L’Art de la Réforme tchèque
La Réforme dans les pays de la Couronne tchèque est parfois considérée comme une période pendant laquelle les muses ont été réduites au silence. C’est l’époque du mouvement hussite que l’histoire présente comme un règne d’austérité peu favorable à l’essor des arts. Néanmoins, depuis mercredi, les Pragois ont l’occasion de voir dans les Ecuries du Château de Prague une exposition qui tord le cou à cette idée reçue.
«Ce sont des objets dont certains n’ont pratiquement jamais été exposés ou n’ont pas été exposés depuis longtemps. Le travail sur cette exposition a duré trois ans. Notre idée de départ était que pendant les deux siècles de suprématie de la population non catholique en Bohême (on estime que 80 % des habitants n’étaient pas catholiques), une espèce de création artistique avait certainement existé dans le pays. Et quand vous acceptez cette idée et quand vous commencez à chercher cet art, vous finissez par le retrouver malgré le fait que très peu d’œuvres de cette période ont été conservées et chacune d’elles est donc un exemplaire unique.»
Parmi les œuvres exposées figurent, entre autres, le Codex de Göttingen, un livre théologique richement illuminé, ou la première carte géographique de la Bohême. La spécialité de cette exposition sont les images de Jan Hus (Jean Hus), réformateur de l’Eglise catholique condamné comme hérétique à être brûlé vif par le Concile de Constance en 1415. Bien que pratiquement tous les tableaux représentant Jan Hus aient été détruits à l’époque de la Contre-réforme, les visiteurs des écuries impériales au Château de Prague peuvent voir une représentation rarissime du réformateur dans le Graduel de Litoměřice du XVIe siècle. Le public sera sans doute attiré surtout par une peinture représentant le supplice de Jan Hus à Constance sur un panneau d’autel de l’église Saint-Venceslas de Roudníky, en Bohême du Nord. Cette œuvre n’a été sauvée lors du mouvement de «recatholisation» après la bataille de la Montagne blanche que grâce au fait qu’elle était recouverte d’une autre couche de peinture, couche qui n’a été enlevée qu’au XXe siècle.L’exposition «L’Art de la Réforme tchèque» sera ouverte jusqu’au 4 avril prochain.