Inégalités salariales : « le travail féminin reste sous-évalué en Tchéquie »
La différence entre le salaire moyen d’un homme et d’une femme est de 22 % en République tchèque. Cela place le pays en avant-dernière position au sein de l’Union européenne. Plus les femmes sont qualifiées et plus elles montent dans la hiérarchie, plus cet écart salarial est élevé. Ce constat, qui n’est pas nouveau, est confirmé par la récente étude menée par le département de sociologie et de gender studies de l’Académie des Sciences.
Pour parler de cette injustice, constatée un peu partout en Europe, Radio Prague a contacté Alena Křížková, une des auteurs de cette nouvelle étude, élaborée à la demande du ministère du Travail et des Affaires sociales et qui approfondit les données de l’Office tchèque des statistiques et de différentes institutions européennes :
« Les diplômés exercent en général des professions bien rémunérées. C’est là que l’écart salarial entre les hommes et les femmes est le plus élevé. La principale cause est la ségrégation professionnelle. Cela veut dire que les hommes et les femmes sont séparés dans les différents métiers. De plus, les femmes sont peu représentées à des positions supérieures. »
L’inégalité salariale entre les hommes et les femmes en République tchèque est souvent pointé du doigt par différentes ONG, mais également par l’ONU, par exemple dans son récent bilan des droits humain dans le pays. Pour Alena Křížková, la solution à cette situation n’est toutefois pas facile :
« Le problème est que les causes et les conséquences sont étroitement liées entre elles. Ces causes sont nombreuses, à commencer par les facteurs culturels. Les femmes s’occupent souvent de la plupart des travaux non rémunérés dans la famille, ce qui a des impacts négatifs sur leur présence sur le marché du travail. Ensuite, les systèmes de rémunération en République tchèque ne sont souvent pas transparents, les employés n’ayant pas le droit de dévoiler le montant de leur rémunération à leurs collègues. Nous avons déjà mentionné les problèmes liés à la constitution du marché du travail et à la ségrégation professionnelle. Mais il existe aussi d’autres facteurs, comme par exemple l’éducation qui oriente les hommes et les femmes vers des métiers différents. La solution à cette injustice n’est donc pas simple, car il faudrait d’abord résoudre tous ces problèmes. Et après, il faudrait aussi commencer à parler de notre situation. Les syndicats ont lancé une campagne pour lutter contre le travail bon marché, il serait donc bien d’y inclure aussi la problématique des inégalités salariales entre les hommes et les femmes. »D’après Alena Křížková, cet écart n’est toutefois pas lié seulement au fait que les femmes occupent les métiers les moins bien rémunérés. Nombre d’entre elles perçoivent en effet moins d’argent que les hommes pour des postes similaires. Et comme l’évoque Alena Křížková, la situation n’évolue pas vraiment :
« La différence entre les salaires des hommes et des femmes est depuis longtemps entre 20 et 25 %. Ces inégalités existaient même sous le régime communiste, avant 1989. Cependant, à l’époque, les femmes avaient en général un niveau de qualification inférieur à celui des hommes. Ce n’est plus le cas. Aujourd’hui, les femmes tchèques sont plus diplômées que les hommes. Les raisons de cet écart sont donc différentes. Je dirais que le travail féminin reste toujours sous-évalué. De plus, la discrimination salariale, même si elle est illégale, n’est pas vraiment pénalisée en République tchèque. Jusqu’à présent, personne n’a jamais été condamné par la justice tchèque pour discrimination en raison du genre. Cela illustre bien le manque de volonté de résoudre ce problème. »
Il s’agit donc de conclusions pour le moins alarmantes, d’après la ministre du Travail et des Affaires sociales, Michaela Marksová. Aujourd’hui en République tchèque, les femmes tchèques sont deux fois plus menacées par la pauvreté que les hommes.