Le débat européen est partout insuffisant
Le Traité de Lisbonne est le principal thème d’un entretien que nous avons réalisé cette semaine à Prague avec M. Hubert Haenel, sénateur et président de la Commission pour les affaires européennes.
«Ce qui me frappe le plus, ce sont les hésitations. Cela fait des mois que l’on nous annonce, c’est pour demain, c’est pour après-demain et maintenant on dit c’est pour peut-être avant le 1er juillet, à la fin de la présidence tchèque… Tout le monde a le regard tourné plus vers la Tchéquie peut-être que vers l’Irlande, parce que si vous ratifiez, alors le Traité est quasiment ratifié. C’est mon point de vue personnel. Mais ce n’est plus une question entre les Français et les Tchèques, entre les autorités françaises et les autorités tchèques. Le Traité de Lisbonne est voulu et attendu par vingt-sept pays qui l’ont ratifié jusqu’à présent. Ils sont très importants pour vous, ce sont vos alliés. Ces alliés se poseront des questions concernant le positionnement de votre pays ».
Vous avez dit dans une de vos interventions que vous attendiez la ratification du Traité de Lisbonne avant la fin de cette année. Gardez-vous toujours votre optimisme ?
« Si la République tchèque ratifie dans les meilleurs délais, au plus tard à la présidence suédoise, en ce moment, les Irlandais sont mûrs, sont prêts pour un nouveau référendum, compte tenu de la conjoncture économique et financière, donc cela veut dire que l’on pourrait avoir la ratification pour la fin de l’année. Je vous assure qu’on en a bien besoin. On en avait besoin déjà avant la crise et maintenant on en a encore plus besoin avec la crise. Et quand on parle de l’Europe, il faudrait se poser la question – et si l’Europe n’existait pas. Dans le contexte de notre crise financière, économique et sociale, qu’est-ce qui se passerait. Je peux vous dire que les dégâts seraient d’une autre nature et d’une autre ampleur de ce que nous vivons actuellement. «
Le débat européen est-il suffisant ?
« Non, partout, il est insuffisant. On l’a bien vu au moment du référendum sur le Traité constitutionnel. Les Français ont découvert l’élargissement, on ne leur a pas expliqué que l’élargissement notamment l’élargissement vers votre pays, c’était la réunification de l’Europe, que cette Europe se retrouvait et que ce n’était pas un élargissement vers des gens étrangers. Quand j’ai expliqué ça dans les réunions que je faisais, ils me disaient, mais pourquoi on ne nous a pas expliqué ça. On n’explique pas assez l’Europe en permanence, on essaie d’expliquer l’Europe, mais il est trop tard, à la veille des chances que nous aurons comme le référendum ou comme les élections européennes que nous aurons dans quelque temps. Et compte tenu de la conjoncture, il est à craindre la montée en puissance des souverainistes, des nationalistes, des protectionnistes… Les menaces de l’Europe sont surtout internes. Il faut que les Européens comprennent l’intérêt qu’il y a à construire, une Europe plus intégrée, une Europe qui pèse à la fois financièrement, économiquement et politiquement dans le monde ».