Ivan Hašek nouveau chef d’un football tchèque mal portant
Ivan Hašek a été élu nouveau président de la Fédération tchèque de football, samedi, à Prague. Après avoir échoué en 2005, l’ancien joueur et entraîneur de Strasbourg et de Saint-Étienne a cette fois été choisi par une large majorité. Ancien joueur international et entraîneur globe-trotter, Ivan Hašek entame donc, à 45 ans, une nouvelle carrière de fonctionnaire avec pour principal objectif de remettre de l’ordre dans un football tchèque gangrené ces dernières années par des affaires de corruption et dont l’équipe nationale et les clubs ont toujours plus de mal à bien figurer sur la scène internationale.
« Je ne pense pas que ce soit uniquement ma victoire, c’est la victoire de toute l’assemblée générale. C’est une très bonne chose pour la fédération et l’immense travail qui nous attend que mon équipe ait été élue avec autant de suffrages. Je pense que c’est une marque forte de confiance et une grande responsabilité. C’est aussi un mandat fort, c’est important, car ça va nous permettre, comme je l’espère, de mener les changements annoncés. »
Ivan Hašek succède au poste de président à Pavel Mokrý, très critiqué et souvent présenté par la presse pragoise comme un pantin manipulé par Vlastimil Košťal, un homme d’affaires à la réputation sulfureuse. Très vite, Ivan Hašek entend donc procéder à une vaste réorganisation de la fédération et de son mode de fonctionnement, et notamment du financement général du football professionnel et de ses clubs.
Mais la priorité immédiate sera de nommer un nouveau sélectionneur. Très mal embarquée dans son groupe éliminatoire, l’équipe nationale tchèque possède toutefois encore une chance de se qualifier pour la prochaine Coupe du monde en Afrique du Sud. Pour cela, la sélection, à l’image passablement ternie depuis quelque temps par les virées nocturnes mais aussi les caprices et les manières de certains de ses joueurs, devra absolument remporter ses quatre derniers matches à l’automne prochain. Une mission délicate mais pas impossible qu’Ivan Hašek entend confier à celui qui était son adjoint lorsqu’il entraînait le RC Strasbourg :« Je vais d’abord solliciter mon premier candidat. C’est pourquoi je ne veux pas citer d’autres noms pour le moment, ce serait inutile et ça ne ferait pas avancer les choses. Je vais donc faire une offre à Karel Jarolím, l’entraîneur du Slavia. J’ai d’abord besoin de savoir s’il est d’accord sur le principe. Ensuite, j’aurai également besoin de l’accord du Slavia, de savoir si le club est prêt à le laisser à la disposition de l’équipe nationale. Mais pour l’heure, je suis encore dans l’impossibilité de vous en dire plus. »
Membre de la commission exécutive à la fédération et proche d’Ivan Hašek, le président du Slavia Prague a toutefois d’ores et déjà annoncé que pour le bien du football tchèque, le club double champion en titre était disposé à mettre son entraîneur à disposition de la sélection. Une qualification pour la Coupe du monde étant presque vitale pour le football tchèque, tant sur le plan de l’image que financier, Karel Jarolím devrait donc succéder à František Straka à la tête de l’équipe nationale tout en restant sur le banc de touche du Slavia, au moins jusqu’à la fin des qualifications.
D’une manière générale, Ivan Hašek entend donc redorer le blason du sport le plus populaire dans le pays. Il y a deux ans de cela, après une saison passée à entraîner l’AS Saint-Étienne, Ivan Hašek s’était déjà exprimé au micro de Radio Prague sur quelques-uns des problèmes actuels du football tchèque, et notamment sur la difficulté des clubs tchèques à exister et être concurrentiels en coupes d’Europe et principalement en Ligue des champions :
« C'est effectivement de plus en plus difficile de monter une grande équipe en Tchéquie. Déjà, il faut pouvoir acheter les joueurs. Mais que ce soit pour le Sparta ou le Slavia, il est de plus en plus compliqué d'acheter les meilleurs joueurs des autres clubs tchèques, car ceux-ci préfèrent désormais les vendre directement à l'étranger. Les joueurs quittent le pays de plus en plus jeunes. Dans ces conditions, il est difficile de construire une équipe performante sur la durée en Ligue des champions. Quand vous voyez que le Sparta vend ses meilleurs joueurs pour moins d’un million d’euros, alors qu'ils n'ont que 21, 22 ou 23 ans... C'est quelque chose que je ne comprends pas. Pourquoi vendre si tôt et à un tel prix de jeunes joueurs qui débutent et qui peuvent devenir les meilleurs au pays dans quelques années ? C'est ça le problème du football tchèque : dès qu'un joueur est bon et qu'un club étranger propose une somme intéressante, il part. Les clubs tchèques manquent de moyens et d'argent pour concurrencer les autres clubs en Ligue des champions. »
-Existe-t-il des solutions selon vous ?
« Je pense qu'il faut s'efforcer de travailler sur le long terme. Il faudrait placer le football tchèque dans les conditions idéales pour attirer les sponsors et les entreprises qui veulent investir dans le football. C'est ce qui manque en ce moment. Il y beaucoup de gens qui ne veulent pas y mettre d'argent parce qu'ils pensent que le football est un sport corrompu, que ce n'est pas un milieu honnête, etc. Malgré ça, je pense qu'il existe des possibilités. C'est quand même le sport numéro un ici, il y a un vrai intérêt du public pour le football, et les affluences dans les stades la saison dernière le prouvent. Mais il faut travailler pour cela et pour, par exemple, obtenir des droits télés plus importants. S'il y a de l'argent, les clubs pourront garder leurs meilleurs joueurs plus longtemps et ne seront plus contraints de les vendre à l'étranger dès qu'on leur fait une proposition. C'est ainsi qu'ils pourront construire quelque chose de solide sur le long terme. »Sacré meilleur joueur tchécoslovaque en 1987 et 1988, Ivan Hašek a ensuite évolué pendant plusieurs saisons en première division française à Strasbourg avant de rejoindre le Japon et de finir sa carrière dans le club de son cœur, le Sparta Prague. Capitaine de l’équipe tchécoslovaque quart de finaliste de la Coupe du monde 1990, il a été international à 55 reprises. Sa carrière d’entraîneur l’a conduit du Sparta Prague à Strasbourg et à Saint-Étienne, en France, mais aussi au Japon, au Gabon ou encore aux Emirats Arabes Unis, pays dans lequel il a été sacré champion avec le club d’Al Ahly en mai dernier. Il entame donc un nouveau parcours de président, fonction pour laquelle son diplôme d’avocat décroché à l’Université Charles de Prague dans les années 1980 devrait sans doute lui être plus utile.