Le retour aux affaires de Donald Trump aux États-Unis diversement apprécié en Tchéquie

Donald Trump

Les réactions n’ont pas tardé non plus à Prague, ce mercredi, suite à la victoire de Donald Trump, élu 47e président des États-Unis. Des félicitations de circonstance du Premier ministre Petr Fiala ou prudentes du président Petr Pavel à celles franchement enjoués d’Andrej Babiš, pour qui il s’agit d’« un come-back sensationnel », les optiques sur les conséquences à venir du retour aux affaires du candidat républicain divergent nettement cependant.

« Félicitations à Donald Trump pour sa victoire à l’élection présidentielle. Notre objectif commun est de faire en sorte que les relations entre nos pays restent au plus haut niveau, malgré les changements d’administration, et de continuer à les développer dans l’intérêt de nos citoyens. »

Avant même l’annonce officielle du résultat de l’élection, Petr Fiala, en visite en Serbie ce mercredi, a été l’un des premiers, peu après 9h00, sur X, à réagir, sur un ton très sobre et neutre, au retour, quatre ans après, de Donald Trump à la Maison Blanche.

Pour autant, le Premier ministre a été moins prompt que son prédécesseur et leader de l’opposition Andrej Babiš. Comme Viktor Orban en Hongrie ou Robert Fico en Slovaquie, le chef du mouvement populiste ANO n’a pas caché sa joie devant un triomphe électoral qu’il a qualifié de « come-back sensationnel de Donald Trump ! ».

« Ni un attentat, ni des poursuites judiciaires motivées par des considérations politiques, ni une campagne de dénigrement systématique dans les médias n’ont permis de l’arrêter. Les Américains ont clairement exprimé qui il voulait comme président des États-Unis. Je suis convaincu que sa victoire apportera la prospérité aux États-Unis et la paix dans le monde », s’est félicité sur un ton autrement plus enthousiaste Andrej Babiš, grand favori pour l’heure des élections législatives qui se tiendront dans onze mois en Tchéquie.

Un ton qui était également celui du leader du parti d’extrême droite SPD, Tomio Okamura, qui voit dans le succès de Donald Trump « une bonne nouvelle pleine d’espoir pour la Tchéquie et pour le monde ».

Jan Lipavský | Photo: Zuzana Jarolímková,  iROZHLAS.cz

Nettement plus réservée, en revanche, a été la réaction du chef de la diplomatie. Interrogé par la Télévision tchèque, Jan Lipavský a déclaré qu’il fallait désormais s’attendre à ce que le futur nouveau président américain pousse l’Europe à s’occuper davantage de sa défense, notamment en lui consacrant davantage de moyens financiers que jusqu’à présent. « Une demande forte », alors que, toujours selon lui, « la géopolitique américaine va se concentrer davantage sur l’Indo-Pacifique et la Chine ». Et bien que la Tchéquie, conformément à ce que requiert sa qualité de pays membre de l’OTAN, consacrera 2 % de son PIB à la défense à compter de l’année prochaine, cela ne signifie pas que cela suffira.

Surtout, et même si Volodymyr Zelensky, ce mercredi matin, a exprimé l’espoir que sous la direction de Trump, « les États-Unis maintiendraient leur vigoureux soutien à l’Ukraine », évoquant même sa « merveilleuse rencontre » avec ce dernier en septembre au cours de laquelle les deux hommes ont évoqué les moyens de mettre fin à l’agression russe, comme à Kyiv, le résultat de Donald Trump suscite, aux yeux de Jan Lipavský, un certain nombre d’inquiétudes quant à la suite du soutien à l’Ukraine :

« Donald Trump a des mots forts selon lesquels il réglera la guerre en vingt-quatre heures. Je ne vous cache pas mon scepticisme. J’ai du mal à imaginer qu’il puisse en être ainsi, car il n’a pas expliqué comment il comptait s’y prendre. Je voudrais mettre en garde contre tout scénario semblable à ce qui est arrivé à la Tchécoslovaquie en 1938 suite aux accords de Munich. Il ne faudrait pas que les puissances dictent à l’Ukraine de céder son territoire. Tout scénario de fin de guerre doit respecter les principes de la Charte des Nations Unies et l’intégrité territoriale de l’Ukraine. L’Ukraine est un État indépendant, les Ukrainiens sont un peuple qui dispose du droit de disposer de lui-même et le président Zelensky représente la direction légitime de ce pays. La condition première est donc que l’Ukraine consente à la solution qui pourrait être proposée. Tout autre scénario ne serait pas synonyme de paix, mais seulement d’interruption des combats en cours alors que nous voyons que la Russie continue à s’armer et à menacer l’Europe. »

Petr Pavel | Photo: René Volfík,  iROZHLAS.cz

Enfin, un peu plus tard dans la journée, le président tchèque s’est montré moins catégorique dans son appréciation de la nouvelle situation sur l'échiquier mondial. Tout en rappelant qu’il convenait d’abord de « respecter le choix des électeurs américains » et de « travailler avec » pour que les relations entre l’Europe et les États-Unis restent bonnes, Petr Pavel a estimé que, indépendamment des déclarations faites par les différents candidats durant la campagne électorale, il fallait éviter de tirer des conclusions trop hâtives de l’issue du scrutin :

« Je ne sais pas quelle sera la politique concrète du nouveau président des États-Unis et de son administration vis-à-vis de l’Ukraine, du Proche-Orient, de l’Europe et de l’OTAN. Il convient donc d’attendre un peu, mais je suis prêt à faire en sorte, avec toutes les parties intéressées, que les relations restent les meilleures possible. Pour nos démocraties, notre adversaire se trouve ailleurs que de l’autre côté de l’Atlantique. Coopérer est donc dans notre intérêt commun. »