Journal intime d’un demandeur d’asile : Babi Badalov exposé à la galerie TranzitDisplay

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La galerie TranzitDisplay, à Prague, propose jusqu’au 16 janvier une exposition de l’artiste Babi Badalov. Pour évoquer son travail, Vít Havránek, un des deux fondateurs de la galerie :

« C’est un artiste azebaïdjanais d’origine. Dans certains cas, la biographie d’un artiste est importante. Dans son cas, c’est impotant : sa vie fait partie de son œuvre. Il est donc important de savoir d’où il vient, qu’il est nomade à l’heure actuelle. »

Il faut en effet dire que Babi Badalov ne pouvait pas être à Prague pour le vernissage car il attend d’obtenir l’asile politique en France. Et c’est justement cette situation qu’il décrit dans l’œuvre que vous exposez ici, à TranzitDisplay...

« Voilà, c’est l’histoire de ce qu’il montre ici. C’est d’une certaine façon son ‘journal intime’ mais en même temps, le journal public de sa vie en France, où il vit en tant que demandeur d’asile. Il faut dire qu’il a été demandeur d’asile d’abord au Royaume Uni, il a été expulsé du pays parce qu’il avait participé à une manifestation au cours de laquelle des gens ont commis des saccages. Lui-même n’a rien détruit, mais il a été arrêté par la police. Il cherche un endroit depuis des années mais pour diverses raisons il ne trouve nulle part. »

Là, cela fait deux ans qu’il attend l’asile politique en France. Ces deux années d’attente, on les retrouve dans cette exposition. Est-ce que vous pouvez nous la décrire ?

« C’est une étude un peu socio-politique parce qu’il y a à peu près 200 feuilles de format A4. D’un côté, il y a une lettre officielle, un document administratif lié avec son statut de demandeur d’asile. Ce sont des courriers, ou des ordonnances etc. De l’autre côté, c’est un collage d’images qu’il a trouvé dans les rues. Il n’a pas vraiment d’atelier, donc il doit toujours travailler entre la rue et son logement. »

C’est aussi cela qui est intéressant : cette exposition est en fait le reflet de la précarité dans laquelle il se trouve, dans le fond, mais aussi dans la forme. Par exemple, il ne peut pas exposer des œuvres plus grandes...

« Oui, c’est sa situation depuis environ dix ans. D’abord il est parti d’Azebaïdjan pour des raisons politiques, il est parti à Moscou, puis à Londres, puis à Paris. Cela fait dix ans qu’il est nomade. Il ne veut pas susciter la pitié des gens, mais c’est sa seule façon de travailler. Il ne peut pas transporter les choses. Il n’a aucune trace du passé, puisqu’il ne peut pas les transporter. Il est toujours en fuite de quelque part. »

Pourquoi avez-vous choisi de l’exposer ?

« On aime beaucoup ses dessins. Il dessine beaucoup. Il fait des journaux en dessins et on aime beaucoup ceux qu’on peut voir ici, dans une petite publication qu’on propose. Il travaille dans des cahiers qui sont faciles à transporter. On aime ses dessins qui sont un peu ornementaux mais en même temps assez politiques. Ils reflètent la réalité des minorités, des réfugiés. »

C’est une forme d’art engagé...

« C’est assez engagé politiquement mais pas au premier degré. C’est quand même toujours assez décoratif. Il montre d’ailleurs une oeuvre assez importante ces temps-ci à Paris, au Plateau. Il a pu réaliser une fresque sur un mur de 50 m2. »