Le Slavia Prague, lourdement endetté, dans la tourmente

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Le célèbre club pragois de football du Slavia, vainqueur du championnat tchèque en 2008 et 2009, traverse une des périodes les plus sombres de son histoire longue de près de 120 ans. Confronté à de graves problèmes financiers, le club pourrait perdre son statut professionnel et être relégué en troisième division la saison prochaine. En colère face à cette situation, plusieurs centaines de supporters ont envahi la pelouse, jeudi soir, à la mi-temps de la demi-finale de la Coupe de République tchèque contre le Sigma Olomouc, entraînant ainsi l’arrêt prématuré du match.

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La Fédération tchèque de football (ČMFS), présidée par Ivan Hašek, l’ancien entraîneur de Strasbourg et de Saint-Étienne, a statué, jeudi, sur la réattribution ou non de la licence permettant aux clubs tchèques d’évoluer au sein des deux premières divisions professionnelles, Or, pour le Slavia, les problèmes financiers s’accumulent depuis de longs mois. Les joueurs n’ont pas été payés depuis le début de l’année, tout comme les autres salariées du club. La première priorité est donc d’abord de rembourser cette dette qui s’élève à environ 10 millions de couronnes (près de 410 000 euros) : une conditions sine qua non à la réattribution de cette fameuse licence, comme l’a expliqué Bohuslav Pavlík, président de la commission en charge de l’attribution des licences professionnelles à la ČMFS :

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« Les documents permettant d’évaluer la structure de propriété de la société anonyme qu’est le club et ses engagements vis-à-vis des employés et des joueurs, à savoir combien il leur doit, ne nous ont pas été présentés. Nous avions également besoin d’informations supplémentaires relatives à l’avenir financier du club. Nous n’avons rien reçu de tout cela, et c’est la raison pour laquelle nous avons décidé de ne pas lui attribuer de licence. »

En d’autres termes, la ČMFS a jugé que le club n’avait pas actuellement une structure financière suffisante pour évoluer à nouveau dans l’élite la saison prochaine. Outre le fait de ne pas avoir assumé leurs engagements vis-à-vis de la fédération, des joueurs et du personnel, les dirigeants du Slavia ont également fait preuve d’un manque de transparence, communiquant trop peu et par trop maladroitement sur la structure du capital du club et les réels moyens dont il dispose actuellement pour sortir la tête de l’eau.

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La nouvelle est tombée relativement tard dans la soirée de jeudi, après que le Slavia, devant son public, ait affronté Olomouc, le temps d’une mi-temps, en match aller des demi-finales de la Coupe de République tchèque. Le match a été interrompu à la mi-temps suite à l’envahissement du terrain par les ultras alors que les deux équipes avaient rejoint les vestiaires à l’issue des 45 premières minutes sur le score de 1-1.

Les supporters du Slavia avaient décidé d’exprimer leur mécontentement, jugeant les dirigeants responsables de l’incapacité du club à éponger ses dettes et à trouver un repreneur. Les éléments les plus radicaux sont ainsi parvenus à infiltrer le secteur VIP du stade avec l’intention de lyncher les administrateurs du club et de saccager les installations, contraignant la police anti-émeute à intervenir. Il ne s’agit sans doute pas de la meilleure façon d’aider le club, puisque la ČMFS devrait accorder le gain du match à Olomouc sur le score de 3-0. Par conséquent, les chances du Slavia de se qualifier pour la finale lors du match retour en Moravie et éventuellement de décrocher un billet pour une coupe d’Europe en cas de victoire finale dans l’épreuve sont désormais fortement compromises. Ce comportement des supporters a été vivement critiqué par le directeur général du Slavia, Miroslav Platil, pourtant descendu sur la pelouse pour tenter d’expliquer aux fans l’évolution de la situation financière du club :

Miroslav Platil et Lubor Svoboda,  directeur de la société d’investissement Natland,  photo: CTK
« Nous avions encore la possibilité de nous qualifier pour la coupe d’Europe et c’est une opportunité dont nous nous sommes privés nous-mêmes. Mais surtout nous avons gâché le travail des joueurs. Ce qui s’est passé est aussi très grave pour la réputation du club. Et je n’oublie pas les dégâts matériels dans le stade… Tout cela a été causé par des individus qui se disent supporters. Je ne comprends pas, c’est le moins que je puisse dire. »

Malgré tout, il reste encore une chance pour le Slavia de s’en sortir puisque la commission en charge de l’attribution des licences se réunira à nouveau avant la fin du mois. Elle pourrait dès lors revoir sa décision si le Slavia revoit son dossier. Les espoirs se tournent désormais vers la société d’investissement Natland, qui pourrait injecter de l’argent dans le club et ainsi éponger ses dettes.

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Mais même si tel était le cas, un autre défi financier de taille attendra le Slavia. La société britannique ENIC, ancien actionnaire principal du club, lui réclame encore en effet plus de 100 millions de couronnes (plus de 4 millions d’euros). Le Slavia a jusqu’à l’automne pour honorer ses engagements. Les supporters de l’un des clubs les plus prestigieux du pays ont donc encore bien du souci à se faire.