La justice demande la levée de l’immunité parlementaire de Petr Nečas

Petr Nečas, photo: CTK

L’information faisait bien entendu la une de tous les journaux mardi matin. Le Premier ministre démissionnaire Petr Nečas pourrait devenir le premier chef d’un gouvernement tchèque inculpé. Lundi, en effet, le procureur d’Olomouc, qui est chargé de l’affaire de corruption qui a contraint Petr Nečas à démissionner de ses fonctions, a déposé à la Chambre des députés une demande visant à lever son immunité parlementaire afin de pouvoir engager des poursuites à son encontre.

Petr Nečas,  photo: CTK
Même si le Parquet n’a pas précisé pour quel motif il souhaitait inculper Petr Nečas, il ne fait guère de doutes que la demande adressée à la Chambre basse est à mettre en rapport avec l’affaire qui a déjà valu un placement en détention préventive à son ancienne directrice de cabinet, Jana Nagyová, et à trois anciens députés. En échange de postes lucratifs dans des entreprises contrôlées par l’Etat, ces trois derniers avaient accepté, à l’automne dernier, de renoncer à leur mandat à la Chambre basse afin de permettre l’adoption de plusieurs lois fiscales vitale pour le fonctionnement d’une coalition gouvernementale ne disposant que d’une très faible majorité. La police et la justice soupçonnent Petr Nečas et sa proche collaboratrice Jana Nagyová d’avoir été les initiateurs de cette corruption politique. S’il est reconnu coupable, celui qui pour l’heure occupe toujours les fonctions de Premier ministre risque jusqu’à six ans de prison.

Bien qu’il ait remis sa démission en tant que chef du gouvernement au président de la République, Petr Nečas a conservé son siège de député et jouit donc, en tant que tel, de l’immunité parlementaire, au moins jusqu’à la fin de son mandat en juin prochain. C’est la raison pour laquelle le procureur d’Olomouc a demandé de lever celle-ci. Selon sa présidente Miroslava Němcová, la Chambre des députés va dans un premier temps transmettre la demande en question à la commission chargée des mandats et des questions d’immunité. Celle-ci se réunira très probablement le 17 juillet prochain, et ce n’est qu’après après donné sa recommandation que les députés se prononceront éventuellement lors d’un vote. Miroslava Němcová donne plus de précisons sur le processus à suivre :

Miroslava Němcová,  photo: CTK
« Compte tenu du fait que le planning des séances est déjà établi pour le second trimestre, il faudrait le modifier afin de pouvoir convoquer une autre séance plénière à un autre moment. Mais je pense plutôt que nous examinerons la demande du procureur en septembre. La commission chargée des mandats et des questions d’immunité va elle aussi avoir besoin de temps pour débattre de ce dossier. »

Dans un communiqué publié lundi en réaction à la démarche du parquet, Petr Nečas a répété la version qu’il défend depuis l’éclatement de l’affaire, à savoir que ce qu’il appelle « des arrangements politiques courants » ne peuvent pas être considérés comme un délit. Tout en clamant son innocence, le prédécesseur du nouveau Premier ministre Jiří Rusnok n’entend donc pas se laisser faire et se soumettre dans ce qu’il considère comme « une criminalisation de décisions et de démarches politiques ».

Ce mardi, les réactions des différents représentants des partis siégeant à la Chambre basse laissaient à penser que Petr Nečas ne devrait pas être complètement abandonné à son sort, du moins pas par ses collègues de la coalition gouvernementale. Ministre lui aussi démissionnaire des Finances, Miroslav Kalousek s’est ainsi voulu solidaire :

Miroslav Kalousek,  photo: CTK
« Si le motif est le même que celui dont j’ai pu prendre connaissance lors de la remise de ma déposition en tant que témoin il y a quinze jours de cela, alors je le considère comme tout à fait absurde. Je pense que c’est précisément le type de cas de figure où la Chambre des députés doit pouvoir dire aux procureurs : ‘Messieurs, un Etat de droit démocratique n’est pas un Etat judiciaire. »

Ce n’est cependant pas la première fois que la justice réclame la levée de l’immunité parlementaire d’un député. Six demandes ont ainsi déjà été formulées depuis les dernières élections législatives en 2010 et les députés ont donné satisfaction à cinq d’entre-elles. Une inculpation de Petr Nečas, la première de l’histoire d’un Premier ministre, n’est donc pas à exclure. Et dans le cas contraire, amendement récent de la loi oblige, il pourrait être poursuivi à la fin de son mandat de député.