Le social-démocrate Michal Hašek rattrapé par l’affaire de la « fausse porte-parole »

Michal Hašek, photo: ČTK

Depuis l’affaire dite du « nid de cigognes », mettant en cause le ministre des Finances Andrej Babiš, aucun scandale politique n’était réellement parvenu à égayer l’actualité. C’est désormais chose révolue avec l’affaire qui touche Michal Hašek, le président social-démocrate de la région de Moravie du Sud, accusé d’avoir utilisé les services d’une lobbyiste cachant son identité sous les traits d’une fausse porte-parole. Une histoire quelque peu rocambolesque, à quelques semaines des élections régionales, que l’intéressé dément vigoureusement : "d'autres mentent, moi en aucun cas".

Jana Mrencová,  photo: stream.cz / Seznam.cz
Lucie Proutníková, tel est le nom de cette porte-parole qui pendant plusieurs années a communiqué auprès des médias sur l’actualité de Michal Hašek, l’un des hommes forts du parti social-démocrate, à la tête de la région de Moravie du Sud depuis bientôt huit ans. Seulement voilà, dans un article du journal Mladá fronta Dnes, on apprenait au mois de juillet que cette Lucie Proutníková n’a jamais existé.

Selon le quotidien, c’est en fait Jana Mrencová, une femme présentée comme une ‘lobbyiste’ par les médias, c’est-à-dire une personnalité douteuse évoluant entre différentes sphères du pouvoir, qui se cachait sous cette fausse identité. Jana Mrencová, qui aurait exercé ses talents en communication auprès de dirigeants de plusieurs partis, de la social-démocratie, au parti communiste en passant par le parti civique-démocrate ODS, a été condamnée à deux ans de prison avec sursis en avril dernier pour avoir voulu influencer des journalistes contre des pots-de-vin, un verdict contre lequel son avocat a fait appel.

Michal Hašek a tout d’abord écarté l’affaire d’un revers de main en indiquant ne pas connaître la fausse porte-parole Lucie Proutníková, mais en reconnaissant avoir déjà côtoyé Jana Mrencová. Il a en revanche attendu son retour de vacances pour réagir plus longuement. En conférence de presse lundi, le social-démocrate a estimé qu’il s’agissait tout bonnement d’une affaire construite par ses opposants politiques en vue de la campagne électorale des régionales, pour laquelle il compte bien conduire de nouveau la liste de son parti :

Michal Hašek,  photo: ČTK
« Je comprends que le programme électoral pour les régionales conçu autour de l’idée que ‘nous haïssons’ Hašek’ doit être le cache-misère du mouvement ANO, du mouvement ‘Vivre à Brno’ et peut-être d’autres partis, qui n’ont rien à offrir, qui n’ont pas de bons candidats, qui n’ont pas de bons programmes électoraux. Certains sont même prêts à proposer l’accueil des réfugiés dans la région de Brno, en Moravie du Sud, à proposer un comportement déplacé de repentir, etc. Voilà qui ne fonctionnerait pas auprès des électeurs et ils adoptent donc la posture ‘anti-Hašek’. »

M. Hašek voit la signature d’Andrej Babiš derrière le début du scandale. Le ministre des Finances, également leader du mouvement ANO, est en effet le propriétaire du journal Mladá fronta Dnes. Après l’affaire du « nid de cigognes », puis la réorganisation de la police, il s’agirait ainsi seulement d’une nouvelle passe d’armes dans la lutte pour l’hégémonie politique entre ANO et la social-démocratie.

Pour ce qui est de Jana Mrencová, le président de Moravie du Sud reconnaît que sa région a passé des contrats avec deux agences gravitant autour de la « lobbyiste », des services pour lesquels elle aurait dépensé 3,75 millions de couronnes, environ 140 000 euros, entre 2010 et 2013.

Son ancienne porte-parole, bien réelle quant à elle, Denisa Kapitančiková affirme pour sa part que Jana Mrencová avait le contrôle sur tout le service de presse de la région, et qu’elle aurait même reçu plusieurs centaines de milliers de couronnes pour des tâches en fait réalisées par l’administration de la région ; des mensonges selon Michal Hašek. Ce qui est clair en tout cas pour le politologue Stanislav Balík, c’est qu’il reste beaucoup de zones d’ombre dans cette histoire :

Stanislav Balík,  photo: ČT24
« Ce n’est clairement pas une affaire qui aurait été inventée de toute pièce. Il y a là quelque chose qui cloche. Si tout était normal, il y aurait un contrat avec les agences concernées où il serait clairement indiqué quelles sont leurs tâches et celles de la porte-parole existante-inexistante. Le fait que nous n’avons pas vu de contrat de ce type, montre qu’il y a là quelque chose de caché, mais nous ne savons pas quoi. Une autre chose étrange, c’est que les organismes de contrôle de la région n’ont pas été interpelés par le fait que la région paye pour un nom qui n’existe pas. »

Peut-être Michal Hašek dit-il vrai quand il affirme que "d'autres mentent, moi en aucun cas". Cela n’a cependant pas toujours été vrai. A l’automne 2013, il avait nié publiquement à onze reprises avoir participé à une réunion secrète à la résidence présidentielle de Lány, une rencontre qui visait à renverser l’équipe dirigeante du parti social-démocrate à laquelle il avait pourtant effectivement pris part.