Elections américaines : « Je ne suis pas optimiste au sujet d’une transition simple entre les deux présidences »
Trois jours après l’annonce des résultats de l’élection présidentielle américaine, le démocrate Joe Biden se prépare à accéder à la Maison Blanche, tandis que son opposant, le président républicain Donald Trump n’a toujours pas concédé sa défaite et bloque la mise en place d’un processus de transition. Nous nous sommes entretenus sur le sujet avec Geoff Klimko, un expatrié américain originaire de l’Illinois qui vit à Prague depuis 2005. Président de « Democrats Abroad » en Tchéquie, Geoff Klimko nous a d’abord raconté comment a-t-il vécu cette élection.
« J’ai vécu les élections à travers les réseaux sociaux et les nombreuses informations m’arrivant des Etats-Unis via des sources différentes. C’était un moment excitant à suivre. Ça s’annonçait bien avec les résultats du scrutin qui arrivaient. De mardi à samedi, j’ai regardé attentivement les informations pour connaître le vainqueur et, heureusement, Joe Biden l’a emporté. J’ai pu voter depuis Prague mais c’est une démarche qui est compliquée à faire. Je vote dans l’Illinois donc j’ai dû envoyer un bulletin de vote physiquement par la poste. Il n’est pas possible pour nous, les expatriés américains, d’en envoyer un par fax ou par email. J’ai pu envoyer le mien vers la fin du mois de septembre grâce à une enveloppe de l’ambassade américaine à Prague. Le bulletin est arrivé à mon bureau de vote dans l’Illinois et j’ai par la suite reçu un email comme quoi il avait été comptabilisé. C’est très différent de quand on habite aux Etats-Unis où on vote depuis notre juridiction. »
La communauté de démocrates est-elle importante en République tchèque, à Prague en particulier ? Il y a-t-il plus de démocrates que de républicains et qu’elles sont vos relations avec ces derniers ?
« D’une façon générale, je pense qu’on trouve plus de démocrates que de républicains à l’étranger. A partir du moment où les gens ont connu un système de couverture universelle ou autres, ils réalisent combien c’est important. On trouve une active et importante communauté de démocrates en République tchèque, à Prague particulièrement. Je suis le président de « Democrats Abroad » en Tchéquie et je n’ai pas d’interactions avec des républicains à l’étranger. Ils ne sont pas formellement organisés contrairement aux démocrates. Il existe une association pour les républicains à l’étranger, « Republicans Overseas », mais il s’agit plutôt d’un comité de financement d’actions politiques. Il ne fait pas réellement partie du Comité national républicain (Republican National Comittee ou RNC en anglais). A l’inverse, « Democrats Abroad » est officiellement rattaché au Comité national démocrate. Nous représentons dans le monde entier tous les citoyens américains démocrates qui vivent à l’étranger. »
Joe Biden vient d’être élu 46ème président des Etats-Unis d’Amérique samedi dernier. A l’occasion de son premier discours en tant que président, il a déclaré : « J’ai promis d’être un président qui ne cherche pas à diviser mais à rassembler. » Qu’attendez-vous de lui ?
« J’attends de lui qu’il gère en bon dirigeant tous les incendies laissés par l’actuel administration à partir de son investiture fin janvier. Evidemment, la première chose à faire serait de traiter la question de la gestion de la pandémie aux Etats-Unis qui a été désastreuse, pour ne pas dire la pire au monde. Il faudra commencer à défaire tout ce qu’a fait Trump, tous les dégâts infligés aux Etats-Unis et ce à sa manière, par le biais de décrets. Ensuite, Biden devra mettre en route tout ce qu’il a promis depuis son estrade. La tâche sera difficile selon moi tant que le Sénat restera dans les mains de Mitch McConnell et des républicains. Si nous parvenons à l’emporter en Géorgie, une grande occasion s’offrira aux démocrates pour faire d’énormes avancées et améliorer les choses. Je pense que le mouvement Black Lives Matter doit faire l’objet de plus de reconnaissance ainsi que d’une réponse. Des changements doivent apparaître au sein des forces de police locales à travers les Etats-Unis. Il y a tellement d’autres choses à traiter et c’est pour cela que je me réjouis de la victoire de Biden. Il sera le fer de lance de tous ces changements. Ça sera difficile, je n’aimerais pas être à sa place mais il est l’homme de la situation. »
Etes-vous optimiste pour la suite ? Trump va-t-il finalement reconnaître sa défaite ? A-t-il le droit de contester le résultat de l’élection comme il le fait actuellement ?
« Je ne suis pas particulièrement optimiste au sujet d’une transition simple et normale entre les deux présidences. Trump a déjà annoncé qu’il a l’intention de poursuivre les recours en justice. Ces contestations concernant l’élection apparaissent comme étant légalement infondées. Je ne vois pas comment une action en justice devant la Cour suprême pourrait être menée étant donné que les contestations renvoient aux tribunaux d’Etat. Si ceux-là continuent de se dresser contre Trump, ce dernier pourrait éventuellement saisir la Cour suprême en dernier recours. Je ne suis pas avocat donc je ne sais pas exactement ce qu’il pourrait en être mais jusqu’à présent, tout a été écarté. Honnêtement, je crois qu’il devrait quitter le pays avant l’investiture de Biden. A partir du moment où il a perdu l’élection présidentielle et son immunité, il y a une chance pour qu’il soit jugé et reconnu coupable de crime d’Etat à New York et qu’il finisse à la prison de Rikers Island. Rester ne fait clairement pas partie de ses meilleures options mais nous verrons bien ce qu’il en sera. »