La scène politique tchèque éclaboussée par «l’Affaire toscane»

Bien que les législatives anticipées soient encore relativement loin, la scène politique tchèque est d’ores est déjà secouée par une série de scandales qui accompagnent d'habitude les campagnes électorales. Dernièrement, une série de photos et de vidéos repris par les médias a révélé comment certains hommes politiques tchèques passaient leurs vacances, faisant ainsi rejaillir des soupçons de clientélisme.

Ce sont l’ancien Premier ministre et chef du Parti civique démocrate (ODS), Mirek Topolánek, et le vice-président de la social-démocratie, Milan Urban, qui sont les protagonistes de cette idylle vacancière qui a tourné au scandale. Des photos et documents vidéo les montrent dans le centre touristique de Monte Argentario, en Toscane, dans des situations assez délicates. Mirek Topolánek ne peut nier y avoir rencontré Martin Roman, le chef de ČEZ, la plus grande société productrice d’électricité en Tchéquie. Et Milan Urban, lui, ne peut qu´avouer avoir accepté l’invitation sur le yacht du lobbyiste influant de ČEZ Vladimir Johannes. C’est l’ancien directeur des services secrets, Karel Randák, qui a mis ces documents à la disposition de la presse, mais il nie fermement être l’auteur des photos compromettantes:

«J’ai appris que quelqu’un prenait certaines photos. J’ai repéré les auteurs de ces photos et j’ai constaté qu’il était dans mes possibilités d’avoir accès à ces documents. Et vous connaissez le reste.»

Karel Randák
La presse se lance maintenant dans des spéculations sur les relations existantes entre les hommes politiques et les chefs de grandes entreprises, et rappelle surtout que récemment le Parlement s’est montré extrêmement généreux vis-à-vis des grands producteurs d’énergie. En effet, il y a quelques semaines, les députés ont décidé de mettre gratuitement à la disposition de ces entreprises les permis d’émissions de gaz à effet de serre pour 68 milliards de couronnes, quelque 2,6 milliards d’euro. Du coup, chaque contact entre des hommes politiques et des producteurs d’énergie devient fort délicat. C’est ce qu’affirme aussi Karel Randák:

«Quand je pense qu’une chose devrait être révélée à la population et quand j’ai accès à ce genre d’informations, je ne vois aucune raison de ne pas le faire. Si les personnes qui figurent sur ces photos se rencontrent, ce qui est une évidence parce qu’elles se sont rencontrées à plusieurs reprises, ce n’est pas bien, surtout quand nous voyons ce phénomène à travers le prisme de ce qui se passe autour des entreprises publiques, semi-publiques, etc.»

Selon le politologue Jan Bureš, l’Affaire toscane risque d’avoir des conséquences plus générales:

«De telles affaires nuisent évidemment aux deux grands partis, le Parti civique démocrate et la social-démocratie, mais nuisent aussi à la crédibilité de la politique tchèque en général. Le citoyen ne peut que constater que les hommes politiques, tous ensemble, manigancent avec les directeurs des grandes entreprises, concoctent des commandes pendant leurs vacances, permettent qu’on leur paye des séjours de vacances, etc, etc. Bref, tout cela ne fait que compromettre le système politique aux yeux des citoyens.»

Est-ce déjà une bataille de la guerre électorale entre les deux plus grand partis politique tchèques ou est-ce plutôt, comme le laisse entendre le journal Mladá fronta Dnes, un règlement de comptes entre des rivaux sans scrupules à l’intérieur de ces partis? Les politologues n’excluent ni l’un ni l’autre scénario et il est maintenant à l’électeur d’en tirer les conséquences.