Sahel : « Si le Mali renoue avec la communauté internationale, Prague ne restera pas à l’écart »
Ce mardi se termine à Prague une réunion sur deux jours des Envoyés spéciaux pour le Sahel. Organisée dans un format élargi, cette réunion avait pour but d'évaluer la situation au Sahel, coordonner les positions des États membres de l’UE et consulter d’autres partenaires partageant les mêmes idées (États-Unis, Norvège, Canada) et des organisations internationales (UA, CEDEAO, ONU), selon le communiqué de la présidence tchèque du Conseil de l'UE.
« C'est le résultat de notre intérêt pour le Sahel. Nous contribuons à la stabilisation de la région du G5 Sahel dans le domaine de la coopération sécuritaire et de la lutte contre le terrorisme. Impossible de laisser la région à la merci des radicaux et de l'influence de la Russie », a lundi indiqué sur Twitter le chef de la diplomatie tchèque Jan Lipavský.
La Coalition pour le Sahel, qui regroupe plusieurs organisations, institutions et pays, était représentée à Prague par Djimé Adoum, qui a répondu aux questions de RPI :
Pourquoi la République tchèque doit-elle selon vous s’impliquer dans la région du Sahel ?
Djimé Adoum, Haut Représentant de la Coalition pour le Sahel : « La République tchèque a actuellement la présidence de l’UE. Elle a elle-même sa propre histoire, sans avoir fait partie des colonisateurs. L’implication des Tchèques au Mali, au Niger, dans le développement est très bien vue en Afrique et ils sont sincèrement intéressés, parce que si cela ne va pas bien au Sahel, cela peut avoir des conséquences en Europe. Tendre la main est une bonne chose pour l’Humanité. »
Tout le monde parle d’une situation très compliquée en ce moment au Sahel. Dans une réunion comme celle de Prague, quelle est la priorité que vous évoquez en premier lieu ?
« Prenons l’exemple du problème sécuritaire dans le Sahel. Commençons par le Burkina Faso en mettant le Mali de côté. Il y a eu récemment un coup d’Etat et il faut aider les autorités burkinabè à rester du côté de ce qu’on appelle la communauté internationale, aider le capitaine Traoré à s’en sortir pour ne pas basculer dans l’autre camp. Il faut aider le peuple du Burkina à reprendre le processus démocratique, c’est un peuple qui veut vivre en paix et en bon voisinage avec les Etats de la région. C’est important de porter notre attention sur le Burkina. »
Les images de drapeaux russes flottant à Ouagadougou sont devenues virales…
« Dans une communauté comme celle-là, il a des jeunes qui sont frustrés et désemparés qui cherchent par tous les moyens à voir s’il n’y pas quelque chose de mieux que ce qu’ils ont. C’est tout à fait normal qu’une jeunesse désemparée fasse certaines choses, mais notre devoir est de nous attaquer aux problèmes qui minent le pays : l’ordre constitutionnel, les investissements dans le développement à long terme, la création de richesse et d’emplois pour que cette jeunesse s’engage dans des activités génératrices de revenus et ne parte pas en vadrouille, parce que d’un drapeau à un autre ce n’est pas comme ça que changera leur vie. »
Vous avez évoqué le Mali, sujet central dans la problématique du Sahel. Le pays a annoncé son départ du G5 Sahel. Comment faire en sorte de régler les problèmes au niveau régional sans le Mali aujourd’hui ?
« C’est dommage, on a constaté la mise en retrait du Mali. C’est une situation temporaire – le jour viendra où le Mali reviendra, avec un ordre constitutionnel. Le G5 Sahel a été créé pour porter secours au Mali. Si on ne stabilise pas le Mali, nous aurons toujours des problèmes dans la lutte contre le terrorisme. D’autre part nous avons le puissant voisin, l’Algérie, qui doit s’investir pour qu’on maîtrise la situation. »
Comprenez-vous la démarche tchèque de fermer son ambassade à Bamako et de retirer ses soldats de l’EUTM Mali ?
« Je comprends bien cette décision dans ce contexte très difficile au Mali. Je pense qu’une telle décision pourra être revue quand la situation changera. Si le Mali renoue avec la communauté internationale, je suis sûr que les Tchèques ne resteront pas à l’écart. »
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