Congé de paternité : les pères tchèques y auront droit eux aussi
Appliqué dans vingt-trois pays de l’Union européenne, dont la France où il a été mis en place en 2002, le congé de paternité sera introduit également en République tchèque. A compter de l’année prochaine, les pères tchèques auront droit à une semaine de congé au moment de la naissance de leur enfant.
Bien qu’adoptée successivement par la Chambre des députés et le Sénat, l’introduction de cette nouvelle aide à la famille ne fait pas l’unanimité sur la scène politique tchèque. Elle est défendue par la ministre du Travail et des Affaires sociales Michaela Marksová :
« C’est une possibilité que nous offrons aux familles. Diverses études ont démontré que les jeunes familles étaient très nombreuses à vouloir en profiter. L’objectif premier de cette démarche est de permettre aux pères de nouer un lien plus étroit avec leur enfant. » Outre son aspect psychologique, les jeunes familles tchèques seront sans doute attirées aussi par le côté pratique de la chose : pour pouvoir apporter une aide à leurs conjointes au retour de la maternité, les pères étaient jusqu’à présent contraints de prendre un congé régulier, ou alors une sorte de « congé proche aidant ». On écoute la vice-présidente chrétienne-démocrate du Sénat, Miluše Horská :
« De mon point de vue, il s’agit là d’une démarche d’un Etat responsable vis-à-vis de parents responsables qui sont en même temps des salariés qui paient leur assurance-maladie. C’est une sorte de bonus qui leur est offert de la part de l’Etat. »Si la mise en place du congé de paternité est critiquée même au sein de la coalition gouvernementale, par le ministre des Finances et leader du mouvement ANO Andrej Babiš, elle est aussi vue d’un mauvais œil par l’opposition de droite. Les partis conservateurs et libéraux ODS et TOP 09 estiment qu’il s’agit d’une mesure populiste, inutile et trop coûteuse, comme l’affirme le sénateur ODS Jaroslav Kubera :
« Ce projet coûtera au moins un milliard de couronnes. Personne ne connaît aujourd’hui le coût réel de ce projet, personne ne sait combien de pères profiteront de ce congé. Par ailleurs, celui-ci représente une charge énorme pour les employeurs. » Selon l’analyste de la société Deloitte, David Marek, les craintes de l’opposition de droite ne sont pas sans fondement :
« Actuellement, la situation budgétaire est favorable, l’Etat tchèque peut donc se permettre d’être généreux. Mais cette situation peut se dégrader à l’avenir. Il faut être conscient du fait qu’il s’agit là d’une mesure qui sera appliquée pendant de longues années, qu’elle représentera une charge budgétaire à assumer aussi pour les futurs gouvernements. »Pour Martin Jára, psychologue et directeur de la « Liga otevřených mužů » (Ligue des hommes ouverts), une ONG qui œuvre en faveur de la place et des droits des hommes dans la société, l’introduction du congé de paternité n’aura que des conséquences positives sur la famille tchèque :
« Pour nous, ce n’est pas seulement un geste symbolique fait par l’Etat. C’est une mesure qui aura un impact concret et positif sur toute la société. Le fait de faire participer les hommes immédiatement aux soins des nouveau-nés donne l’espoir que le couple partagera les soins même dans le futur, qu’il se répartira les tâches ménagères aussi. Notre optique est celle de l’égalité des chances entre hommes et femmes. »
Dans ce domaine précis, la République tchèque a encore un long chemin à parcourir, les inégalités entre hommes et femmes sur le marché du travail restant parmi les plus marquantes à l’échelle européenne, aussi parce que les mères tchèques quittent leur emploi parfois jusque pendant trois ans après la naissance d’un enfant. Pour commencer, la « Ligue des hommes ouverts » demande à ce que le congé de paternité soit plus long que prévu, comme cela est le cas en Allemagne ou en Finlande, où les hommes peuvent rester jusqu’à huit semaines auprès de leur famille.