Jan Palach, agitateur de conscience
Le 16 janvier 1969, un étudiant de 20 ans, Jan Palach, s’immole en haut de la place centrale de Prague, la place Venceslas, lieu marqué par de grands événements de l’histoire tchèque. C’était il y a 39 ans. Si au sein de la société tchèque son nom peut susciter la perplexité de toutes jeunes générations, ce n’est pas le cas de ses « collègues » étudiants contemporains qui entretiennent sa mémoire, comme par exemple le Conseil des étudiants de l’Université Charles.
A l’occasion des 40 ans de la mort de Jan Palach qui sera commémorée dans un an exactement, en janvier 2009, le Conseil des étudiants, qui rassemble environ 12 membres, prépare une conférence, une exposition, un DVD et un nouvel ouvrage qui sortiront en décembre 2008. Jakub Jares est étudiant en histoire et en sciences politiques, il a 24 ans :
« Le livre sera en deux volumes. Le premier contiendra des textes d’historiens et de personnalités qui évoqueront la mémoire de Palach. Dans le deuxième volume, on trouvera des documents et des photographies jusqu’alors jamais publiées puisqu’elles ont été trouvées dans les archives de la police secrète. »
En janvier 1969, l’occupation soviétique de la Tchécoslovaquie qui a mis un coup d’arrêt aux réformes du Printemps de Prague s’enracine peu à peu. Le geste tragique de l’étudiant tchèque visait à secouer la conscience de la population, il suscite une vague de chagrin et de regain d’opposition au sein de la population. Un moment de cohésion nationale comme il y en a peu, même s’il sera de courte durée. Pour Jakub Jares, le geste de Palach va bien au-delà :« Son message, même à l’époque, n’était pas uniquement politique. Il s’adressait surtout aux gens, pour qu’ils ne restent pas indifférents. C’est quelque chose qui vaut pour aujourd’hui aussi : c’est un défi pour qu’on s’engage dans le monde où nous vivons, pour être actif. Aujourd’hui, il ne s’agit plus d’armées soviétiques, les enjeux peuvent être moins visibles. Mais c’est son message qui peut inciter à respecter l’environnement, à s’engager dans son quartier ou dans sa ville. »
On se souvient peu que Palach eut des « continuateurs », et ce même hors des frontières de Tchécoslovaquie. Un jeune Hongrois, trois jours après Palach. En 1972, un Lituanien, pour protester contre la soviétisation de son pays. En Allemagne de l’Est, en 1976, un pasteur évangélique, également pour manifester son refus du communisme.
On sait moins que Palach eut des prédécesseurs. Outre les bonzes protestant contre la guerre du Vietnam dont il s’était inspiré, comme le confirma plus tard sa mère, un Polonais, Ryszard Siwiec, s’était aussi arrosé d’essence et enflammé à Varsovie, en septembre 1968, pour protester contre la participation polonaise à l’invasion. Mais, c’est Palach qui, de Prague à Paris, et tout autour du monde, reste le symbole de la résistance le plus connu:
« Le problème avec Siwiec par exemple, c’est qu’il s’est immolé au moment où personne ne croyait que quelque chose de semblable était possible. En plus, la police polonaise a tout fait pour étouffer son geste. Mais même quand la nouvelle est arrivée dans la rédaction polonaise de Radio Europe Libre, ça leur a semblé tellement fou qu’ils ont cru à une imposture. Ils n’en ont parlé qu’en avril 1969, après l’immolation de Palach. Mais sinon, Palach est le plus connu. Nous avons fouillé dans les journaux, et pendant tout le mois de janvier et de février, on a parlé de Palach partout dans le monde. »