1,5 million de Tchèques menacés de pauvreté
Selon les chiffres publiés en mai dernier par l’Office national des statistiques (ČSÚ), environ un million et demi de personnes sont actuellement menacées de pauvreté en République tchèque, soit un peu plus d’un dixième de la population. Si certaines d’entre elles sont victimes d’un taux de chômage qui est pourtant l’un des plus bas en Europe (7,4% en juillet dernier), beaucoup d’autres, en raison de trop faibles revenus, ne disposent pas de ressources matérielles suffisantes leur permettant de vivre dans des conditions dignes de ce nom.
« Selon l’indice de développement humain de l’ONU, nous faisons partie des vingt-huit pays les plus riches dans le monde. C’est pourquoi il est d’autant plus alarmant que nous soyons confrontés à certains problèmes comme ceux des sans-abri, du mauvais accès au logement et ainsi de suite qui devraient être réglés depuis longtemps déjà. »
En République tchèque est considérée comme pauvre une personne disposant de revenus mensuels nets inférieurs à 9 600 couronnes (environ 350 euros). Or, le montant actuel du salaire minimum (8 500 couronnes – 310 euros) est inférieur à ce seuil. Selon le ministère du Travail et des Affaires sociales, environ 3% des travailleurs dans le pays perçoivent ce salaire minimum. Toutefois, beaucoup d’autres, 872 000 au total en 2013, n’en restent pas moins menacés par la pauvreté en raison de la faiblesse de leurs revenus. Un chiffre en baisse par rapport à 2012 et qui fait dire à Štefan Čulík, du département en charge de l’intégration sociale au ministère du Travail et des Affaires sociales, que la situation tend quelque peu à s’améliorer :
« Un facteur important est que la crise économique et financière tire bel et bien à sa fin. Il semble que le pire soit passé et que nous puissions maintenant attendre un retour de la croissance, ce qui est un des éléments-clefs pour lutter contre la pauvreté et l’exclusion sociale. Pour beaucoup de gens en situation précaire, trouver un emploi avec un salaire permettant de vivre un peu plus dignement est un élément indispensable pour réintégrer pleinement la société. »Toujours selon les données du ČSÚ, qui remontent à juin dernier, 26% des femmes et 15% des hommes travaillant en République tchèque perçoivent un salaire inférieur aux deux tiers du salaire médian, à savoir donc moins de 13 770 couronnes brutes par mois (environ 500 euros), le montant du salaire médian s’étant élevé à 20 651 couronnes au premier trimestre 2014 (750 euros).
Autre indicateur de l’importance de la pauvreté : le nombre de sans domicile. Les personnes « sans domicile » sont définies comme celles qui passent leurs nuits dans un lieu non prévu pour l’habitation, halte de nuit, ou dans un service d’hébergement. Parmi cette couche marginalisée et la plus défavorisée de la population, tous ne sont donc pas des sans-abri, comme on les imagine. Štefan Čulík confirme :
« Nous ne connaissons pas leur nombre exact, néanmoins selon certaines estimations, il y aurait environ 40 000 sans-abri en République tchèque. Mais les sans-abri ou sans domicile, ce ne sont pas seulement les personnes qui dorment dans la rue. Si l’on s’en tient à la typologie européenne de l’exclusion liée au logement, sont aussi considérées comme sans domicile toutes les personnes sans logement qui vivent dans des institutions ou des foyers d’hébergement et toutes celles qui vivent dans des logements précaires ou inadéquats, indignes. Et si l’on prend en compte les personnes menacées de perdre leur logement, alors on arrive à un total de 100 000 personnes. »Selon Tomáš Tožička, responsable d’une campagne contre la pauvreté qui regroupe plusieurs ONG et associations tchèques, les autorités ne mettent cependant pas tous les moyens en œuvre pour lutter contre le phénomène d’exclusion sociale. Sans créer de nouveaux ghettos, le logement social et l’emploi avec des salaires suffisants pour vivre dignement sont les deux instruments indispensables pour favoriser une véritable inclusion sociale.