La fin du charbon en Tchéquie ? Probablement en 2038
Pendant un an et demi, une commission créée par le gouvernement a discuté de la date à laquelle la République tchèque arrêterait d’exploiter le charbon pour en produire de l’énergie. La semaine dernière, elle a rendu son verdict : les experts recommandent une sortie progressive du charbon d’ici 2038. Une décision qui déplaît notamment aux écologistes et qui marque un retard de la Tchéquie par rapport au reste de l’Europe.
« On devrait continuer l’exploitation, tant que les réserves existent », estiment les sociétés minières tchèques et leurs salariés. La République tchèque dispose actuellement de 600 millions de tonnes de lignite et de 30 millions de tonnes de houille prêtes à l’exploitation, or la production de ce fossile baisse progressivement depuis la chute du régime communiste.
Alors qu’en 1989, les puissantes centrales thermiques tournaient encore à plein régime, dévastant l’environnement naturel notamment dans le nord-ouest de la Bohême, en l’espace de trente ans, la production de charbon a été réduite de moitié et de nombreux site miniers ont été réaménagés en lacs et zones de loisirs. La part d’énergie produite en République tchèque à partir du charbon s’élève actuellement à 50% : un chiffre encore très élevé dans le contexte européen et pointé du doigt par les écologistes qui proposent l’abandon du charbon en Tchéquie en 2030 au plus tard.
Les représentants des organisations écologistes Greenpeace et Hnutí Duha ont d’ailleurs quitté la semaine dernière la commission gouvernementale chargée de préparer la sortie du charbon, pour protester contre la date postérieure finalement choisie.
Selon Jiří Koželouh de l’organisation Hnutí Duha, « compter sur l’utilisation du charbon jusqu’en 2038 est économiquement risqué. » « Il est clair que ce scénario est voué à l’échec », estime-t-il. La production de l’énergie à base de charbon est en effet de moins en moins rentable, aussi du fait de l’augmentation du prix des quotas européens d’émission de CO2. Ce prix payé par les centrales thermiques pour une tonne de CO2 émise dans l’atmosphère pourrait grimper de 30 euros actuels à 80 euros en 2030, si la Commission européenne décide cette semaine de fixer un nouvel objectif de réduction des gaz à effet de serre pour 2030.
Selon le chercheur Alexandre Ač de l’Académie tchèque des Sciences, la date de 2038, qu’il considère lui aussi comme très tardive, ne respecte pas les obligations qui découlent de l’Accord de Paris, visant à lutter contre le changement climatique et ratifié par la République tchèque.
La Tchéquie en retard
En effet, le pays fait figure d’exception au sein de l’Union européenne : la Suède et l’Autriche ont décidé d’abandonner le charbon dès cette année, suivant l’exemple de la Belgique qui a été le premier pays européen à prendre cette décision en 2016. D’autres pays s’apprêtent à faire de même, dont le Portugal en 2021, la France en 2022 et l’Italie en 2025.
Si le gouvernement tchèque suit la recommandation de sa commission et valide, d’ici la fin de l’année, l’abandon du charbon en 2038, la République tchèque rejoindra l’Allemagne qui a opté pour cette même date. Mais selon les critiques de la stratégie tchèque, Prague, contrairement à Berlin, n’a pas de plan précis sur le déroulement du processus, qui détaillerait le calendrier de la fermeture des centrales et la manière de soutenir les régions et les entreprises concernées.
Enfin, les écologistes reprochent au gouvernement tchèque de sous-estimer les sources d’énergie « verte » produite par des ressources renouvelables. Le cabinet s’oriente en effet essentiellement vers l’énergie nucléaire. La date de 2038 devrait également être marquée par la mise en marche d’un nouveau réacteur au sein de l’une des deux centrales nucléaires existantes en République tchèque, celle de Dukovany.