Aider les jeunes chercheurs pour les faire rester dans le pays

Jean-Marie Lehn, photo: Anne-Claire Veluire

Le professeur Jean-Marie Lehn, Prix Nobel de chimie 1987 et professeur au Collège de France, a présidé, mardi, la cérémonie de remise des prix de chimie, pharmacie et médecine, à de jeunes chercheurs tchèques qui s’est déroulée à l’Ambassade de France à Prague. Principal promoteur de cette initiative, il a évoqué pour Radio Prague les débuts de cet important soutien accordé par la France à la recherche tchèque.

Jean-Marie Lehn,  photo: Anne-Claire Veluire
« Le coup d’envoi a été donné par la conjonction de trois choses. D’une part, l’Université Charles m’a donné un doctorat honoris causa, ensuite j’étais conseiller chez Rhône-Poulenc, qui était la plus grande entreprise à large éventail, de chimie jusqu’à pharmacie, et la troisième chose c’est qu’à l’ouverture des frontières, il y avait un très grand risque de voir les jeunes étudiants de ces pays de l’Est, s’échapper pour aller à l’Ouest, chercher de meilleures conditions à l’Ouest, et ce n’était pas bon pour les universités et les institutions d’études supérieures d’Europe centrale et, en particulier, en République tchèque. «

C’est là que vous avez pris cette initiative.

« J’ai invité le directeur des recherches de Rhône-Poulenc et six entreprises étaient aussi intéressées par le fait que dans les laboratoires d’Europe centrale il y avait beaucoup de composés chimiques qui pouvaient être intéressants pour leur activité biologique, il y avait donc vraiment des prospections pour essayer d’avoir des accords avec des laboratoires des universités, pour obtenir des produits et, éventuellement, si les produits se révélaient intéressants du point de vue pharmaceutique, faire le contrat avec le laboratoire etc. Toutes ces conjonctions et le fait que c’était Prague qui m’a donné le docteur honoris causa, et comme le directeur scientifique était d’accord, nous avons décidé de créer un prix qui couvre à peu près une année de bourse. Les lauréats de ce prix ont dû s’engager à rester au moins une année dans le laboratoire. Une façon de leur donne une aide financière pour les faire rester ».

C’était donc le début…

Photo: Commission européenne
« Oui, ça c’était au début, il y a eu trois prix au début, d’abord pour l’Université Charles, ensuite cela s’est étendu à tout Prague et puis à toute la Tchécoslovaque, tandis que les prix actuels concernent la République tchèque ».

Les années 1990 ont-elles été difficiles pour la science tchèque ?

« La période après l’ouverture a été très difficile, extrêmement difficile, avec des salaires misérables comparé à ce qu’il y avait à l’Ouest, évidemment, et on pouvait bien comprendre que les jeunes Tchèques regardaient du côté Ouest pour leur avenir. C’est pour cela qu’on a essayé de faire quelque chose pour qu’ils restent ici, car si les jeunes partent, c’est très très mauvais pour la science ici. On a donc contribué avec quelque chose, j’espère ».

Patrick Maestro, directeur en recherche avancée pour le groupe Rhodia, s’interroge pour sa part sur l’intérêt des prix accordés par l’Ambassade de France et les entreprises partenaires, Rhodia CR, Sanofi-Aventis et Pierre Fabre Médicament.

Patrick Maestro
« C’est un intérêt très important dans la mesure où Rhodia a pour mission de développer l’innovation pour que le groupe assure une croissance et cette innovation se nourrit beaucoup de nos recherches propres, mais aussi de la connaissance des recherches qui se font dans le monde académique. Donc être membre d’un jury me permet d’avoir des présentations des dernières avancées de la recherche en République tchèque, en chimie. »

Quel jugement portez-vous sur la qualité des jeunes chercheurs tchèques ?

« J’ai trouvé une très bonne qualité d’ensemble, avec en particulier des recherches de fond qui sont de grande qualité, mais également une aisance dans la présentation qui est très importante. Et les sujets présentés, ce sont des sujets au bon niveau par rapport à la compétition internationale ».