Le cochon tchèque ne connaît pas de cochonne mais vit comme un coq en pâte

Salut à tous les tchécophiles de Radio Prague - Ahoj vám všem, milovníkům češtiny Radia Praha ! Pour cette fois, nous allons nous intéresser à un animal au cœur de l’actualité depuis déjà plusieurs mois : le cochon – prase, ou porc – vepř. Dans les faits, et vous le savez tout aussi bien que nous, ce n’est pas le cochon qui fait souvent la une des journaux, mais plutôt la maladie désignée par abus de langage comme la « grippe porcine » - prasečí chřipka, et dont l’appellation comporte donc l’adjectif relatif au porc. L’occasion pour nous d’entamer une nouvelle petite série d’émissions…

Avant de nous pencher plus en détail, mais une prochaine fois, sur l’adjectif « prasečí », intéressons-nous tout d’abord au cochon en lui-même, ou plus précisément aux expressions de la langue tchèque dans lesquelles apparaît cet animal, qui, malheureusement pour lui, possède une symbolique, une connotation négative, du moins dans notre culture européenne ou occidentale. Car on le sait, si le cochon est même considéré comme impur pour diverses raisons par certaines religions, il n’en est pas de même, au contraire, dans d’autres régions du monde, on pense là notamment à l’Extrême-Orient, où l’animal, fort d’une connotation positive, symbolise l’abondance et la prospérité. On le voit, la symbolique du porc est ambivalente, mais là n’est pas l’objet de notre sujet.

Concernant la langue tchèque, c’est une évidence, les mots « cochon » et « porc », lorsqu’ils sont employés autrement que pour désigner l’animal, ont une connotation négative. Comme en français, il peut même s’agir d’une insulte, d’une injure. Les Tchèques diront de quelqu’un que c’est un cochon – « ty jsi prase » - « tu es un cochon » ou « tu es un porc », si le quelqu’un en question est sale parce qu’il ne prend pas soin de lui, ne se lave pas ou parce qu’il a un comportement que nous qualifierons d’inconvenable en société. Par exemple s’il mange de manière vorace, malpropre. Pour le reste, pas besoin de plus d’explications ou de vous faire un dessin pour bien comprendre le sens de cette locution imagée… Précisons simplement encore que pour désigner un cochon, les Tchèques peuvent encore parler de « čuně », ou de « čuník », soit un « petit cochon », le plus généralement pour un enfant.

Une autre insulte est, elle, plus intéressante au niveau de son étude. Il s’agit de l’insulte « svině », un mot qui, stricto sensu, dans son sens premier, commun, désigne une truie, soit la femelle adulte du cochon. Mais l’insulte, plus forte que « prase », ne désigne pas un « cochon », soit une personne dégoûtante voire insalubre, mais bien quelqu’un de « pourri », compromis moralement, au moral ou à la morale malpropre. Bref, en tchèque, une « truie » - « svině », qu’il s’agisse d’un homme ou d’une femme, désigne quelqu’un de perfide, déloyal, hypocrite, sournois, traite. En un mot, quelqu’un de mauvais.

En revanche, il est amusant de constater que si les Tchèques parlent de « truie » ou de « cochon », ils ne connaissent pas le nom et l’adjectif « cochonne » pour qualifier par exemple une histoire licencieuse, un peu salace, gauloise. De même, les Tchèques ne savent pas ce qu’est un « film cochon » pas plus qu’ils ne connaissent de « cochonne », mot de l’argot français qui désigne une fille facile, qui aime certaines cochonneries. Pour autant, il existe quand même dans ce domaine précis un « cochon », les Tchèques parlent alors de « prasák », un mot vulgaire qui désigne un homme qui, pour dire les choses simplement, apprécie, entre autres, celles que les Français présentent comme des cochonnes.

Bien entendu, il existe bien d’autres expressions dans la langue tchèque dans lesquelles on retrouve le mot « cochon ». Un Tchèque peut ainsi « être gros comme un cochon » - « tlustý jako prase », « soûl comme un cochon » - « opilý jako prase », et bien sûr « sale comme un cochon » - « špinavý jako prase », comme nous l’avons expliqué précédemment.

Mais une des expressions les plus répandues et aussi parmi les plus belles et imagées est sans aucune doute celle selon laquelle, traduite littéralement, « on se porte, on vit comme un cochon dans le seigle » - « mít se, žít si jako prase v žitě ». Une expression qui signifie que l’on mène, vit une existence confortable, que l’on a tous ses aises, et notamment à table, ce qui, entre parenthèses, ne signifie pas pour autant qu’il faille s’empiffrer ou se goinfrer et finalement « manger comme un cochon ». En fait, l’équivalent français du « cochon dans le seigle » est le très connu « coq en pâte », puisque, en France, on parle « d’être ou de vivre comme un coq en pâte ».

C’est donc avec cette magnifique expression que s’achève pour cette fois ce « Tchèque du bout de la langue ». Avant de nous quitter, précisons encore, pour l’avoir déjà entendu et parce qu’il s’agit d’un détail amusant, que même un chien, animal que les Tchèques apprécient tout particulièrement à en juger par leur grand nombre, peut être un cochon, par exemple lorsqu’il se roule dans une flaque d’eau ou de boue. Mais nous reviendrons sur le sujet, l’animal et l’adjectif « porcin » - prasečí, désormais célèbre dans le monde entier dans une prochaine émission. D’ici-là, portez-vous du mieux possible – mějte se co nejlíp !, portez le soleil en vous – slunce v duši, salut et à bientôt – zatím ahoj !