Euthanasie : un fait divers relance le débat
Une infirmière de cinquante ans de l’hôpital de Lusace a été arrêtée vendredi dernier puis mise en examen pour meurtre suite à des accusations d’euthanasie. Elle est soupçonnée d’avoir abrégé les souffrances d’une patiente de soixante-dix ans atteinte d’un cancer. Bien que, selon certains spécialistes, ce cas ne s’apparente pas à l’euthanasie mais bien à un acte criminel, le débat sur cette pratique actuellement illégale pourrait être relancée en République tchèque.
« Il est question de l’administration de médicaments non prescrits par le médecin. Nous avons mené une enquête interne mais n’avons trouvé aucun cas qui pourrait s’apparenter à celui-ci. Sur cette question, c’est désormais à la police d’enquêter. »
L’édition de vendredi dernier du quotidien Mladá fronta Dnes, citant une source policière proche de l’enquête, affirme que cette personne, agissant « par compassion », aurait fait en sorte d’abréger les souffrances de plusieurs patients, parfois à leur demande. Ce fait divers pourrait relancer le débat sur une évolution de la législation concernant la mort assistée. Pourtant, pour Marek Vácha, de l’Institut d’éthique de la troisième Faculté de médecine de l’Université Charles, le cas de l’hôpital de Rumburk ne répondrait pas à la définition de l’euthanasie :
« Trois conditions doivent être remplies pour que nous parlions d’euthanasie. Il s’agit d’un acte réfléchi du médecin, sur une demande explicite du patient. Enfin il faut que le médecin ait l’intention de tuer. Dans le cas de cette femme, ce n’est pas de l’euthanasie, car elle n’est pas médecin et il n’y a pas eu de demande du patient. Nous sommes dans une situation où une personne pense qu’il serait mieux pour un patient de ne plus vivre et donc le tue, chose qu’il faut refuser à la fois juridiquement et éthiquement. »En République tchèque, l’Ordre des médecins autorise à ne pas pratiquer l’acharnement thérapeutique, considérant qu’il n’y a aucune obligation à poursuivre un traitement ou à mener des opérations dont on sait qu’elles sont vaines et « n’ont d’autre effet que le seul maintien artificiel de la vie d’un malade incurable ». Dans ce texte adopté en 2010, il n’est toutefois jamais fait référence à l’euthanasie, une pratique illégale et considérée comme un meurtre. L’aide au suicide est d’ailleurs également interdite.
Suite à l’affaire de Rumburk, le ministre de la Santé a toutefois évoqué la question de l’euthanasie, mais pour la repousser vigoureusement. Pour Svatopluk Němeček, « la vie est sacrée » et « l’euthanasie repousse certaines frontières fixées au sein de notre civilisation ». Le social-démocrate souhaite ainsi la mise en place d’une commission spéciale chargée d’enquêter lorsqu’il y a un doute sur les causes de la mort d’un patient.
« Nous devrions plutôt nous efforcer de soutenir véritablement la médecine qui est en mesure de diminuer les difficultés et les souffrances. Je pense que l’euthanasie est un pas dans la mauvaise direction. »Pour l’heure, l’opposition semble partager la volonté du ministre de maintenir le statu quo. En Europe, l’euthanasie est légale à ce jour en Belgique, en Suisse, aux Pays-Bas, et au Luxembourg.