Euro 2016 : les Tchèques entrent dans la danse

L'équipe tchèque, photo: ČTK

Pour la République tchèque, le championnat d’Europe de football démarrait véritablement ce lundi après-midi au Stadium de Toulouse. Et quel démarrage ! Pour son entrée dans la compétition, la Reprezentace affrontait l’Espagne, double tenante du titre. Placés dans un groupe compliqué en compagnie également de la Croatie et de la Turquie, Petr Čech, Jaroslav Plašil et leurs partenaires abordent cet Euro en France certes dans une relative discrétion mais sans complexes et certainement pas sans ambition. Avant le début du tournoi, c’est ce qu’ont expliqué à Radio Prague les deux francophones de l’équipe. Reportage à Toulouse.

L'équipe espagnole,  photo: ČTK
Proximité géographique oblige, la Ville rose était rouge et or, les couleurs de la Roja, ces dimanche et lundi. Une chose est sûre : que ce soit dans le centre de Toulouse ou dans les tribunes du Stadium, niveau ambiance, les Espagnols, dont les supporters étaient bien plus nombreux, menaient déjà 1 à 0 avant le coup d’envoi du match. Outsiders, les Tchèques le seront également sur le terrain, et pas seulement ce lundi, comme en convient Petr Čech :

« C’est vrai, nous ne comptons pas parmi les favoris. Nous sommes une équipe qui peut surprendre. Nous allons bien sûr faire le maximum pour sortir de ce groupe très difficile. L’Espagne est tout simplement un des principaux prétendants au titre. Les Croates, eux aussi, ont tout ce qu’il faut pour faire un très beau tournoi. Quant à la Turquie, nous connaissons bien puisque nous l’avons affrontée lors des éliminatoires. Nous avions fait un très bon match à Istanbul (les Tchèques s’étaient imposés 2-1, ndlr. Cf. : http://www.radio.cz/fr/rubrique/sport/foot-euro-2016-la-belle-affaire) mais nous avions perdu chez nous… Nous savons donc que c’est une équipe très dangereuse. »

Après deux victoires contre Malte (6-0) et surtout la Russie (2-1) lors du stage de préparation en Autriche, les Tchèques ont raté la répétition générale à Prague dimanche 5 juin. Battus par la Corée du Sud (1-2), les hommes du sélectionneur Pavel Vrba n’ont pas vraiment rassuré leur public avant de rejoindre la France et leur camp de base à Tours, mercredi dernier. Pour autant, Jaroslav Plašil affirme ne pas s’inquiéter plus que ça à l’heure d’affronter une Espagne elle aussi battue par la Géorgie (0-1) pour son dernier test :

Bořek Dočkal,  Daniel Pudil et Jaroslav Plašil,  photo: ČTK
« Eux aussi ont perdu. Nous allons donc les observer à la vidéo et bien nous préparer pour essayer de mettre les Espagnols en difficulté. Je ne sais pas si nous sommes les outsiders. Quant à savoir si ce statut peut être un avantage, on verra à la fin de la compétition. Pour nous tous, c’est déjà très bien de disputer ce type de compétition. Mais si nous sommes là, c’est aussi parce que nous l’avons mérité lors des éliminatoires. Maintenant, il faut aller beaucoup plus loin. L’objectif est bien de nous qualifier pour représenter au mieux notre pays. »

Malgré le retour en forme dans l’entrejeu de Tomáš Rosický, épargné par les blessures ces dernières semaines après une saison blanche à Arsenal, les Tchèques, a priori, seront plutôt amenés à défendre contre les excellents manieurs de ballon espagnols comme croates. S’ils n’ont pas l’intention de courir dans le vide pendant quatre-vingt-dix minutes, cette répartition des rôles et cette configuration de match ne déplaisent néanmoins pas forcément aux Tchèques. Jaroslav Plašil explique pourquoi :

« Avoir la possession ne veut pas dire gagner. C’est vrai que c’est toujours mieux d’avoir le ballon, mais prenez l’exemple de l’Atlético Madrid. Eux non plus n’avaient pas beaucoup de possession, mais leur bloc était bien en place et tous les joueurs se défonçaient les uns pour les autres. C’est donc ce que nous pourrions reproduire nous aussi. »

Fidèle à son habitude, Petr Čech développe un peu plus l’analyse de son coéquipier. Selon le portier tchèque, pas question de seulement défendre :

Petr Čech,  photo: ČTK
« Nous avons une équipe qui sait aussi jouer au ballon. Certes, il faudra évidemment bien défendre, mais l’utilisation du ballon sera, je pense, la clef du succès. Si ce n’est pas le cas, vous passez votre temps à courir et c’est impossible de défendre pendant quatre-vingt-dix minutes contre des équipes qui possèdent autant de talent. Nous sommes donc prêts à jouer et il le faudra si nous voulons avoir une chance de réussir. Juste défendre ne vous fera pas gagner. »

Avec la formule adoptée pour cet Euro 2016, seize des vingt-quatre équipes participant à la phase finale seront qualifiées pour les huitièmes de finale. Autrement dit, les quatre meilleurs troisièmes des six groupes poursuivront la compétition après le premier tour. Une nouvelle donne dont les Tchèques sont bien conscients, comme le confirme Petr Čech :

« Je pense que ce tournoi-là permet de rester dans le coup jusqu’au bout. Avec la formule précédente, si vous perdiez les deux premiers matchs, vous n’aviez pratiquement plus aucune chance de vous qualifier. Là, beaucoup d’équipes pourront continuer à y croire jusqu’au bout et espérer se qualifier dans certaines circonstances, même si elles n’ont par exemple que deux ou trois points. »

Depuis la partition de la Tchécoslovaquie en 1993, la République tchèque n’a jamais manqué le rendez-vous d’une phase finale d’un Euro. Mieux même, en 1996, la Reprezentace avait atteint la finale. A l’époque, les Nedvěd, Poborský, Šmicer et autres Bejbl, héros de l’aventure, étaient encore d’illustres inconnus en Europe, un peu comme le sont la grande majorité des joueurs qui composent la sélection tchèque vingt ans plus tard. Du coup, la tentation est grande de faire le parallèle ; une tentation à laquelle succombe également Petr Čech :

« Oui, je pense que la comparaison est possible, même si nous avons quand même quelques joueurs qui évoluent en Bundesliga et d’autres qui ont déjà pas mal d’expérience en équipe nationale. Maintenant, nous n’avons pas de grandes stars et notre force repose sur le fait que nous jouons en équipe. Je pense que nous sommes les plus forts lorsque nous sommes solidaires et bien préparés. »

Et Petr Čech aimerait bien s’inspirer de l’exemple de 1996 :

L'équipe tchèque,  photo: ČTK
« Après la défaite lors du premier match de groupe contre l’Allemagne, tout le monde pensait que c’était déjà fini. Mais ils avaient ensuite battu l’Italie et fait match nul contre la Russie. Ils avaient progressé au fil du tournoi et cela avait été une histoire extraordinaire. Cette année, nous sommes dans un groupe similaire, très homogène. Encore une fois, si nous nous serrons les coudes et que les circonstances nous sont favorables, tout est possible et nous pouvons vraiment espérer faire quelque chose… »

Et même quelque chose de très bien à en croire Jaroslav Plašil. Fort de ses cent sélections, le milieu de terrain bordelais, qui comme Petr Čech dispute son quatrième Euro en France, sait bien que son pays a souvent réussi dans la compétition :

« Je ne sais pas si le parallèle est possible. Mais la Tchécoslovaquie a été sacrée en 1976 et la République tchèque a fini deuxième en 1996… Il ne nous reste donc plus qu’à gagner nous aussi. Eh, pourquoi pas ? On joue au foot pour rêver et gagner des titres ! »