc beaucoup de gens se sont mis à importer du vin. Là, en situation de crise, c’est vrai que c’est difficile pour certains qui passent à autre chose. Mais chacun a sa problématique. Il y a des importateurs spécialisés sur une région précise qui viennent plus pour voir quelles sont les tendances. Mais quand je demande aux importateurs ce qu’ils recherchent, le discours officiel est de me dire : ‘j’ai ma gamme’. C’est rare que quelqu’un me dise : ‘ justement je suis en recherche sur telle région’. Le premier réflexe est de dire qu’ils ont ce qui leur faut, car ils sont très sollicités. Tous les producteurs français et des autres pays contactent les importateurs, veulent envoyer des échantillons... »

On a tendance à considérer que les consommateurs tchèques sont assez conservateurs au niveau du vin. Est-ce que ça change, est-ce que ça évolue ou ça n’a pas changé ?

« Les vins du Nouveau Monde ont eu une forte poussée au début des années 2000, mais ça s’est un peu tassé. C’est vrai que là, on est plutôt sur des vins européens. Quand on regarde les étiquettes sur les vins tchèques, on voit en effet que les Tchèques sont assez attachés à la tradition. Les domaines font des étiquettes pour l’export mais selon les pays, ils sauront qu’il faut rester dans quelque chose de plus traditionnel, ou que par contre ailleurs il faut être plus original... »

Vous en parliez tout à l’heure, et c’est difficile d’échapper à cette question... En tant de crise, comment se porte le secteur ? Au niveau des importateurs, mais aussi au niveau des consommateurs tchèques ? Est-ce qu’ils continuent à acheter du vin ?

« Les Tchèques continuent d’acheter du vin. C’est vrai que ces dernières années il y avait une progression constante des ventes. D’après les derniers chiffres que j’ai, cette année on est dans une phase de stabilisation. Mais il n’y a pas de recul important, ce qui est plutôt bon signe vu la situation de crise. Tous les voyants et les prévisions pour l’année prochaine sont plutôt à une reprise et à une croissance, légèrement positive, mais positive quand même. Donc c’est de bon augure pour le marché du vin. »

« Je m’appelle Elsa Lejeune. Je suis vigneronne en Roussillon. J’ai une petite propriété que j’ai créée en 2003 avec mes parents. Je produis deux vins rouges et un vin blanc. C’est une toute petite production puisque je produis environ 20 000 bouteilles. Je travaille exclusivement à l’export. C’est la première fois que je viens à Prague et en Europe de l’Est de manière générale. Je travaille beaucoup avec les Etats-Unis, l’Angleterre. Donc je viens voir un peu la température icialkohol/konak, quels sont les goûts des gens, de clients, les attentes au niveau du prix etc. »

Quelle est votre première impression, à chaud... ou à froid ?

« On n’a pas vu grand-chose aujourd’hui sur Prague donc on n’a pas vu d’importateurs pour l’instant. Donc c’est difficile à déterminer, mais globalement, vu qu’on a déjà fait Bucarest et Varsovie, les gens recherchent des petits prix. Pour de vins comme ceux-là, des vins de niche, un peu qualitatifs, des vins assez chers, c’est difficile de trouver un importateur. La consommation est encore assez timide. »

Pensez-vous que c’est un préjugé sur le prix des vins français ?

« Pas du tout. Mais il y a la crise, le pouvoir d’achat... Si on compare les salaires moyens avec nos clients américains, il y a une différence. Donc c’est une minorité qui peut se permettre d’acheter ces vins-là. Il doit y avoir de petites niches mais ça doit être difficile de trouver le bon interlocuteur. Il faudra peut-être revenir l’année prochaine et l’année suivante, jusqu’à trouver quelqu’un qui veuille bien travailler avec nous... »

« Je m’appelle Cédric Duquenoy, je travaille pour une société qui s’appelle LGI dans le Languedoc. On représente les vins du sud, de Montpellier jusqu’à Carcassonne. On a une société spécialisée 100% dans l’export, donc on ne vend pas du tout en France. On est surtout sur les pays européens, le nord de l’Europe, les Etats-Unis et aussi l’Asie. On est ici pour essayer de découvrir de nouveaux marchés, on travaille peu avec les pays de l’Est. »

Comment sentez-vous le terrain ?

« On sent que c’est un marché qui commence à bouger par rapport à il y a deux ans. On sent que la crise est là. Les gens sont un peu frileux pour rentrer de nouveaux produits. Le Languedoc est apparemment une région assez représentée ici, donc il y a pas mal de concurrence. Nous, on a l’originalité de faire des produits un peu différents, qui répondent surtout aux attentes des consommateurs plutôt qu’à développer des produits vraiment languedociens. On a une approche un peu différente. Il faut donc expliquer à l’importateur ce qu’on fait, qu’il goûte pour qu’on puisse discuter avec lui. »

Que recherchent les gens ici ?

« Ils recherchent un peu des nouveautés, des choses particulières. Surtout des rouges. Les blancs c’est plus difficile parce que c’est déjà un pays producteur. En plus on représente aussi la Gascogne, donc des vins plus acides, donc plus difficiles à goûter... »

« Je suis Louise Viero. Je suis d’origine danoise, mais je vis dans la région du cognac depuis 10 ans. Je travaille pour la société ABK6, du nom de notre propriétaire. Nous sommes producteurs, on est la plus grande structure de cognac dans l’AOC Cognac, avec 250 ha de vignobles. Nous commercialisons plusieurs marques de styles très différents qui viennent de nos différentes propriétés. »

Comment vend-on son cognac en République tchèque ?

« C’est ce que je suis en train de découvrir. Je ne suis pas du tout une spécialiste du marché tchèque. Je sais que j’ai affaire avec des consommateurs qui aiment bien les alcools forts, à base de prune, ou de plantes, des buveurs de bière... Donc c’est difficile d’arriver avec un cognac... Ceci dit quand vous venez avec des cognacs de qualité, de domaines comme ceux-ci, je pense qu’on a tout à fait notre place, surtout dans les bars. Je cherche donc à trouver à Prague un partenaire qui fournit ce genre d’établissements. »

Ce n’est pas un peu court une journée pour ça ?

« Une journée suffit rarement, c’est une première approche. C’est toujours intéressant de voir les gens déguster, de voir vers quels goûts ils vont, quels sont les prix dans les magasins. Mais ce n’est clairement pas la dernière fois que je viens... »