La Mauritanie, pays privilégié par Prague pour la coopération, notamment militaire
Le parlement tchèque a récemment validé l’envoi d’une trentaine de formateurs militaires en Mauritanie. Ce pays africain frontalier notamment du Mali fait actuellement figure d’ilot de stabilité dans une région marquée par les coups d’État et les conflits armés. Entretien avec Mohamed Diop, journaliste basé à Nouakchott pour Al-Akhbar et VOA.
La Mauritanie est désormais au centre des relations entre Prague et la sous-région. Le nouvel eurocommissaire tchèque aux Partenariats internationaux, Jozef Síkela, a également choisi la Mauritanie pour son premier déplacement à l’étranger. Comment observez-vous de Nouakchott ce vif intérêt pour le pays ?
Mohamed Diop : « Je pense que ce n’est pas surprenant, au vu du rôle diplomatique et du rôle sécuritaire de la Mauritanie. L’envoi de formateurs militaires tchèques rentre dans ce cadre. Il faut rappeler que le pays est stable depuis 2009 malgré le fait que nous sommes au Sahel, en proie au terrorisme et à la sécurité. Ce n’est pas le cas pour d’autres pays de la sous-région comme le Mali, le Niger et le Burkina Faso. »
« La Mauritanie a également joué un rôle leader dans la lutte contre le terrorisme. Le G5 Sahel n’existe presque plus - car le Mali, le Niger et le Burkina en sont partis - mais le secrétariat général du G5 Sahel était en Mauritanie, tout comme son académie militaire. L’armée mauritanienne s’est considérablement perfectionné depuis 2012 dans la lutte contre le terrorisme. Cette coopération militaire avec la Tchéquie va dans ce sens, pour plus de sécurité et plus d’engagement de la Mauritanie dans la sous-région. »
Comment la population mauritanienne voit-elle la potentielle présence militaire tchèque sur place ?
« On sait que la présence militaire française pose problème aujourd’hui au Sahel. Les populations n’en veulent plus. Parfois il y a des raisons sécuritaires – au Mali les gens pensent que la situation sécuritaire ne s’est pas améliorée malgré plus d’une décennie de présence française. L’autre raison est liée au colonialisme, avec les gens qui veulent s’affranchir du pays colonisateur qu’était la France. »
« Mais ces pays n’ont pas de problème à conclure des partenariats choisis. Je pense qu’un partenariat avec la Tchéquie ne pose pas problème. Les populations mauritaniennes n’ont pas vraiment d’informations sur les Tchèques, donc c’est un peu tôt pour en parler, mais selon moi c’est une coopération bienvenue. »
Le président mauritanien, Mohamed Ould El-Ghazaouani, assure actuellement la présidence de l’Union Africaine (UA). Cela joue-t-il un rôle dans cette importance accrue du pays au niveau régional et même continental ?
« C’est la deuxième fois que la Mauritanie, qui a joué un grand rôle ces dernières années en matière sécuritaire mais aussi diplomatique, assure la présidence tournante de l’UA, dans un cadre où les Africains veulent faire leurs propres choix dans les relations internationales. Je pense que cela fait de la Mauritanie un pays sûr en termes de diplomatie régionale. »