La deuxième élection présidentielle : fini le suspens ?
Après la première élection, il y a une semaine, au terme de laquelle aucun des deux candidats en lice – l’actuel président Václav Klaus et le professeur d’économie tchéco-américain Jan Švejnar – n’a été élu, la partie se jouera de nouveau, dès ce vendredi à partir de 10 heures. Les sympathies du public semblent divisées presque à parts égales entre les deux principaux candidats, pendant que le clivage entre les camps politiques demeure inconciliable.
La veille de la deuxième élection présidentielle, la fièvre monte, l’atmosphère étant marquée par des accusations des partis politiques de toute sorte de pressions exercées sur les législateurs, ainsi que d’intimidations et de menaces. Le public y prête plus d’attention que jamais auparavant. Pourquoi autant d’émotions de part et d’autre? Quel est le principal enjeu de cette élection ? Je me suis entretenue à ce sujet avec Martin Plichta, correspondant du journal Le Monde à Prague :
« Le principal enjeu à mes yeux est le désir de changement, de renouvellement de la classe politique qui existe dans certains milieux. Beaucoup aimeraient tourner la page des années Klaus qui est quand même à la tête ou à des postes principaux de l’Etat tchèque depuis bientôt dix-huit ans. Donc il y a une demande, une attente d’un autre style de politique, un autre style de communication politique entre hommes politiques mais aussi des hommes politiques avec les citoyens… Ce besoin de changement est lié au fait que cet objectif semble difficile à atteindre et en même temps au fait que M. Klaus est une personne qui divise réellement la société tchèque et même très profondément on la haït ou on l’adore ou l’adule. Donc ça provoque de vraies tensions dans la société et je pense que les manifestations de ces derniers jours comme des menaces concrètes contre les députés et sénateurs qui ont voté pour M. Klaus montrent bien que la tension est à son comble. Il serait donc bien que les députés et sénateurs tranchent une fois pour toutes ce vendredi et ne fassent pas durer le suspens ».
Pensez-vous que cette élection sera plus calme et moins dramatique que la première et qu’un nouveau président sera élu ?« Je suis assez sceptique, l’élection de M. Klaus il y a cinq ans juste après le départ de Vaclav Havel à la retraite, avait exigé trois élections. Mon pronostic est qu’on aura plutôt besoin d’une troisième élection. Mais il n’est pas exclu que vu la tension extrême de ces derniers jours, les députés et sénateurs souhaitent finalement en finir ce vendredi et se libérer. Tout est ouvert, on verra comment les dernières heures des négociations et tractations diverses se poursuivront et comment les candidats répondront à un certain nombre d’attentes en particulier des députés communistes ».
Le rôle des communistes est grand, ce sont effectivement eux, finalement, qui pourront décider du vainqueur.« Dans une grande mesure, ce sont eux qui tiennent l’issue de cette élection entre les mains, mais ils pourraient encore doubler par les chrétiens-démocrates qui sont aussi divisés en deux groupes l’un soutenant Klaus, l’autre Jan Švejnar. Ils peuvent donc d’une certaine manière faire monter l’impression et les enchères, mais jusqu’à un certain point, s’ils vont trop loin, cela pourrait contribuer à faire basculer une grande majorité des chrétiens-démocrates dans le camp des pro-Klaus. «
L’élection d’un tel ou tel candidat aura-t-elle l’impact sur la politique étrangère de la RT ?
« Fondamentalement, cela ne changera pas grand-chose à la politique étrangère de la République tchèque, puisque selon la Constitution et dans les faits, c’est le gouvernement qui la fait. Mais il est vrai que le président Klaus nous a montré depuis longtemps qu’il pouvait prendre des positions divergentes avec le gouvernement, ce qui a eu un effet un peu perturbant sur l’image de cette politique à l’étranger, mais cela n’a pas un impact concret. C’est vrai que par contre au moins dans l’atmosphère, dans la manière de percevoir l’Union européenne, ou l’atmosphère de ses relations avec l’UE, l’arrivée de Jan Švejnar conduirait à une détente dans ces relations et dans cette perception et peut-être conduirait à engager et à accepter réellement la préparation pour l’adoption de l’euro ».L’élection présidentielle est, naturellement, le thème numéro un de la presse nationale. Selon beaucoup de commentaires, les tractations qui l’accompagnent ont mis en relief la nécessité d’introduire dans la Constitution du vote au suffrage direct, à la place de la situation actuelle où le vote est effectué par les deux chambres du Parlement. Martin Stránský écrit dans le quotidien Pravo, je cite :
« Lors de la première élection présidentielle, la Salle espagnole du Château de Prague ressemblait à un champ de bataille plein de boue… Tout indique, qu’il en sera de même, aussi, lors de la deuxième élection. Il est donc impératif que la prochaine élection se déroule au suffrage direct… La principale tâche des législateurs est donc dorénavant de respecter la volonté de la population et de lui permettre de choisir elle-même son président. Par ailleurs, la majorité des partis sont pour. »