Jan Zrzavy

Les oeuvres surprenantes de Jan Zrzavy, grand peintre tchèque, ont toujours attiré l´attention et ne cesseront de fasciner les générations contemporaines et futures. Né en 1890, début de la dernière décennie marquée par la décadence de fin de siècle, il lancera un style de peinture tout à fait particulier et sans égal.

A l´âge de quinze ans Zrzavy commence les études au collège technique de Brno. Les études ne l´intéressent guère. Après avoir subi une grave maladie, il ne retourne plus dans l´établissement. Il désire étudier la peinture, mais il lui faut d´abord vaincre la résistance de son père qui, finalement, l´acccompagne à Prague. J. Zrzavy échoue à l´examen d´admission de l´Ecole des arts décoratifs et suit pendant une année des cours privés. Pendant les heures libres, il visite théâtres, galeries et expositions lui faisant découvrir les peintres célèbres des époques passées, tels qu´El Greco, Dürer ainsi que les impressionnistes comme V.Gogh et Gauguin. Il caresse même l´idée de devenir comédien, mais renonce à la recommandation du célèbre comédien Eduard Vojan. C´est justement en 1906 qu´il peint son premier tableau en plein-air Le château d´Okrouhlice vu du pont,, qu´il trouve médiocre. Un an après, J.Zrzavy passe finalement l´examen d´admission et commence ses études à l´Ecole des arts décoratifs.

Emerveillé par l´exposition des Impressionnistes français, organisée à Prague, il part pour Paris. La capitale de la France évoque auprès du jeune homme une sensation de liberté. Zrzavy trouve Paris extraordinaire, fascinant, expressif Pourtant, il ne reste que dix jours, car sur l´ordre de son père il est obligé de rentrer à Prague. Zrzavy garde au fond du coeur un souvenir inoubliable et se promet de revenir le plus tôt possible dans la ville des artistes. Les émotions fortes conduisent le jeune peintre à achever La vallée des larmes, pastel considéré en tant qu´oeuvre clef de sa création. La vallée des larmes reflète la profondeur des sensations de la vie intérieure de l´artiste. L´oeuvre fait penser à un paysage irréel du pays des songes. Le jeune Zrzavy continue ses études à l´Ecole des arts décoratifs mais désormais il n´apprécie pas le style d´enseignement trop académique et se fait exclure.

L´évolution créatrice de Jan Zrzavy est influencée par le peintre Bohumil Kubista. En 1912 Jan Zrzavy expose pour la première fois avec le groupe Sursum. Son tableau Le jeune homme dormant est considéré comme le meilleur de l´exposition. Sur la recommandation de Kubista, Zrzavy est admis membre du groupe de peintres-Manes. Le talent de Zrzavy éclate, prenant des dimensions extraordinaires. Dans ses premiers oeuvres, on peut déjà observer une expression précise et profonde.

Vers la fin de la Première Guerre mondiale, J.Zrzavy fait la connaissance de Zdenka Braunerova, peintre et grande figure de la vie culturelle tchèque. Cette femme d´avant-garde et très dans le vent, admire et apprécie énormement Zrzavy. Elle l´aide à organiser sa première exposition indépendante au salon Topic à Prague et le persuade de rédiger l´introduction au catalogue. Jan Zrzavy est un artiste mûr ayant parfaitement trouvé sa voie et son style.

Entre les deux guerre, l´artiste voyage beaucoup en Italie (Rome, Florence, Padoue, Venise)... En 1923, Zrzavy réalise son deuxième voyage à Paris, ville qui n´a cessé de l´attirer, pour y revenir un an plus tard. Il loue son premier atelier indépendant rue Pouchet et peint, entre autre, le portrait de l´épouse de l´ambassadeur de la Tchécoslovaquie à Paris, Pavla Osuska. Dans les années trente Zrzavy retournera à Paris pratiquement chaque année. Il choisit de partir pour Camaret sur mer en Bretagne où il loge à l´hôtel La France. La rudesse du paysage dépouillé et aride convient par sa disposition parfaitement aux desseins du peintre. Zrzavy est fasciné par la lumière éblouissante, détachant le ciel d´une clarté incroyable de la terre. Le peintre reviendra dans ce coin de la France pendant treize ans. Le premier tableau qu´il peint en Bretagne s´intitule Camaret. Zrzavy a peint en Bretagne un grand nombre de tableaux, dessins au fusain et pastels - L´église de Camaret, La place de Kermeur, Les bateaux à Camaret, Puits sur l´Ile de Bréhat, Côte rocheuse en Bretagne... Ses oeuvres dégagent la nostalgie, l´inertie et la sérenité du paysage. Paris et la Bretagne ont toujours été pour l´artiste une source d´inspiration profonde. Il essayait d´y trouver la réponse aux questions qu´il se posait sur le sens de l´existence, de la vie dont il ne cessait de vouloir dévoiler le secret.

En 1931, Zrzavy commence à coopérer avec le Théâtre National de Prague pour monter les décors dans un certain nombre d´opéras (Idomeneus de Mozart, Elektra de Strauss, Viola de Smetana...)

La situation politique précédant la Seconde guerre mondiale déçoit profondément Zrzavy. La sensation de la patrie en danger déclenche en lui le besoin d´éterniser sur ses toiles le paysage de la Bohême du Nord et du Sud.

Au lendemain du putch communiste, en 1948 les autorités tchèques interdisent à Zrzavy d´exposer. Le peintre se renferme sur lui-même et pendant une certaine période se consacre uniquement aux illustrations. Ce n´est que vers la fin des années cinquante et dans les années soixante, qu´il est de nouveau autorisé à exposer ses tableaux. Le grand peintre s´éteint le 12. octobre 1977 à Prague, à l´âge de 87 ans.

Jan Zrzavy était un artiste qui refusait de s´intégrer dans un monde prédominé par les valeurs matérielles, où la morale était partiquement inexistante et la culture, la civilisation et l´art en état de destruction. Par son oeuvre il a su exprimer les tressaillements invisibles et impalpables de l´âme humaine.