Alimentation : les députés veulent imposer plus de « produits tchèques » dans les commerces
A compter de l’année prochaine, les rayons des magasins d’alimentation en République tchèque devraient être composés pour au moins 55% de produits d’origine tchèque. Une part qui augmenterait ensuite chaque année pour parvenir à un taux de 85% en 2027. C’est du moins ce que prévoit l’amendement à la loi sur les produits alimentaires qui sera prochainement débattu en troisième lecture par la Chambre des députés. Et avec une certaine chance de succès, bien que tous les experts ne soient pas convaincus par les bienfaits d’une telle politique.
« Si je produis quelque chose chez moi et que j’en dispose suffisamment, la fermeture des frontières ne me gêne pas, car elle ne menace plus les approvisionnements. Et si nous prétendons vouloir protéger l’environnement, alors réduisons l’empreinte carbone, raccourcissons les circuits de distribution et ne transportons plus les produits d’un bout du monde à un autre. »
Membre du parti d'extrême-droite SPD, Zdeněk Podal compte lui aussi parmi les défenseurs du projet et les partisans du « toujours plus de tchèque » dans les caddies et les assiettes. Selon lui, il convient de forcer les chaînes de magasins à revoir leur politique pour vendre des produits locaux à des prix plus équitables pour les agriculteurs :
« Les prix d’achat auprès des producteurs ont tendance à baisser, alors que les prix de vente imposés par les chaînes augmentent. La marge est de plus en plus importante, et je pense qu’il ne faut pas laisser faire. C’est de plus en plus compliqué pour nos cultivateurs et nos éleveurs, surtout que les enseignes de grande distribution appartiennent le plus souvent à des multinationales. »Si le projet d’amendement semble bénéficier d’un important soutien y compris donc en dehors des rangs de la coalition gouvernementale, certaines voix s’élèvent cependant parmi l’opposition, comme celle par exemple de Jan Skopeček, député membre du parti conservateur ODS. Si lui aussi est favorable à un soutien des producteurs tchèques, il estime néanmoins que le choix du produit acheté doit continuer à appartenir au consommateur. Selon lui, les quotas faussent le marché :
« Peu importe qu’il s’agisse de produits alimentaires ou d’autre chose. Quel que soit le marché, une réduction de l’offre entraînera très probablement une augmentation des prix, sans même parler d’une possible baisse de la qualité des produits en raison de la faible concurrence. Je pense qu’il s’agit aussi d’une atteinte à la liberté de choix des consommateurs, car l’offre sera forcément moins variée. »
Ancien ministre de l’Agriculture et actuel leader du parti chrétien-démocrate, Marian Jurečka fait partie de ceux qui, bien que représentants de l’opposition, soutiendront le projet, voyant en celui-ci un moyen de diversifier les types de culture dans une République tchèque souvent critiquée pour la monotonie de ces paysages agricoles en raison des grandes monocultures qui nécessitent par ailleurs d’importantes quantités de pesticides. Une plus grande diversité permettrait également de mieux retenir l’eau et de lutter contre une sécheresse croissante année après année.De son côté, la Chambre de commerce de République tchèque a rappelé que l’article 34 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, dans le chapitre relatif à la libre circulation des marchandises, stipule noir sur blanc que « les restrictions quantitatives à l'importation ainsi que toutes mesures d'effet équivalent, sont interdites entre les États membres. » Ainsi donc, le projet tchèque, s’il devait être appliqué, violerait les règles du marché commun.