Grâce à l’IA, un chercheur tchèque démontre que Shakespeare n’est pas le seul auteur d’Henry VIII
La question agite le monde de la littérature depuis plusieurs siècles et le doute persistait quant à l’identité du ou des auteurs d’une des œuvres les plus célèbres signées par William Shakespeare. Le roman Henry VIII est bien un travail commun – c’est ce qu’a récemment confirmé un chercheur tchèque grâce à une méthode scientifique et à l’intelligence artificielle.
Le drame historique a été publié en 1613. En 1850, un certain James Spedding expliquait déjà dans un article que William Shakespeare n’en était pas le seul auteur et que l’écrivain John Fletcher avait contribué à sa rédaction.
Récemment, le Tchèque Petr Plecháč a confirmé scientifiquement cette hypothèse. Spécialisé dans la linguistique et la versologie, il travaille à l’institut de littérature de l’Académie tchèque des sciences et a utilisé l’intelligence artificielle pour le démontrer.
Petr Plecháč : « Cela fonctionne de la manière suivante : on a travaillé à partir de données issues d’œuvres publiées par Shakespeare et Fletcher à la même époque que la pièce Henry VIII. Dans chacune de ses œuvres vous répertoriez les mots les plus récurrents, la rythmique des syllabes accentuées et non accentuées que vous retranscrivez numériquement de façon binaire avec des 0 et des 1. Ensuite, grâce à une méthode de comparaison automatisée utilisée dans beaucoup d’autres domaines, j’ai mis un place un modèle qui permet de différencier les deux auteurs. »Grâce à l’IA et à sa méthode algorithmique, Petr Plecháč estime que ce résultat est fiable à 98% et qu’elle a par ailleurs permis de réfuter la thèse selon laquelle un autre assistant de Shakespeare, Philip Massinger, aurait participé à la rédaction d’Henry VIII.
« D’après le modèle d’analyse, une contribution de Massinger est très peu probable, en revanche il confirme la théorie de Spedding selon lequel Fletcher a écrit environ la moitié du livre. Il est difficile pour nous de savoir comment l’IA parvient à tout analyser et de quelle manière mais dans une certaine mesure cela reprend et conforte des analyses antérieures sur les utilisations plus fréquentes de rimes féminines chez Fletcher ou bien le fait qu’il emploie beaucoup plus souvent ’em à la place de them et thee à la place de you. »Le travail de Petr Plecháč a été très remarqué dans les médias anglo-saxons et même par le prestigieux MIT Technology Review. Il a déjà reçu plusieurs prix pour ses recherches dans le passé, dont le prix Otto Wichterle et le prix du jeune chercheur des Académies du Groupe de Visegrad. Mais Petr Plecháč a le succès modeste :
« Je considère personnellement que mon travail est d’abord important pour la versologie, parce qu’il démontre qu’elle peut permettre d’identifier l’auteur d’un texte. Pour le reste, cela ne vient que confirmer le fait que Fletcher était bien le co-auteur d’Henry VIII, ce qui a déjà été supposé à maintes reprises et était déjà quasiment considéré comme un acquis. »