Avions CASA : la vice-présidente de la Chambre des députés privée de son immunité

Vlasta Parkanová et Miroslav Kalousek, photo: CTK

Comme cela était plus ou moins attendu, la Chambre des députés a levé, mercredi, l’immunité parlementaire de sa vice-présidente, Vlasta Parkanová, ouvrant ainsi la voie à des poursuites judiciaires. Ancienne ministre de la Défense sous le gouvernement Topolánek, Vlasta Parkanová est soupçonnée d’abus de pouvoir et de confiance lors de l’achat, en 2009, de quatre avions militaires de transport CASA pour un montant très supérieur au coût réel estimé.

Vlasta Parkanová et Miroslav Kalousek,  photo: CTK
117 voix pour, 45 contre : bien que précédé d’un débat de près de cinq heures, le résultat du vote des députés a été unanime ou presque. Privée de son immunité parlementaire, Vlasta Parkanová a réagi en démissionnant de ses fonctions.

Depuis la signature du contrat d’une valeur de près de 140 millions d’euros, la commande des avions CASA au constructeur Eads a fait couler beaucoup d’encre. En 2010 déjà, la Commission européenne avait ouvert une enquête au titre d’infraction à la réglementation communautaire sur les marchés publics. Bruxelles reprochait à la République tchèque d’avoir directement attribué le contrat d’achat sans appel d’offres, empêchant ainsi une mise en concurrence. Le gouvernement tchèque avait alors réagi en mettant sa législation en conformité et l’enquête avait été refermée.

Un avion CASA
C’est donc la police tchèque qui a pris le relais. Les enquêteurs estiment en effet que le coût des avions a été surévalué d’environ 25 millions d’euros. Et ils soupçonnent Vlasta Parkanová d’avoir joué un rôle dans cette transaction douteuse et opaque en ne respectant pas les obligations liées à ses fonctions. L’ancienne ministre de la Défense n’aurait notamment pas demandé d'analyse indépendante auprès des experts concernant le prix du marché. Elle se défend en affirmant qu'une telle obligation n'existait pas à l'époque.

Mais beaucoup considèrent que Vlasta Parkanová ne servirait que de marionnette, comme du temps où elle était à la tête de la Défense. Selon eux, en agissant de la sorte, la police espère que les interrogatoires de l’ancienne ministre lui permettront d’obtenir de nouvelles informations sur les autres acteurs de la transaction et peut-être même sur d’autres affaires encore, la plupart des commandes pour l’Armée tchèque ayant fait l’objet d’importants soupçons de corruption. Cette version des faits est toutefois niée par Vlasta Parkanová, qui rejette toute accusation :

Vlasta Parkanová,  photo: CTK
« C’est là une approbation scandaleuse à la théorie selon laquelle je dois être accusée d’actes délictueux uniquement pour que la police, en menant des poursuites contre ma personne, puisse découvrir les délits commis par d’autres malfaiteurs. »

Et parmi les personnages susceptibles d’être inquiétés par la police figure un des hommes politiques les plus influents et les plus en vue de ces dernières années : l’actuel ministre des Finances, Miroslav Kalousek, vice-ministre de la Défense dans les années 1990 et membre du gouvernement au moment de l’achat des avions. Depuis que la demande de la levée de l’immunité parlementaire a été formulée par la police, Miroslav Kalousek défend bec et ongles Vlasta Parkanová, sa collègue de parti. Il s’en est pris notamment aux pratiques de la police, des pratiques qu’il a comparées à celle de la StB, l’ancienne police secrète communiste :

Miroslav Kalousek,  photo: CTK
« Les organes actifs dans la procédure pénale ne peuvent pas imaginer plus grande absurdité que celle-ci. C’est impossible. N’importe quel policier peut désormais venir à la Chambre des députés et accuser qui que ce soit parmi nous. Avec ce vote aujourd’hui, j’affirme que l’immunité parlementaire a été supprimée. Elle l’a été de facto, et si elle ne l’est pas encore d’un point de vue législatif, alors c’est moi qui présentera le projet de loi pour qu’elle le soit. »

Même parmi les députés qui ont voté pour la levée de l’immunité parlementaire de Vlasta Parkanová, relativement nombreux sont ceux qui estiment que l’accusation de la police est incomplète, l’ancienne ministre ne pouvant être la seule à porter le chapeau. Malgré cela, la Chambre, à l’image déjà très écornée par la multiplication des scandales en tous genres, ne pouvait pas se permettre, en l’état actuel des choses, de conserver sa vice-présidente. Tant pis pour cette dernière, mais reste à savoir si ce sera tant mieux pour les autres, probablement les véritables responsables.