La distribution automatique de vin solution au trafic de gros rouge ?

'Vinomat', photo: ČTK

Depuis quelque temps déjà, le ministère tchèque de l’Agriculture s’efforce de lutter contre les ventes illégales de vin en vrac dans le pays, notamment en provenance de l’étranger. Ce vendredi, un amendement à la loi relatif allant dans ce sens a été présenté au gouvernement. Parallèlement au politique, un distributeur automatique de vin, le premier du genre dans le pays, a été installé récemment à Ostrava (Moravie-Silésie).

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Vingt litres par habitant : les Tchèques ne sont pas et ne seront sans doute jamais d’aussi grands consommateurs de vin que les Français, les Croates ou les Italiens, mais leur consommation moyenne annuelle par habitant tend néanmoins à augmenter. S’ils ne sont pas tous de grands amateurs, les Tchèques apprécient de plus en plus le vin. Reste encore désormais à ce qu’ils l’apprécient aussi de mieux en mieux. Or, si environ 500 000 hectolitres sont illégalement importés chaque année, selon la Fédération nationale des viticulteurs (SVČR), c’est entre autres parce que de nombreux Tchèques ne sont pas des consommateurs suffisamment exigeants sur la qualité du produit qu’ils achètent. Qu’importe le flacon pourvu qu’on ait l’ivresse reste le mode de pensée qui prévaut pour beaucoup. Ainsi, en 2013, l’Inspection nationale agricole et alimentaire (SZPI) a détecté des manquements ou infractions dans près de 50% des contrôles de qualité effectués. Un véritable marché noir contre lequel l’Etat entend lutter plus efficacement.

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Lorsqu’il est importé, ce vin peut être revendu parfois en étant présenté comme produit en Moravie, principale région viticole en République tchèque, ou en Bohême. D’autres fraudeurs, eux, préfèrent sophistiquer le liquide en le coupant ou en lui ajoutant des colorants par exemple.

Vendu dans environ 30 000 endroits différents dans le pays, parfois même dans des stations-services, des superettes ou chez des fleuristes, le vin en vrac, qu’il soit produit en République tchèque ou à l’étranger, est donc essentiellement mis en cause par les autorités. Conséquence de la vente illégale de vin dans le pays, qui s’élèverait à 100 000 litres, la SVČR évalue à 2,5 milliards de couronnes (un peu plus de 90 millions d’euros) le montant annuel du manque à gagner pour les finances publiques.

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Pour lutter contre ces pratiques, le ministère de l’Agriculture entend notamment donc limiter les ventes de vin en vrac étranger, ou du moins rendre plus sévères leurs conditions. Ainsi, levin ne pourrait plus être importé que dans des emballages, par exemple des cubitainers, d’une contenance maximale de vingt-cinq litres. Parmi les autres mesures envisagées, le vin en vrac ne serait plus distribué que par les caves elles-mêmes ainsi que dans certains points de vente et des vinothèques avec lesquels un accord aura été précédemment signé, le tout sous la surveillance de la SZPI. Une nécessité notamment pour les vinothèques dont certaines réalisent jusqu’à 80% de leur chiffre d’affaires grâce au vin en vrac.

Une chose est sûre : ce n’est pas ce vin étranger qui est vendu dans le distributeur automatique qui a vu le jour à Ostrava. La machine, un prototype appelé « vinomat », a été installée dans un centre commercial de la ville par Pavlovín, une société du sud de la Moravie. Les gens peuvent donc désormais se servir eux-mêmes. Quatre vins différents sont proposés à une température constante régulée et à un prix de départ de 50 couronnes (1,85 euro) le litre. Deux autres distributeurs devraient être installés prochainement toujours à Ostrava avant un éventuel développement du concept dans d’autres endroits du pays, en cas de succès. Gérant de la société Pavlovín qui a installé le dispositif, Radim Heča en explique plus en détail le fonctionnement :

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« L’hygiène est une évidence. Une lampe UV sert à la stérilisation, tandis que le distributeur est nettoyé après chaque service. La machine, qui ne se trouve pas dans la rue mais dans un commerce, est aussi équipée de façon à contrôler l’âge des personnes qui se servent. Un lecteur de carte d’identité et de passeport permet de vérifier que les clients sont bien majeurs. »

S’il convient d’attendre un peu avant de pouvoir mesurer l’intérêt des amateurs de vin d’Ostrava pour ce système de vente, le lancement de la l’affaire n’est pas passé inaperçu. Et certains, comme le vice-président de l’Association viticole Jiří Maděřič n’ont pas hésité à partager leur enthousiasme pour la chose :

« Cette forme de commercialisation est bien meilleure et plus propre que la vente de vin dans des bouteilles en plastique par exemple chez un fleuriste. Tant que toutes les règles sont respectées, je ne vois pas de problème particulier. Si l’inspection peut contrôler tout ce qui est à l’intérieur de la machine et si toutes les informations nécessaires figurent sur le distributeur, je n’ai absolument rien contre. Au contraire, cela me semble être plutôt une bonne idée. »

L’initiative, cependant, ne plaît pas à tout le monde, essentiellement en raison de l’éventuelle installation des distributeurs à proximité d’établissements scolaires ou hospitaliers. Par ailleurs, l’idée même de vendre en libre-service une boisson alcoolisée, ne serait-ce que du vin, pose un problème de conscience à certains opposants, et ce d’autant plus si on entend lutter contre la consommation d’alcool notamment chez les jeunes.