Eurobasket : les Tchèques en quarts de finale, grande première
Pour la première fois depuis la partition de la Tchécoslovaquie en 1993, la République tchèque fait partie des huit meilleures équipes d’une grande compétition internationale de basket. Surprenants mais nets vainqueurs de la Croatie (80-59) dimanche midi à Lille, les Tchèques se sont qualifiés pour les quarts de finale du championnat d’Europe. C’est désormais la Serbie, vice-championne du monde en titre, rien que ça, qu’ils défieront pour une place dans le dernier carré dans un match où, outsiders, ils n’auront plus grand-chose à perdre. Vivement mercredi soir !
Pour ceux qui suivent de près cette équipe tchèque depuis un peu plus d’une semaine désormais, ce n’est pas tout à fait une surprise. Pour les autres, en revanche, tous ceux qui n’ont pas eu cette opportunité et n’ont découvert le talent de Tomáš Satoranský, de Jan Veselý et de leurs partenaires que dimanche dans l’immensité du stade Pierre Mauroy, cette qualification aux dépens de la Croatie représente très certainement le résultat le plus inattendu du week-end écoulé.
Mais face à une Croatie, il faut bien le dire, décevante et à côté de la plaque du début à la fin de la rencontre, les Tchèques, mieux préparés et beaucoup plus en réussite, ont profité de l’aubaine, comme l’expliquait l’ailier David Jelínek, deuxième meilleur marqueur de la Reprezentace avec 13 points :« C’est vrai que c’est une surprise pour certains. Les Croates étaient favoris, mais nous savions aussi qu’ils n’avaient pas particulièrement bien joué au premier tour et qu’ils étaient prenables. Nous étions très bien préparés tactiquement. Mis à part un creux de quelques minutes en fin de match, lorsque nous avions jusqu’à trente points d’avance, nous avons toujours bien défendu aujourd’hui. Mais la défense est la clef à ce niveau-là et dans un tournoi comme celui-ci. Contre la Serbie aussi, il faudra d’abord penser à bien défendre si nous voulons faire un résultat et avoir une chance de nous qualifier. »
Mais avant de penser à ce quart de finale historique, les Tchèques ont, dimanche, tenu à profiter de l’instant présent, beau et si rare, et à savourer ce succès contre la Croatie qui constitue assurément une des performances les plus remarquables de ces dernières années pour le basket tchèque. Et même s’ils ne l’ont avoué qu’à demi-mot, avant de se replonger dans la préparation de leur affrontement contre l’ogre serbe et les séances vidéo rébarbatives pour décortiquer le jeu de Miloš Teodosić et Cie, David Jelínek et ses partenaires ont d’abord éclusé quelques pintes comme tout bons sportifs (tchèques) qui se respectent. Histoire de se poser quelque peu et d’apprécier le travail bien fait :
« Nous avons une bonne équipe pour plusieurs raisons. La première est que nous disposons de plusieurs joueurs d’expérience qui nous permettent de savoir gérer un match et l’approche de celui-ci. Mais nous avons aussi des joueurs plus jeunes comme bien sûr Jan Veselý et Tomáš Satoranský, qui apportent leur talent, leur fougue et leur enthousiasme. Cela donne un cocktail bien équilibré. Et puis de nombreux joueurs possèdent une expérience des matchs de coupes d’Europe avec leurs clubs, et notamment d’Euroligue. Tout cela fait que sommes désormais en mesure de nous mesurer aux meilleures équipes européennes comme la Croatie ou la Lituanie au premier tour, de rivaliser avec elles et parfois de les battre. »Capitaine et vétéran à 35 ans de cette équipe enthousiasmante depuis le début du tournoi, Jiří Welsch, passé notamment par la NBA entre 2002 et 2005, sait de quoi parle David Jelínek. En conférence de presse d’après-match, à un journaliste étranger qui lui demandait d’expliquer le parcours et les progrès de la Reprezentace, Jiří Welsch a abondé dans le sens de son partenaire en sélection :
« La première des choses, c’est le talent. La seconde est l’expérience. Vous savez, lorsque j’ai participé à mon premier championnat d’Europe en France en 1999, sur les douze joueurs qui formaient notre équipe nationale, un seul avait déjà joué dans un championnat étranger. Tous les autres provenaient de clubs tchèques. Aujourd’hui, nous avons plein de joueurs qui quittent le pays très jeunes et évoluent non seulement à l’étranger mais aussi dans les meilleurs clubs européens comme Veselý à Fenerbahce et Satoranský à Barcelone, et d’autres encore. Cela leur permet de développer leur talent car ces joueurs ont la bonne attitude. Aujourd’hui, quand ils jouent contre une équipe comme la Croatie, ils ont confiance en eux. Ils y vont pour faire leur match car ils savent qu’ils ont les moyens de faire jeu égal avec leurs adversaires. En 1999, le simple fait d’aller en France pour l’Euro suffisait à notre bonheur. Bref, talent, expérience et état d’esprit : voilà tout ce qui a changé depuis. »De tous ces ingrédients, et sans doute même un peu plus encore, la République tchèque aura besoin mercredi pour espérer un nouvel exploit contre une Serbie pour l’heure toujours invaincue et considérée par nombre d’observateurs comme la principale candidate au titre continental. Forte de sa réussite actuelle, l’équipe coachée par Ronen Ginzburg entend surfer sur la vague d’euphorie pour poursuivre sa route et rejoindre le dernier carré de cet Eurobasket. Et comme il s’y emploie depuis sa nomination à la tête de l’équipe nationale tchèque, l’entraîneur israélien cherchera d’abord à convaincre ses ouailles qu’elles sont capables de tout et notamment du meilleur :
« Depuis le premier jour que je suis à la tête de cette équipe, mon travail a consisté à leur inculquer qu’ils ont tout ce qu’il faut pour rivaliser avec les meilleurs. Le dernier match de groupe contre la Lituanie, même si nous l’avons perdu en prolongation, l’a confirmé. Avant la Croatie, je n’ai donc pas insisté sur le résultat, mais sur la qualité de leur match. Je leur ai dit d’avoir confiance en eux, de croire en leurs chances, qu’ils avaient les moyens de battre la Croatie et ils y ont cru dès la première minute. »En atteignant le stade des quarts de finale, objectif qu’ils s’étaient fixé avant le début du tournoi, les Tchèques se sont également offert le droit de continuer à rêver à une qualification pour le tournoi olympique de Rio l’année prochaine. Même en cas de défaite et d’élimination contre la Serbie, ils participeront ensuite aux matchs de classement à Lille. Qu’on se le dise donc encore une bonne fois pour toute, quelle que soit désormais la suite de cet Euro, dimanche a bien été un grand jour pour le basket tchèque.