Election présidentielle au suffrage universel direct : l’impossible devient réalité

Photo: CTK

C’est un changement historique qui se prépare : discutée depuis la chute du régime communiste dans le pays, l’élection du président de la République au suffrage universel direct a été adoptée, mercredi, par la Chambre des députés. Si l’amendement à la loi constitutionnelle est également avalisé par le Sénat, comme cela est fort probable, les Tchèques pourront pour la première fois élire leur président en 2013.

Petr Nováček
Pourquoi tant d’années d’hésitation ? La réponse avec le commentateur de la Radio tchèque, Petr Nováček :

« Les partis de droite, et le Parti civique démocrate ODS en tête, ont affirmé, pendant de longues années, que les référendums en tous genres, y compris l’élection du président au suffrage universel direct, n’étaient pas compatibles avec une démocratie parlementaire. La position de l’ODS a commencé à évoluer lors de la dernière élection, très difficile, de Václav Klaus président de la République. Après l’élection, le parti a de nouveau changé d’avis… Comme c’est un thème qui est discuté depuis longtemps, je pense que la coalition gouvernementale a bien fait d’intégrer l’élection au suffrage universel direct à son programme. J’espère que l’amendement sera adopté et le débat enfin clos. Même si nous n’avons aucune certitude que le prochain président sera meilleur, cela ne dépend vraiment pas du mode d’élection de celui-ci. »

Photo: CTK
Proposé par la coalition gouvernementale de centre-droit, l’amendement à la loi constitutionnelle a été adopté par une large majorité, avec 159 voix pour sur un total de 200 députés. Avant le vote, un compromis avait été trouvé entre les trois partis gouvernementaux et l’opposition social-démocrate : cette dernière avait conditionné son soutien à trois modifications au texte visant à limiter les pouvoirs du président. Deux de ces conditions ont été remplies : dans le nouveau système, le chef de l’Etat bénéficiera plus de l’immunité que pendant la durée de son mandat. De même, les successeurs de Václav Havel et de Václav Klaus ne pourront plus accorder de grâces présidentielles qu’avec le consentement du chef du gouvernement ou du ministre de la Justice. L’opposition n’a toutefois pas réussi à faire modifier le système d’élection du conseil de la banque centrale, dont les membres sont nommés uniquement par le chef de l’Etat. Cela n’a toutefois pas empêché les députés sociaux-démocrates de voter en faveur du texte. Celui-ci a également de fortes chances d’être approuvé par le Sénat, où la social-démocratie est majoritaire, et donc d’entrer en vigueur.

Photo: CTK
Lorsque s’achèvera, en 2013, le second et dernier mandat de l’actuel président Václav Klaus, la République tchèque devrait alors rejoindre une vingtaine de pays européens où le chef de l’Etat est élu directement par les citoyens. Bien que 80% des Tchèques y soient favorables selon les sondages, l’introduction du nouveau système continue à soulever des questions. Nous écoutons Jan Kysela, spécialiste du droit constitutionnel, interrogé par la Télévision tchèque :

Jan Kysela
« Je suis surpris par le fait que personne n’ait encore expliqué pourquoi l’introduction du suffrage universel direct est nécessaire. L’argument selon lequel le président issu de cette élection aura une légitimité plus importante est juste, mais à quoi bon avoir une légitimité plus importante si vous ne voulez pas faire de ce président le leader de notre système constitutionnel ? Penser que le président élu par les citoyens sera indépendant du fonctionnement des partis est absolument faux, car les partis politiques auront une place privilégiée dans l’organisation et le financement des campagnes électorales. Tandis que dans le système du vote par le Parlement, il est possible de se mettre d’accord sur un président ‘impartial’, comme c’était le cas de Václav Havel par exemple. »

Alors que, jusqu’à présent, le chef de l’Etat était élu par les deux chambres réunies du Parlement pour un mandat de cinq ans, l’amendement en question prévoit un mode de scrutin à deux tours semblable à celui des élections sénatoriales, où au second tour s’opposent les deux candidats sortis en tête du premier. Les candidats pourront être proposés soit par 20 députés et 10 sénateurs, soit par un groupe d’au moins 50 000 citoyens. Parmi les candidats plébiscités par les Tchèques lors du sondage de l’agence SC&C, effectué en septembre dernier, figurent l’ancien Premier ministre Jan Fischer, l’économiste Jan Švejnar, la présidente de la Chambre des députés Miroslava Němcová, ou encore l’actuel chef de la diplomatie et président du parti TOP 09 Karel Schwarzenberg, qui, lui, a déjà confirmé sa candidature en cas d’élection présidentielle au suffrage universel direct.