La République tchèque commémore les quarante-quatre ans de la mort de Jan Palach

Quarante-quatre ans déjà que Jan Palach, jeune étudiant de l’université Charles à Prague, s’est immolé sur la place Venceslas en protestation contre l’invasion de la Tchécoslovaquie par les troupes soviétiques. Le souvenir de Jan Palach est toujours très présent dans les mémoires et les Tchèques, politiques comme citoyens, ont rendu hier un nouvel hommage à l’un de leurs héros.

Jan Palach

Ce fut l’une des dernières actions pour défendre le Printemps de Prague, le dernier coup d’éclat avant la période dite de la « normalisation » ; le 16 janvier 1969, Jan Palach décidait de se sacrifier dans l’espoir de réveiller son pays occupé par les chars soviétiques. Le 16 janvier 2013, les Tchèques n’ont rien oublié. L’université Charles de Prague a ainsi ouvert hier un nouveau portail internet dédié à Jan Palach, à sa vie et à son héritage. On n’y trouve pas seulement une biographie, mais également une liste des monuments qui lui sont dédiés, des archives multimédia et des documents sur les protestations politiques par l’immolation qui ont lieu dans le monde entier. Le jeune héros n’est donc pas seulement présent dans la mémoire des plus âgés, mais suscite également l’intérêt des jeunes générations. Michal Ježek, étudiant en bohémistique à Prague, est l’un des auteurs du site janpalach.cz, il explique ses motivations à la radio tchèque.

« D’après les réactions que nous avons via notre site internet, il est évident que l’intérêt pour Jan Palach est très grand. Ce qui me fascine personnellement, par exemple, c’est qu’il était un garçon ordinaire et pourtant nous nous en souvenons aujourd’hui. Il était en même temps exceptionnel par sa manière d’être réceptif et sensible aux problèmes de la collectivité à cette époque. Jan Palach est toujours d’actualité, on se souvient de son action comme d’une tentative courageuse et politique d’attirer l’attention sur le danger de la perte de certaines valeurs essentielles pour tous, telles que la liberté d’expression, de manifestation et de penser. Ce sont des choses qui sont toujours d’actualité. »

Photo: CTK

Les citoyens n’ont bien sûr pas été les seuls à vouloir commémorer cet anniversaire. Si Jan Palach était l’un des grands tabous politique sous le communisme, il est aujourd’hui annuellement le sujet de cérémonies officielles et de discussions. Fin 2012 un groupe de députés à ainsi demandé à faire du 16 janvier le jour officiel du souvenir de Jan Palach, et pourquoi pas même, un jour férié. Une revendication intéressante selon l’historien Prokop Tomek, car l’acte de Jan Palach est quelque peu controversé et déclarer un jour férié serait rendre un point de vue officiel.

« Le souvenir de Jan Palach en tant que victime a continué à vivre, bien que le régime communiste en ait eu peur et ait tenté de l’étouffer. Ils ont détruit sa tombe à Prague en 1973. En janvier 1989 un groupe de dissidents a essayé de déposer des fleurs sur la place Venceslas avec Václav Havel et de construire un monument. Ils ont lancé ce mouvement, la ‘semaine Jan Palach’, et tout un tas de manisfestations, qui ont été un vrai signal après les vingt années passées. Mais en même temps il y a eu aussi l’année dernière Josef Mašín qui a refusé de qualifier ‘d’héroïque’ l’acte de Jan Palach. Pour lui il n’y a que le combat armé qui compte. C’est une question aujourd’hui, de savoir si l’acte de Jan Palach est accepté et reconnu par tout le monde. »

Le cinéma s’est également penché cette année sur l’histoire de Jan Palach, avec la nouvelle série en trois épisodes de la réalisatrice polonaise Agniezska Hollandová présentée le 16 janvier en République tchèque. Pour elle il n’y a aucun doute : Jan Palach était un héros.

Agniezska Hollandová|Photo: Tomáš Vodňanský, ČRo

« J’étais en Pologne quand c’est arrivé. J’ai suivi l’évènement à travers Radio Europe Libre. J’y suis allée et j’ai ressenti une émotion extraordinaire, le sentiment qu’il s’était passé quelque chose d’important pour cette nation. Ce garçon était un héros national. C’est comme ça que je l’ai senti. »

Un jour férié Jan Palach peut-être pas, mais une source d’inspiration et une journée de commémoration, certainement. En témoignent la cinquantaine de personnes de tous âges qui se sont rendus sur sa tombe au cimetière d’Olšany à Prague ainsi que les célébrations sur son lieu de naissance à Mělník.