65 ans depuis la mort de Karel Poláček
En ce mois de janvier, 65 ans se sont écoulés depuis la disparition de l’écrivain tchèque Karel Poláček. L’occasion de dresser le portrait de cet homme dont les ouvrages font désormais partie des « classiques » de la littérature tchèque du XXe siècle.
« Bylo nás pět » (Nous étions cinq), est sans doute le livre le plus connu de Karel Poláček. Mais ce n’est pas le seul ouvrage que l’on doit à cet écrivain, que l’on peut placer dans le cadre de la littérature de l’entre-deux-guerres dans la lignée humaniste d’auteurs contemporains tels que Karel Čapek ou František Langer.
Humaniste, mais également humoriste, Poláček était tout cela à la fois dans ses romans, mais l’humour n’était que la couche superficielle d’une œuvre traversée par le tragique des vies qu’il décrit. La médiocrité de la vie de province, l’étroitesse d’esprit de la petite bourgeoisie sont les thèmes sous-jacents qui courent dans l’œuvre de Karel Poláček.
Tout comme nombre de ses contemporains, Karel Poláček, écrivain d’origine juive, connaîtra un sort tragique. Le 5 juillet 1943, il est envoyé à Terezín. Michal Špirit, spécialiste de la littérature tchèque, à l’Université Charles :« Poláček n’aurait pas dû aller à Terezín. Il a choisi d’être volontairement déporté par solidarité avec sa compagne Dora Vaňáková, qui, elle, est morte à Auschwitz. Elle a été immédiatement emmenée en chambre à gaz. La fille de Poláček, Jiřina Poláčková, avait été envoyée en Angleterre en 1939 et elle a été sauvée. Plus tard, elle a vécu au Canada et est décédée en 2001. »
De Terezín, il sera envoyé à Auschwitz en octobre 1944. Pendant longtemps, on a cru qu’il était mort dans ce camp, avant qu’à la faveur d’appel à témoins, on découvre qu’il en était autrement.
« Au début des années 1990, à l’appel des spécialistes de Poláček, un témoin, une certaine Klára Baumöhlová originaire de Prešov, a confirmé qu’elle avait encore connu Karel Poláček à Noël puis en janvier 1945 à Auschwitz et qu’il avait survécu à son transfert d’Auschwitz à Hindenburg puis à Gleiwitz. Par contre, la date du 21 janvier, pour sa mort, est contestée. On n’a jamais su quand il a été exécuté par les nazis. Le plus probable, c’est qu’il soit mort fin janvier-début février, aux alentours de Buchenwald. »
Dès 1931, une de ses autres œuvres connues, Muži v offsidu (Les hommes hors-jeu), a été filmée par Svatopluk Innemann. Il faudra attendre l’après-révolution de velours, en 1993, pour que voit le jour une adaptation télévisée de « Nous étions cinq ». Un roman de l’enfance, tout en humour et en poésie, qui, comble de tout, fut rédigé par Karel Poláček en pleine Occupation. Une plongée dans l’atmosphère de son enfance que l’on peut comprendre comme un moyen de fuir la réalité quotidienne de la Seconde guerre mondiale.