La vitesse maximale passera-t-elle à 150 km/h sur les autoroutes tchèques?
La Chambre des députés a approuvé, mercredi, l’amendement à la loi qui devrait permettre dans un proche avenir d’augmenter la vitesse maximale autorisée sur certaines autoroutes à 150 km/h au lieu des 130 km/h actuels. Pour qui est un conducteur prudent et a déjà pris le volant sur les autoroutes tchèques, cette nouvelle peut avoir de quoi inquiéter, car rouler en République tchèque s’apparente souvent à une course automobile sans pitié.
En tout cas, mercredi, ce sont les voix de 114 députés, tous partis confondus, qui l’ont emporté haut la main contre 34 députés, approuvant le passage à 150 km/h sur certaines portions d’autoroute et à 110 km/h pour certaines routes de première catégorie au lieu des 90 km/h actuels. Et la justification de ce changement majeur semble claire comme de l’eau de roche pour le député social-démocrate Stanislav Huml :
« A l’heure actuelle, les voitures sont équipées de tels dispositifs de sécurité que le temps est venu d’augmenter la vitesse maximale sur certaines portions d’autoroute. »L’adoption de cet amendement avait visiblement un goût de petite victoire inédit puisque, dans une atmosphère de cour d’école, les congratulations mutuelles allaient bon train, mercredi, dans la grande salle de la Chambre des députés. Pourtant, cette décision est contraire à l’avis même du ministère des Transports.
Pour ce dernier, augmenter de 20 km/h la vitesse maximale autorisée va à l’encontre des normes valables dans la plupart des pays européens, sans compter les conséquences directes : une consommation de carburant plus importante, plus d’émissions de gaz et une distance de freinage plus longue de vingt mètres. Martin Farář, du département de la sécurité routière (BESIP) du ministère, développe :
« Les autoroutes tchèques ne sont pas adaptées à une vitesse de 150 km/h : il y a des problèmes de visibilité, que ce soit en hauteur ou en largeur. Si un problème survient à une vitesse de 150 km/h, il ne restera absolument rien de la voiture accidentée. »En l’état actuel des choses, et quand bien même le ministère s’oppose à cet amendement, il précise toutefois que seules les portions d’autoroute récemment construites, telles la D1 en Moravie-Silésie ou la D3 en Bohême du Sud, seraient concernées. De même, l’amendement prévoit des restrictions de vitesse en fonction de la météo. En outre, pour l’heure, si l’amendement a été adopté par les députés, il doit encore obtenir l’aval du Sénat et être signé par le président de la République. Ce dernier a d'ailleurs fait savoir ce jeudi qu'il opposerait son veto.
C’est finalement plus l’esprit de l’amendement en tant que tel qui inquiète les spécialistes, plus que son application à proprement parler qui, pour l’heure, est loin d’être une évidence. František Lehovec, de la Faculté de construction de l’Université technique de Prague :
« Je ne pense pas que la question soit uniquement celle des autoroutes et des infrastructures. La décision de savoir quelle est la vitesse optimale et quelles sont ses conséquences n’est pas uniquement liée à la construction d’une autoroute et à son tracé. Elle est sous l’influence d’autres facteurs. La tendance actuelle, en Europe, est de limiter au mieux les conséquences de la vitesse et de réduire le nombre d’accidents et de morts sur les routes. Ces intentions vont complètement à l’encontre de ces tendances. Je pense que c’est un risque que la République tchèque ne doit pas prendre. L’ensemble des pays d’Europe, hormis l’Allemagne, a adopté 130 km/h comme vitesse maximale. Certains pays ont même 120 ou 110 km/h. L’expérience parle d’elle-même : les risques d’accident augmentent en même temps que la vitesse. »Rappelons pour mémoire que, malgré les efforts entrepris pour le réduire, la République tchèque fait partie des pays qui comptent un taux de mortalité routière parmi les plus élevés d’Europe. En 2014, 631 personnes ont ainsi perdu la vie dans un accident de la route.