Karlovy Vary, un festival à l'histoire "très particulière"

Photo: Kristýna Maková

Le festival du film de Karlovy Vary bat son plein et semble battre des records d'affluence pour cette 50e édition, au vu des files de festivaliers qui parfois désespèrent de ne pas trouver de places, faute de tickets encore disponibles. Si cette année il n'y a pas de film français en compétition, plusieurs co-productions françaises sont toutefois présentes dans celle-ci. Pour parler de la présence cinématographique française, Joël Chapron d'Unifrance, à qui Radio Prague a d'abord demandé s'il était important pour un festival de regarder en arrière, à l'occasion d'une édition-anniversaire comme celle de cette année.

Joël Chapron,  photo: Unifrance
"Oui, c’est important parce que c’est important pour la promotion du festival de montrer à quel point quelque chose peut durer sur le long terme. Mais c’est aussi important de se retourner sur son passé, de voir ce qu’on a fait. Le festival de Karlovy Vary vient d’éditer un très beau livre, un bel album qu’Eva Zaoralová a concocté avec des textes et de très belles photos sur les 50 dernières éditions, ça c’est extrêmement important. Et puis, je pense que ce festival a une histoire très particulière. Il a commencé sous la période communiste, il n’avait lieu qu’une année sur deux en alternance avec Moscou. C’était vraiment une autre époque et un autre moment. Je pense que c’est bien pour tout le monde de se remémorer aussi d’où vient ce festival aujourd’hui. C’est un festival qui comme Berlin ou Canne est un vieux festival, et c’est plutôt un compliment que je fais là. Mais avec une histoire tellement originale que ça vaut le coup de se retourner dessus."

Vous qui venez assez souvent à ce festival en particulier, qu’est-ce que vous pensez de cette 50e édition ?

Photo: Kristýna Maková
"Ce que je trouve bien, c’est qu’à la fois c’est extrêmement bien souligné d’une manière promotionnelle mais il n’y a pas non plus de raison de changer totalement la formule. Ce n’est pas sous prétexte qu’on en est au 50e ou au 40e ou au 100e même qu’il faut changer la formule. Le festival de Karlovy Vary a quelque chose de très particulier, c’est qu’il est beaucoup suivi par les jeunes qui viennent et qui envahissent les salles pour aller voir des films improbables à des horaires improbables. Et ça c’est bien que ça continue comme ça donc. C’est vraiment pour moi une opération de promotion qui est extrêmement utile. Mais je n’ai pas vu de changement particulier. C’est évident que l’on a toujours des stars qui viennent à ce festival. Il y a peut être un peu plus de fête et en tout cas un peu plus ce qu’on appelle les « goodies » qui sont en vente au magasin avec les tasses ciglées au 50e anniversaire et tant mieux. Etant donné la file d’attente, je pense que tout le monde est très content. Mais ça reste un festival avec une compétition, avec un jury, avec des sections non compétitives, avec des documentaires, des rétrospectives, et c’est ça le principal."

Alors justement pour venir aux films et notamment aux films français, combien de production et de coproduction françaises Unifrance accompagne-t-il cette année ?

'A trois,  on y va',  photo: Film Servis Karlovy Vary
"Cette année, on a en revanche, on ne peut pas gagner à tous les coups, on n’a pas de film français en compétition pour le 50e anniversaire. C’est dommage mais ça c’est la loi des festivals et le directeur du festival est libre de son choix. Ça n’empêche qu’il y a quelque chose d’important c’est qu’on a le film de Jérôme Bonnell par exemple qui est montré ici hors compétition qui s’appelle « A trois, on y va ». Ce qui moi me plaît aussi dans cette histoire avec Jérôme Bonnell c’est qu’il était ici il y a deux ou trois ans en compétition. C’est bien quand les metteurs en scène deviennent fidèles aussi à des festivals et que les festivals restent fidèles aux metteurs en scène. C’est le cas de Jérôme. J’espère que ce sera aussi le cas pour Thomas Salvador dont le premier film « Vincent n’a pas d’écaille » a été montré aujourd’hui et qu’il va sans doute en faire un deuxième et un troisième bien évidement. J’espère qu’ils reviendront. On a en tout, la France étant un gros pays de coproduction, une trentaine de films qui sont montré toute section confondue et que globalement les Français s’attribuent parce qu’on y a mis de l’argent et que le Centre National du Cinéma Français les reconnaît comme Français. Donc pour nous c’est important car ces films on les promeut au même titre que les coproductions majoritairement françaises. On a beaucoup de coproductions minoritaires. On a en compétition un film slovène et français, un film roumain et français, plusieurs films comme ça…donc la France est quand même présente même s’il n’y a pas de film en langue française ni majoritairement français. Mais globalement chaque année, on a entre vingt et trente titres qui sont présentés à ce festival. Pour nous c’est vraiment un festival important."

Quid des coproductions franco-tchèques ?

Photo: Kristýna Maková
"Les coproductions franco-tchèques, elles, sont sur la globalité assez peu nombreuses. Il y a plusieurs types de coproductions. Il y a des coproductions qui sont liées à des tournages ici en République tchèque et les tournages ont été nombreux par le passé. Ils le sont un peu moins aujourd’hui mais ces coproductions continuent d’exister. Elles sont liées intrinsèquement à un lieu de tournage dont a besoin pour différentes raisons un metteur en scène français et puis on a les coproductions qui sont plus liées à des scripts, à des scénarios dont l’action se passe véritablement en République tchèque. La majeure partie de ces coproductions là sont en revanche tournées par des metteurs en scène tchèques qui restent ici pour tourner des films on va dire majoritairement tchèques et minoritairement français. Ces deux types de coproduction cohabitent. Ce qui fait qu’on en fait quelques unes par an. Il y a des années avec et des années sans. Mais il y a, je pense, bien une vingtaine de coproduction qui ont du être faîtes depuis une quinzaine d’années d’un peu tous les types. L’important c’est que la France puisse continuer d’aider les metteurs en scène tchèques quand ils en ont besoin et qu’on ne viennent pas seulement en République tchèque pour tourner à moindre coût des films français. Qu’on y vienne pour tourner des films dont le scénario montre qu’une partie de l’histoire doit se passer à Prague c’est une chose. Si c’est pour des histoires de coût c’est moins intéressant. Mais je comprends aussi que des films à très gros budget compte tenu de la qualité des techniciens ici, compte tenu de la diversité des paysages, il y ait beaucoup de producteurs français qui soient intéressés par tourner ici et c’est évidemment bien leur droit."