Ancienne présidente de Transparency International, Adriana Krnáčová sera la première femme maire de Prague
Comme Paris depuis six mois avec Anne Hidalgo, Prague sera elle aussi dirigée prochainement par une femme pour la première fois de son histoire. Tête de liste du mouvement libéral ANO, qui a remporté les élections municipales le 11 octobre dernier, Adriana Krnáčová sera la nouvelle maire de la capitale. Ainsi se sont entendues, vendredi dernier, les trois formations composant la nouvelle équipe municipale. Originaire de Bratislava naturalisée tchèque il y a peu, comme le leader d’ANO et actuel ministre des Finances Andrej Babiš, Adriana Krnáčová était connue jusqu’alors surtout comme ancienne présidente du bureau tchèque de Transparency International. La stratégie de lutte contre la corruption, qui mine Prague depuis de nombreuses années, l’administration publique et la législation seront les trois domaines dont elle aura plus particulièrement la responsabilité. Et ses prédécesseurs peuvent en témoigner : c’est une responsabilité particulièrement lourde et une tâche ardue qui l’attendent.
Prononcés dans un français certes quelque peu approximatif, mais en français quand même, ces paroles remontent à dix ans (http://www.radio.cz/fr/rubrique/faits/corruption-la-tchequie-cancre-de-lunion-europeenne). A l’époque, en octobre 2004, nous avions demandé à Adriana Krnáčová de commenter l’Index de perception de la corruption que venait de publier Transparency International, l’ONGI dont elle était la présidente de l’antenne tchèque. Adriana Krnáčová était alors particulièrement bien placée pour savoir quels étaient les secteurs les plus touchés par la corruption en République tchèque :
« Cela ne change pas vraiment d'une année à l'autre. Ce sont les travaux publics, la justice et la police. Pour ce qui est des formes de corruption les plus répandues, citons le versement de pots-de-vin, le lobbying, pratique totalement invisible, et le clientélisme, l'offre d'emplois avantageux à des collègues, amis, connaissances, etc. »
Dix ans plus tard, donc, si la République tchèque n’est peut-être plus en la matière le cancre de l’Union européenne qu’elle était encore au moment de son adhésion, la corruption et la gestion opaque de nombre de dossiers demeurent encore des problèmes de premier ordre. Cela est vrai notamment à Prague, où la municipalité traîne les casseroles accumulées par les équipes dirigeantes précédentes. Adriana Krnáčová, qui occupait dernièrement les fonctions de ministre-adjointe de l’Intérieur en charge déjà de l’administration publique et de la législation, est d’ailleurs bien consciente que c’est sur sa capacité et celle de son conseil municipal à améliorer l’image de la ville sur ces points précis qu’elle sera d’abord jugée lors de son mandat :
« Les Pragois peuvent s’attendre à une gestion transparente et rationnelle de la mairie. Nous allons chercher des solutions pour les transports et le stationnement dans la ville, pour la collecte et le transport des ordures ménagères, qui constituent également un dossier brûlant. Bien sûr, il faudra régler l’affaire Opencard (système de cartes électroniques à multiples usages utilisées essentiellement dans les transports en commun à Prague, Opencard fait l’objet d’une enquête pour abus de pouvoir et manipulation d’appels d’offres. Plusieurs anciens conseillers municipaux et les deux derniers maires de Prague sont impliqués dans cette affaire, ndlr) et tous les autres dossiers sensibles qui ont coûté beaucoup d’argent pour des résultats pour le moins douteux. J’espère que nous serons en mesure au sein de notre coalition municipale d’agir de concert dans l’intérêt des Pragois et que nous travaillerons en équipe. »A Prague, bastion fort traditionnel de la droite jusqu’aux dernières élections, cette coopération pourrait être facilitée par le fait que la composition de la coalition municipale ressemble fort à celle du gouvernement en place depuis janvier dernier. Au mouvement libéral ANO se sont joints les sociaux-démocrates et les partis d’une formation appelée « Coalition tripartite », au sein de laquelle figurent notamment les chrétiens-démocrates et les Verts. Toutefois, seule l’épreuve du temps permettra de vérifier si cette relative bonne entente politique donnera les moyens à Adriana Krnáčová, sans appartenance politique avant sa candidature, de mener à bien son projet et de faire de Prague une ville un peu plus propre. Car elle et Andrej Babiš l’ont promis dans le slogan de leur campagne électorale : « Nous ferons le nécessaire » (Prostě to zařídíme). Les Pragois sont maintenant curieux de voir comment.