Clip promotionnel : la Tchéquie, un pays génial mais masculin
La République tchèque est un pays formidable. C’est ce dont veut nous persuader un nouveau clip vidéo réalisé en neuf langues à l’initiative du ministère des Affaires étrangères et intitulé de façon évocatrice : « Czechia Has Marvellous People » ou en français, « La Tchéquie, une population merveilleuse ». Car il s’agit aussi de faire la promotion de ce nom court « Czechia ». Le résultat, selon certains, donne une vision un peu partielle du pays…
C’est en musique, avec la première des impressions poétiques d’Antonín Dvořák, que la vidéo nous propose de découvrir les mille et une réussites de la République tchèque. On comprend tout de suite que le pays compte des compositeurs immortels et ce n’est que le début d’un inventaire à la Prévert. Non content d’être un pays aux décors somptueux et à l’histoire millénaire incarnée par sa capitale, Prague, la Tchéquie propose une industrie à la pointe, une agriculture innovante, des bières excellentes, des vins à l’avenant et une gastronomie délicieuse. Pendant les cinq minutes que dure le spot, on en apprend encore sur les exploits des sportifs tchèques et sur la vitalité de l’industrie cinématographique et du milieu artistique dans le pays. Et puis il est rappelé que la République tchèque est membre de l’OTAN et de l’Union européenne. Bref, la Tchéquie a une « population merveilleuse ». La vidéo a été présentée au cours de ce mois de décembre au palais Černín, le siège du ministère des Affaires étrangères, à l’occasion d’une rencontre avec quelque deux cents entrepreneurs en présence du premier ministre Bohuslav Sobotka. Ce n’est pas un hasard car ce clip leur est destiné au premier chef. Lors des rencontres internationales, les représentants tchèques se plaignaient en effet de ne pas disposer d’une vidéo de présentation de leur pays et de ses atouts, à l’inverse d’autres délégations. Selon le chef de la diplomatie tchèque Lubomír Zaorálek, son ministère ressentait depuis longtemps la nécessité de combler ce vide et c’est désormais chose faite. Il faut noter que la version anglaise du court métrage permet également de faire la promotion de « Czechia », le nom géographique court de la République tchèque en anglais, inscrit depuis le printemps dans la base de données de l’ONU. Or le quotidien britannique The Guardian constatait récemment dans un article le relatif échec de cette nouvelle appellation, que personne ou presque n’utilise. En français, son équivalent, le mot « Tchéquie », semble avoir connu un sort plus heureux. Comme le souligne le géographe Radim Perlín, les deux termes peuvent être utilisés indistinctement :« Les deux appellations sont équivalentes. Il n’y a rien à reprocher ni à l’une ni à l’autre. ‘Czech Republic’, ou ‘Česká republika’, est le nom politique du pays qui s’utilise comme on peut utiliser Royaume d’Espagne, Royaume des Pays-Bas ou République d’Autriche. A partir du moment où vous utilisez les noms Espagne, Italie ou Autriche, il est correct d’utiliser le nom ‘Česko’ ou bien en anglais ‘Czechia’, ou les mots adéquats dans d’autres langues. Les deux noms sont équivalents ! » Reste que la vidéo s’est déjà attiré quelques critiques. Elle présente certes une population merveilleuse mais également une population essentiellement masculine. C’est ce qu’a remarqué Petr Bittner, l’éditorialiste du journal en ligne Deník Referendum, pour qui la République tchèque n’apparaît pas tant comme un pays de gens formidables que comme « le club d’une élite masculine ». Et il est vrai qu’entre le souffleur de verre, le peintre, l’ouvrier, le pianiste, le footballeur, le militaire ou encore le chef cuisinier, le paysage est essentiellement masculin. C’est au moins la moitié de la population tchèque qui est ainsi exclue d’emblée de la vidéo. Enfin pas tout à fait puisqu’il est vrai que la joueuse de tennis Petra Kvitová, exilée fiscale à Monaco, ainsi qu’une femme travaillant visiblement dans le secteur de l’horlogerie, apparaissent dans la vidéo et sont censées à elles deux représenter la gente féminine tchèque. Autre faux pas, sans doute moins signifiant mais tout de même relevé par la presse tchèque : le pianiste qui apparaît dans la vidéo utilise un piano de marque américaine… Le fabriquant tchèque Petrof, l’un des plus importants en Europe, n’a pas manqué de monter au créneau. Dans un clip visant à promouvoir le savoir-faire tchèque, il estime qu’il aurait tout de même été plus logique d’utiliser un instrument « made in Czechia »…