Elections législatives 2010 : interrogations et attentes
Les élections législatives qui se sont déroulées les 28 et 29 mai et les tractations entre leurs vainqueurs au sujet de la formation de la nouvelle coalition gouvernementale, demeurent au cœur de l’intérêt des médias tchèques et des politologues.
« Oui, la République tchèque se trouvait à un tournant, elle doit faire des choix, des réformes, elle doit remettre en état ses finances, avancer dans des réformes sociales, le système des retraites, de santé, retrouver un équilibre et un nouveau dynamisme qui semblait en un en panne ces derniers temps ».
La crise économique, la lutte contre la corruption ont d’ailleurs été les thèmes qui ont prédominé la campagne électorale, tandis que des visions à long terme faisaient pratiquement défaut.
« L’Europe n’était pas au centre des débats, néanmoins tous les sujets qui ont été abordés, tous ces aspects économiques et fiscaux, problèmes de l’endettement, déficit publique, rejoignent ce que vit à l’heure actuelle l’ensemble des pays européens. Donc je pense qu’en République tchèque, comme l’adoption de l’euro n’est pas pour les quatre ans à venir, cette adoption n’était pas un sujet au cœur de la campagne, même si pour beaucoup d’économistes et d’hommes politiques responsables, derrière leurs projets économiques se trouvent bien sûr l’adoption de l’euro après 2015 ».
L’ensemble des politologues qui publient leurs commentaires dans la presse de ces derniers jours constatent en outre que ces élections ont été, en bien des points, révolutionnaires. Dans l’édition de mercredi du quotidien Lidové noviny, Tomáš Lebeda écrit :
« En dépit des préférences politiques, ces élections ont un trait positif marquant pour tous les électeurs. Ils ont compris qu’aller aux urnes vaut la peine. Les électeurs ont transformé fondamentalement la composition du plus important organe élu dans le pays en échangeant plus de la moitié des députés. Désormais, les électeurs seront conscients de leur force. On ne peut qu’espérer qu’ils ne l’oublieront pas avant la tenue des prochaines élections ».Vainqueur des élections législatives, le parti social-démocrate est pourtant considéré comme un perdant, à cause de son potentiel de coalition très faible. La victoire de la droite était-elle une surprise pour Martin Plichta ?
« C’est une surprise, un peu, parce que on ne s’attendait pas à un tel raz-de-marée. J’ai pensé qu’on terminerait au mieux à égalité, mais les tout derniers sondages donnaient la droite victorieuse et je pense que le phénomène s’est amplifié pendant la dernière semaine. C’est assez surprenant, mais en même temps cela rejoint un certain nombre d’élections qui ont eu lieu dans d’autres pays européens. Dans cette période de crise ou de sortie de crise, beaucoup d’électeurs font davantage confiance aux partis conservateurs de droite, libéraux, pour régler les questions économiques ».La Tchéquie a quand même une particularité : les jeunes Tchèques votent à droite. La mobilisation des jeunes a d’ailleurs été un des phénomènes de ces élections.
« Je pense que cette victoire de la droite est largement acquise dans les villes qui se sont massivement rendues au urnes. Justement, la social-démocratie et les partis de gauche ont largement perdu en raison de la massive abstention dans les campagnes et dans les petites villes… C’est quelque peu surprenant que les jeunes votent à droite en République tchèque, surtout vingt ans après la chute du régime communiste. Mais je pense que justement ce passé communiste jette toujours son ombre sur le pays et est largement entretenue par les médias qui continuent toujours à effrayer par un retour des anciens communistes ou des anciens ordre. La campagne des sociaux-démocrates et surtout de son leader n’était pas faite pour rassurer les gens qui ont plutôt des positions centristes ».Les deux nouvelles formations politiques TOP 09 et les Affaires publiques (VV) ont atteint un très bon résultat.
« Ce résultat est très important, il montre bien que l’ensemble des électeurs, de droite et de gauche, ont voulu sanctionner les deux grands partis. Près de la moitié des Tchèques qui ont participé aux élections ont voté pour les petites formations et surtout pour ces deux nouvelles formations, TOP 09 et les Affaires publiques (Věci veřejné) qui sont apparues sur le devant de la scène il y a à peine un an et qui ont réussi à convaincre, elles qui voulaient justement se débarrasser des dinosaures politiques et qui proposaient souvent par des formes plus attrayantes, plus originelles, une nouvelle façon de faire la politique et parfois en promettant de faire des programmes durs sans vouloir mettre en rose la situation, bien au contraire. Surtout pour le TOP 09 le fait d’avoir décrit d’une manière assez sombre et difficile les temps qui attendent la République tchèque, ont contribué à son excellent résultat ». Sur le serveur Aktualne.cz, Jiří Přibáň, juriste et politologue, note que l’équilibre entre la gauche et la droite n’a pas été totalement bouleversé en Tchéquie, comme ce fut le cas, par exemple, en Hongrie. Cet équilibre est selon lui très important, pour « qu’un parti ne puisse pas se définir comme la voix de toute la société, comme une force appelée à défendre les intérêts de toute la société. » Et de souligner que « chaque victoire monumentale impliquant une menace totalitaire, il est fort réjouissant que les voix des électeurs tchèques couvrent l’ensemble du spectre politique, de la droite à la gauche ».