Affaire Rampula : la justice tchèque dans la tourmente
Depuis le retour à son ancien poste du président du ministère public supérieur, Vlastimil Rampula, la justice tchèque est entrée dans une phase de turbulence inédite qui risque de bouleverser l’équilibre politique au sein du gouvernement puisque l’affaire Rampula fait des remous jusqu’en dans les rangs de l’ODS, le principal parti de la coalition gouvernementale.
L’annulation par la Cour de Prague de la décision de révoquer Vlastimil Rampula a provoqué un véritable conflit au sein du parquet entre les partisans de son maintien au sein du ministère public supérieur et ceux de son départ définitif.
La tension est telle que le ministre de la Justice a menacé dans une déclaration au quotidien Lidové noviny, vendredi dernier, de démissionner si le procureur Rampula était maintenu à son poste. Le Premier ministre, Petr Nečas (ODS) qui souhaite juguler une crise qui risque de mettre à mal le parti de la coalition ODS dont des membres pourraient être impliqués dans les affaires de corruption géré autrefois par le procureur Rampula, a à son tour réagi en enjoignant le ministre de la Justice de stabiliser au plus vite la situation au sein du parquet :
« Monsieur Pospíšil est responsable du ressort de son ministère comme chaque ministre l’est de son ministère. J’attends donc de sa part une déclaration qui stabilise la situation car il est exclu que la guerre entre des représentants du ministère public soit prolongée. Elle discrédite l’ensemble de la justice »
Fort de son retour au sein du parquet, Vlastimil Rampula a déposé la semaine dernière une plainte au pénal contre son prédécesseur Stanislav Mečl qu’il accuse à l’appui d’un enregistrement vidéo, d’être entré illégalement dans le bureau de son assistant Libor Grygárek afin d’y consulter certains dossiers. Le premier intéressé récuse l’accusation et signale qu’il s’agissait d’une enquête menée par la police.La tension au sein du parquet est encore montée d’un cran après que le représentant du ministère public suprême, le premier procureur dans la hiérarchie du parquet, Pavel Zeman a à son tour menacé en début de semaine de démissionner si le procureur Rampula n’était pas révoqué. Pour la présidente de l’Union des magistrats du ministère public, Lenka Bradáčová, le conflit nuit à l’ensemble de la justice :« Je ne veux pas dire que cette situation ne peut pas avoir lieu ; qu’un procureur dépose une plainte au pénal contre l'un de ses collègues… mais la situation actuelle ne correspond pas aux standards de la justice, surtout du point de vue des faits qui sont reprochés au procureur Mečl… mais évidemment, c’est au procureur Rampula de décider de la suite de l’affaire »
Lenka Bradáčová signale en outre que la situation au sein du parquet est rendue possible en raison du manque de clarté dans la procédure de nomination et de révocation des procureurs :
« C’est un problème essentiel. Les règles de nomination des membres du parquet n’ont jamais été directement résolues dans la loi. Il est nécessaire que les règles soient clairement établies afin, notamment, de savoir de quelle manière les fonctionnaires du ministère public sont nommés et révoqués. »
Pour l’heure, le ministre de la Justice a annoncé vouloir déposer une plainte auprès de la Cour de cassation afin de faire appel de la décision de la Cour municipale de Prague de rétablir dans ses fonctions Vlastimil Rampula. Cette affaire fait resurgir les soupçons de corruption qui pèsent sur certains représentants de la justice tchèque.