Cent ans de l'attribution du statut de ville au quartier pragois de Brevnov

Brevnov

Ces derniers jours, le quartier pragois de Brevnov a fêté le 100e anniversaire de l'attribution de son statut de ville. Son histoire est toutefois beaucoup plus ancienne : Brevnov faisait déjà partie de la grande Prague actuelle en 993, lorsque le premier couvent des Bénédictins en Bohême y fut fondé. Retour donc sur l'histoire de Brevnov, aujourd'hui quartier du 6e arrondissement de Prague.

Brevnov est un endroit riche d'histoire, non seulement grâce à l'existence du couvent, mais aussi parce que c'est là que s'est déroulée la bataille de la Montagne Blanche en 1620. C'est depuis Brevnov que les Suédois ont envahi Prague, en 1648, pour occuper le château de Hradcany. Deux siècles plus tard, en 1878, le parti social-démocrate tchécoslovaque fut fondé à la maison U Kastanu. Au début du XXe siècle, le plus grand stade dans le pays fut également édifié à Strahov. Entre 1932 et 1948, il y a abrité les fêtes fédérales des associations Sokol. Jusqu'au milieu du XIXe siècle, l'actuel quartier de Brevnov était composé d'anciennes exploitations agricoles et vinicoles nommées Kajetanka, Petynka, Malovanka, et ce n'est que plus tard que furent édifiés le long de la route menant à Prague par la porte de Strahov les premiers immeubles d'habitation, de sorte qu'en 1907, Brevnov a obtenu le statut de ville, explique le maire de Prague 6, Tomas Chalupa :

« 100 ans de Brevnov, ce n'est certainement pas beaucoup, 100 ans dans la vie d'une ville, ce n'est qu'un fragment, d'autre part, la date de 1907 a marqué un tournant important dans la vie de Brevnov, qui est alors passé du statut de commune à celui de ville. De ce point de vue, ce fut un événement, mais lorsqu'on le compare à l'histoire du couvent de Brevnov, qui a célébré le millénaire de sa fondation au début des années 1990, cette histoire est incomparablement plus longue... »

Avec le concours du prince Boleslav II, Adalbert fit fonder, en 993, à Brevnov, le premier couvent de l'ordre de Saint-Benoît en Bohême, qui restera son principal legs jusqu'à aujourd'hui. Peu après la fondation du couvent, Adalbert, persona non grata, fut expulsé du pays. Il retourna en Italie et décida d'aller prêcher l'Evangile aux païens dans le nord et le nord-est de la Bohême, ainsi qu'en Prusse, où vivaient les Polabes. Et c'est là qu'il trouva la mort comme martyr: le 23 avril 997, il fut tué par des païens, la tête décapitée et empalée... Les Tchèques et les Polonais l'honorent comme patron national, les Hongrois comme apôtre de Hongrie et le pape Paul VI le proclama, en 1965, principal patron de l'archidiocèse de Prague.

Le maire de Prague 6 Tomas Chalupa et l'abbé Prokop Sistrzonek
Effectivement, le premier couvent d'hommes en Bohême, qui est aujourd'hui la plus grande fierté du quartier de Brevnov, fut fondé avant 993, à l'initiative de l'archevêque de Prague, Vojtech, confirmé sous le nom d'Adalbert. Issu de la famille princière des Slavnik, la deuxième plus puissante en Bohême, Adalbert fut confronté à de maints obstacles dans son travail, en raison justement de la grande rivalité avec la famille régnante. De même, l'état de la société tchèque d'alors, qui menait une vie plus païenne que chrétienne, le décevait. Il se réfugia en Italie, mais pendant son absence à Prague, la situation dans le diocèse s'aggrava. Il retourna à Prague en 992, accompagné de douze moines bénédictins, les pieds nus et dans un habit de pénitent. Les Pragois lui réservèrent un accueil chaleureux.

Voici quelques moments clés de l'histoire du couvent de Brevnov: entre 1035 et 1089, l'abbé Menhart a fait ériger sur l'emplacement de l'actuel couvent une église en pierre, dont la crypte a été conservée jusqu'à aujourd'hui. De cette période date aussi la légende du pèlerin Guntherus qui y gît. La crypte abrite aussi les reliques de sainte Marguerite, patronne de la basilique archiépiscopale que le roi Béla II de Hongrie a offerte à l'abbaye. A partir des années soixante du XIIIe siècle, Brevnov devint aussi un lieu de pèlerinage, grâce au culte de Günter le Bienheureux et de la nouvelle patronne, sainte Marguerite.

Pendant les guerres hussites, l'abbaye connut une période difficile, la communauté bénédictine fut contrainte de se retirer à Broumov, une autre abbaye bénédictine tchèque, où sont également transférées les archives, la bibliothèque et le trésor. Les bâtiments de Brevnov furent incendiés en 1420 et l'abbaye vouée au délabrement. Elle ne retrouve son essor ancien qu'au XVIIIe siècle, sous l'abbé Otmar Zinke, qui engage des architectes et des artistes parmi les plus renommés, comme l'architecte Kilian Ignac Dientzenhofer ou le sculpteur Petr Brandl, pour transformer l'abbaye dans le style baroque. L'édifice de l'église Sainte Margueritte avec un espace dynamiquement modelé sur le plan de l'intersection de quatre ovales fut complété à l'intérieur de fresques de Jan Jakub Stevens, de six tableaux d'autel de Petr Brandl et de stucs des frères Asam.

Le couvent de Brevnov
Après la guerre, les bénédictins retournèrent au couvent de Brevnov, mais pas pour longtemps. En 1947, Anastaz Opasek devint le soixantième abbé de Brevnov et la même année, on célébra le 950e anniversaire du martyre de saint Adalbert. Mais après le putsch communiste de 1948, l'abbé Opasek fut arrêté et condamné à perpétuité. Puis les activités des ordres, et pas seulement de celui de Brevnov, furent interdites et les moines déportés à Broumov. Le couvent de Brevnov abrita alors les archives du ministère de l'Intérieur, et ce jusqu'en 1990, date de la reprise de ses activités. Avec le retour de l'abbé Opasek, le couvent subit une importante restauration, grâce notamment au soutien de couvents étrangers. En 1997, le pape Jean-Paul II a visité le couvent. Pour l'abbé actuel, Prokop Sistrzonek, le couvent de Brevnov veut être un lieu de rencontres de gens de religions différentes, un lieu de recherche de ce qui unit les hommes. Comme il l'a rappelé, le couvent souhaite entretenir le legs de saint Adalbert, son fondateur, qui a apporté de Rome non seulement la foi, mais aussi la culture liée à l'observance de saint Benoît. « Ora et labora » - Prier et travailler.