L'actualité tchèque à l'ombre de l'élection présidentielle
Le duel présidentiel qui oppose Miloš Zeman et Karel Schwarzenberg fait évidemment les gros titres des journaux. Ce n’est pas une raison pour ne pas jeter un œil plus en avant dans les quotidiens tchèques qui sont notamment revenus sur l’immolation de Jan Palach survenue il y a 44 ans et se sont également interrogés sur la "valeur" de Václav Havel.
Dans le quotidien Lidové noviny, l’éditorialiste Zbyněk Petráček souligne que « Palach n’était pas un sauveur, mais un homme ayant su formuler des revendications très claires. » Et de préciser :
« Le mythe créé autour de Palach veut qu’il se soit sacrifié pour nous les autres et que son sacrifice nous ait en quelque sorte sauvé. Mais il est bon de rappeler les faits. Palach ne protestait pas contre l’occupation soviétique et les chars, ça aurait été une folie. Il a protesté contre la facilité avec laquelle la majorité des gens ont accepté cette occupation. Sa lettre de la ‘Torche numéro 1’ exprimait des revendications rationnelles et réalisables, comme l’abolition de la censure ou l’interdiction de la presse diffusée par des collaborateurs. Ni plus ni moins. »
Dans le numéro de Mladá fronta Dnes de samedi dernier, l’historien Vladimír Kučera réagit à des propos mensongers, calomnieux et vulgaires concernant Jan Palach qui circulent sur internet. Il écrit :
« Nous avons tendance à oublier Palach, ainsi que son acte et acceptons qu’il soit sali par des gens mauvais. Et il n’est pas le seul que cela concerne. Nous n’avons pas le courage de défier ces sales types... Comme si notre conscience n’était pas sufisamment éveillée. Il est bon de rappeler les mots que Palach a prononcés avant sa mort : ‘L’individu doit se battre contre le mal selon les forces dont il dispose’. »
« Quelle est la valeur de Václav Havel ? », s’interroge un article publié dans l’avant-dernière édition de l’hebdomadaire Týden qui rappelle que « le premier président postrévolutionnaire Václav Havel a créé pour la République tchèque une marque qui a ouvert au pays, sorti du marasme communiste, la porte des salons mondiaux. »
Outre le constat que le nom de l’ex-président tchèque, décédé il y a plus d’un an, jouit d’un grand prestige notamment dans les sphères de la politique et des droits de l’Homme, l’auteur de l’article observe que la marque Havel implique une importante valeur commerciale :
« L’aéroport de Prague-Ruzyně qui s’appelle désormais l’aéroport Václav Havel a fortement ressenti l’effet de cette marque. Les partenaires commerciaux accueillent ce changement positivement, comme un moyen d’augmenter la visibilité de l’aéroport à l’échelle internationale... La marque Havel n’aide pas seulement l’aéroport qui est une propriété de l’Etat, mais aussi, par exemple, la fondation caritative Vision 97, dont Havel a été le promoteur. »
L’hebdomadaire Týden mentionne également les recettes que rapportent les droits d’auteur liés à l’oeuvre littéraire et théâtrale de Havel. Une occasion de souligner que la présentation de ses pièces sur des scènes internationales a connu un grand boom après son décès.Le quotidien Mladá fronta Dnes a récemment informé qu’une partie du quai Rašín de Prague devrait bientôt porter le nom de Havel, d’après une recommandation de la municipalité de cet arrondissement qui considère que cet endroit s’y prête parfaitement. C’est effectivement là que se trouve la maison où Václav Havel a habité pendant de longues années, avec sa première femme, Olga. D’ailleurs, d’autres villes tchèques comptent également donner le nom de Havel à une rue ou à une école, si elles ne l’ont pas déjà fait.