Géants tchèques

Unipetrol
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Quelles sont les plus grandes entreprises tchèques en 2005 ? Telle est la question posée par un mensuel tchèque. Si les réponses rendent compte avec pertinence de l'évolution économique du pays, les méthodes d'enquête utilisent des techniques novatrices et relèvent d'une grande précision dans l'analyse statistique.

Comme le remarquait récemment le journal Praha, les entreprises tchèques les plus grandes se développent plus vite que l'économie toute entière. Alors que la croissance du pays se chiffrait à environ 5 % l'an dernier, celle des grandes sociétés voguait tranquillement à 7 %.

D'autres chiffres rapportés par le quotidien sont encore plus parlants : la centaine de grandes entreprises a engrangé, pour la même période, des bénéfices dépassant les 2 billions, soit deux mille milliards de couronnes, ce qui représente environ trois fois les revenus des budgets de l'Etat affectés aux taxes publiques et à l'assurance sociale !

Voilà ce qui ressort d'une étude menée par le mensuel tchèque BIZ sur les plus grandes entreprises tchèques d'après les méthodes du prestigieux magazine américain Fortune. Le mensuel classe ces entreprises d'après le critère du chiffre d'affaire. Il s'intéresse bien sûr aux grandes structures, comme les banques, en séparant les filiales des sociétés-mère pour choisir d'analyser ces dernières. Autre orientation de travail : chosir les firmes produisant réellement, plutôt que les entités administratives, qui faussent les données.

Exemple concret de la perspicacité de ces méthodes avec Unipetrol. Avec ses 1,3 milliards de couronnes de chiffres d'affaire, la compagnie se hisse dans le peloton des 10 plus grandes sociétés tchèques. Mais dans le même temps, elle sert de couverture à une myriade d'autres entités comme Chemopetrol ou Benzina, qui ne devraient donc pas figurer dans le classement.

Il faut savoir que de telles enquêtes ne sont pas faciles à réaliser en République tchèque. Comme le constatent les journalistes, "ici bien plus qu'à l'étranger, les entreprises ne tiennent pas à rendre publique des informations internes ou des chiffres. La mode n'est pas à la transparence !".

Mais au fait, qui est le grand vainqueur du Top-Grandes entreprises ? C'est Skoda Auto, donc le chiffre d'affaire avoisine les 160 milliards de couronnes et dont les usines comptent 24 000 employés. L'année dernière, le géant automobile a produit pas moins de 440 000 voitures. Le centre de production de Skoda se trouve à Mlada Boleslav, qui offre l'un des niveaux de vie les plus élevés du pays. Nouveau venu dans le classement : le géant Mittal Steel Ostrava, qui s'impose à la seconde place, suivi par CEZ, leader tchèque dans le marché de l'électricité.

Si l'industrie lourde domine au sein des premières places, les auteurs de l'enquête soulignent qu'il s'agit là aussi de statistiques érronées comptant parfois la même entreprise à plusieurs reprises. Il n'empêche : la permanence des secteurs traditionnels comme l'extraction de charbon, la chimie et l'énergie est un fait indéniable. Toutefois depuis quelque temps déjà, une évolution vers une représentativité plus grandes de secteurs novateurs est à noter parmi les grandes structures. Ainsi, l'électronique et l'automobile, qui, il y a encore dix ans, faisaient à peine parler d'eux, sont en passe de rétablir l'équilibre. Et puis comme le souligne le magazine BIZ, des marchés inattendus font leur entrée dans le classement des plus grandes entreprises tchèques, comme celui de la pharmaceutique, avec Phoenix, qui gère un tiers de ce marché.

Autre secteur à avoir connu une croissance fulgurante en République tchèque depuis quelques années : celui des supermarchés et autres grandes surfaces. La récente mésaventure de Carrefour, qui ferme les portes de son immense site à Andel pour être repris, au terme d'un échange de localités, par le britannique Tesco, montre l'agressivité du secteur. Les banques sont également concernées. Ainsi, CSOB affiche ses ambitions pour les années à venir : détrôner la Caisse d'Epargne (Ceska Sporitelna), et là encore, on s'en doute, l'heure n'est pas à la tendresse ! Le directeur du secteur Epargne de la CSOB, Vlasta Dolanska, témoigne en ces termes à un quotidien tchèque : "Etre seconds dans ce secteur ne nous suffit pas. C'est pourquoi nous sommes bien décidés à attaquer la position de Ceska Sporitelna et attirer à terme des millions de nouveaux clients". Pas de tendresse donc mais des consommateurs qui bénéficieront peut-être des affres de la concurrence puisque la banque compte améliorer sa gamme de services.

L'existence d'entités économiques de plus en plus grandes est-elle un signe supplémentaire de la maturité et de la performance de l'économique tchèque ? Sans doute. Elle procède d'une révolution économique rapide depuis 1989. Elle rappelle aussi, par sa radicalité, la révolution industrielle et bancaire que connaît la Bohême du XIXème siècle à la Seconde guerre mondiale.

La République tchèque devrait sans doute voir se multiplier les grandes entreprises dans les années à venir. Autant dire que le classement de BIZ est améne à s'étoffer. Il ne faudrait pas pour autant en oublier que les petites et moyennes entreprises constituent le pilier économique du pays.