Le sommet de Bratislava valide la stratégie du groupe de Visegrád
Réunis à Bratislava vendredi 16 septembre pour la première fois depuis le Brexit, les dirigeants européens, sans les Britanniques, se sont mis d’accord sur une feuille de route pour relancer l’Union européenne. Des propositions, presque exclusivement sur la thématique sécuritaire face à la crise des réfugiés, qui vont en grande partie dans le sens des positions défendues par la République tchèque et par ses partenaires du groupe de Visegrád (V4).
A l’issue de ce sommet informel, organisé à l’appel du président du Conseil européen Donald Tusk peu après le référendum britannique, tous ou presque ont insisté sur la « volonté » commune de faire avancer une Union européenne, certes « imparfaite », et qu’il faudrait « rapprocher des citoyens ». La déclaration du premier ministre tchèque Bohuslav Sobotka a respecté ce cahier des charges :
« Ce qui a été très fortement ressenti aujourd’hui, c’est une grande volonté pour que les Vingt-Sept poursuivent la route ensemble. Les choses qui nous rassemblent sont bien plus importantes que celles qui nous divisent. Et nous ne devrions pas oublier, en raison de la crise migratoire, toutes les bonnes choses apportées par la coopération européenne. »D’après le quotidien Hospodářské noviny, l’ambiance plutôt détendue qui prévalait grâce au format informel des discussions au château de Bratislava et à bord d’un bateau de luxe sur le Danube a laissé la place à des discussions plus âpres quand les chefs d’Etat et de gouvernement des Vingt-Sept ont dû s’accorder sur « une feuille de route ». Les pays du groupe de Visegrád, à savoir la Slovaquie, qui assure la présidence tournante de l’UE, la République tchèque, la Pologne et la Hongrie, ont de quoi se réjouir. Leurs conceptions, exprimées depuis plusieurs mois et à nouveau vendredi à l’occasion d’une déclaration commune durant le sommet, correspondent aux orientations du fameux document.
De nombreux points concernent le contrôle des migrations et le renforcement de la « sécurité intérieure et extérieure », avec une série de mesures concrètes à réaliser contre l’immigration illégale et dans la lutte face au terrorisme. A ce titre, Prague a annoncé vendredi qu’elle était prête à soutenir financièrement la Bulgarie, qui craint l’arrivée de nouveaux réfugiés si l’accord entre la l’UE et la Turquie venait à prendre fin. On ne trouve en revanche plus nulle trace du système de répartition de l’accueil des réfugiés, système dont le premier ministre slovaque Robert Fico dit qu’il est « mort ».
Au niveau économique, Bohuslav Sobotka insiste régulièrement sur la nécessité de rapprocher les niveaux de vie entre les « nouveaux pays » de l’UE et l’ouest du continent. Le programme de Bratislava reste pourtant très vague sur le volet des réformes économiques et sociales à promouvoir. Aussi, Matteo Renzi, le chef du gouvernement italien, qui a refusé de participer à une conférence de presse commune avec Mme Merkel et M. Hollande, a fait part de sa déception. Le document ne consacre ni la solidarité des pays européens dans l’accueil des réfugiés, ni la volonté des pays du Sud de l’Europe de sortir de la politique d’austérité budgétaire.En fait de solidarité, c’est la définition qu’en proposent les gouvernements du groupe de Visegrád qui s’est imposée. Une conception exposée par M. Fico lorsqu’il évoque le corps européen de gardes-frontières, qui doit fonctionner avant la fin de l’année :
« Nous sommes prêts à y mettre de l’argent, nous sommes prêts à y mettre des bateaux. C’est ça la solidarité. En fait, nous sommes les plus pragmatiques. Nous respectons notre parole. Avec M. Sobotka, avec M. Orbán, nous le disons depuis le début : ‘Bon sang ! Il faut que nous protégions les frontières de l’espace Schengen ! Ne laissons pas arriver les migrants illégaux !’ Aujourd’hui, c’est devenu la ligne officielle de l’Union européenne. »Début 2017, les Vingt-Sept se réuniront à Malte pour un nouveau sommet informel, dans la lignée de celui de Bratislava, qui préparera le sommet de Rome en mars. Ce sera l’occasion de célébrer le soixantième anniversaire du traité de Rome et de constater si oui ou non l’orientation défendue par les pays du groupe de Visegrád est devenue « la ligne officielle de l’Union européenne ».