Briser l'isolement informationnel du Bélarus

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La réélection, avec plus de 82% des suffrages, du Président bélarusse Alexandre Loukachenko et dont la légitimité est contestée par l'opposition bélarusse, n'est pas passée inaperçue en République tchèque.

Alexandre Loukachenko,  photo: CTK
Quelques 80 personnes se sont réunis, ce dimanche, place Venceslas, au centre de Prague, pour protester contre le régime du président Loukachenko et pour les élections libres au Bélarus. Parmi les manifestants il y avait de nombreux étudiants bélarusses. Un étudiant de l'Ecole des Hautes études économiques à Prague désirant garder l'anonymat pour protéger sa famille au Bélarus a expliqué à Radio Prague les raisons de sa présence à cette manifestation:

"Je crois que la situation là-bas va de mal en pis. Quelque 70 membres de l'opposition sont déjà emprisonnés et Loukachenko a promis de mettre tous les opposants en prison. S'ils participent à la manifestation contre le régime, ils risquent même d'être condamnés à mort."

On se demande évidemment si de telles initiatives peuvent avoir un impact sur la situation au Bélarus, si les informations sur ce mouvement de soutien parviennent jusqu'aux simples habitants de ce pays. L'analyste de l'Association pour les questions internationales Jan Marian ne cache pas son scepticisme à ce sujet :

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"Evidemment ce ne sont que les habitants de grandes villes et les membres de l'opposition qui sont au courant de ces initiatives. Vu que les médias d'Etat sont contrôlés par le régime et que les gens à la campagne et dans les petites villes ne disposent pas d'autres sources d'information, ils n'ont pas eu la possibilité d'entendre parler de ces manifestations."

Le ministre tchèque des Affaires étrangères Cyril Svoboda qui juge "inéquitable et non démocratique" le scrutin de dimanche estime pourtant qu'il faut chercher à établir un dialogue avec la population bélarusse. A son avis, il faut soutenir l'opposition mais aussi aider les universités, les organisations non gouvernementales et les partis démocratiques. Il se montre en revanche très réservé en ce qui concerne d'éventuelles sanctions contre le régime bélarusse :

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"Je ne pense pas que ce soit bon à quelque chose. L'Union européenne ne peut pas décider de telles choses parce que le Bélarus n'est pas membre de l'Union. A mon avis, les sanctions économiques ne sont pas vecteurs de changements et elles frappent surtout la population des pays en question. Les sanctions économiques ne sont pas une bonne solution."

Quelle sera donc l'évolution post-électorale dans ce pays ou tous les changements sont difficiles sinon impossibles. L'opinion du politologue tchèque Jan Holzer:

"La question est de savoir s'il est réaliste d'attendre au Bélarus une évolution semblable à celles d'Ukraine ou de Géorgie. C'est un problème souvent discuté par les politologues. Peut-on s'attendre à une révolution "colorée", est-ce le tour du Bélarus? Je crois que ce n'est pas le cas pour des raisons émotives mais aussi objectives."

Il semble que pour aider le Bélarus il faille avant tout briser l'isolement médiatique dans lequel le président Loukachenko a plongé son pays. Les étudiants interrogés, ce dimanche place Venceslas, partagent d'ailleurs cet avis.