Le succès des écoles maternelles « alternatives » auprès des parents tchèques

Photo: Arnošt Máče, CRo

En République tchèque, septembre n’a pas été le mois de la rentrée pour tous. Environ 60 000 enfants en âge préscolaire n’ont pas pu être acceptés dans les écoles maternelles publiques du pays. Pour faire face à ce problème récurrent depuis plusieurs années mais qui ne semble être l’affaire que d’une génération, différentes écoles privées voient le jour. Et nombre d’entre elles proposent des méthodes d’éducation dites « alternatives » de plus en plus recherchées par les parents.

Photo: Arnošt Máče,  CRo
« Mon fils n’a pas été accepté parce que je suis actuellement en congé parental avec mon deuxième enfant. Dans l’école où nous souhaitions scolariser notre enfant, il y a eu 110 demandes d’inscriptions mais il y a de la place pour seulement 30 enfants. »

Ce témoignage est celui de Kateřina, une jeune maman qui vit dans une commune située dans les environs de Prague. Nous l’avions recueilli il y a trois ans de cela. Si les chiffres changent bien entendu d’année en année, la situation d’ensemble, elle, n’a guère évolué : les écoles maternelles en République tchèque sont toujours archi-pleines, et malgré les efforts de certaines communes pour les agrandir, leur capacité d’accueil reste limitée et souvent largement insuffisante.

S’il en est ainsi, c’est essentiellement parce que les petits Tchèques venus au monde ces dernières années sont issus de couples formés de parents nés, eux, au début des années 1970, période de forte natalité en Tchécoslovaquie. A l’époque, le gouvernement communiste avait mis en place une vaste politique de soutien aux jeunes couples mariés et aux parents. Et ce sont précisément ces enfants-là, aussi appelés « enfants de Husák » en référence au Premier secrétaire du Parti communiste, qui font des enfants à leur tour aujourd’hui. Seulement, entre-temps, en raison d’une faible natalité dans un pays où les familles avec plus de deux enfants sont relativement rares, beaucoup de classes et d’écoles ont été fermées.

Photo: Petra Čechurová,  CRo
Les établissements publics étant dans l’incapacité de répondre à la demande, des écoles privées ont logiquement été créées. Et certaines proposent donc diverses méthodes d’éducation que les Tchèques qualifient d'alternatives, la plus répandue étant la pédagogie Montessori, du nom de la pédagogue et médecin italienne qui l’a inventée. D’abord conçue pour les enfants « anormaux », elle est désormais généralisée à l’usage des enfants « normaux ». Directrice d’un école de ce type à Jihlava, Jana Kelisová résume cette méthode en quelques mots :

« Un des principes avec lesquels travaille Montessori consiste à mettre à disposition des enfants un matériel sensoriel, comme par exemple des objets emboîtables, des cubes de couleurs ou des cylindres de diamètres variés pour les plus petits. Un environnement est préparé pour permettre à l’enfant d’user librement des objets sans avoir besoin pour cela de l’aide des adultes. L’idée est de favoriser son autonomie. »

Autre méthode moins connue mais aussi en vogue en République tchèque ces dernières temps, la pédagogie Steiner-Waldorf. Fondée sur les théories éducatives de Rudolf Steiner, il s’agit là d’une application d’un courant de pensée prétendant décrire des phénomènes spirituels de la même façon que la science étudie le monde physique. Ce courant de pensée s’applique également à l’éducation des enfants, comme l’explique l’institutrice Hana Neubauerová :

« C’est une école où nous considérons que l’enfant est présent non seulement physiquement mais aussi spirituellement. Vous trouvez dans la classe beaucoup d’éléments naturels. Si vous regardez bien, il n’y a absolument rien en plastique ici. Nous nous efforçons de faire en sorte que tout soit aussi vrai que possible. Le bois est vraiment du bois. Et les enfants peuvent toucher de la laine, de la soie ou du coton. »

Néanmoins, quelle que soit la méthode proposée par les écoles et choisie par les parents, le psychologue Václav Mertin estime que l’essentiel est ailleurs pour les enfants :

Václav Mertin,  photo: CT24
« Chaque école maternelle est unique en son genre, de par notamment la personnalité de ses institutrices. Je pense que c’est le plus important. Une école ‘normale’, et même la famille, propose aussi beaucoup de choses intéressantes, simplement, on ne s’en rend pas compte ou on n’appelle cela autrement. Pour ce qui est des méthodes alternatives, je ne suis pas contre, si les parents sont convaincus de leur bien-fondé. »

Même s’il est partiellement la conséquence du manque de place dans les écoles publiques classiques, qui ne sont tenues par la loi que d’accepter les enfants en dernière année de maternelle avant leur entrée à l’école élémentaire, le succès actuel des méthodes alternatives laisse à penser que de plus en plus de parents tchèques sont effectivement convaincus de ce bien-fondé. Seul le temps confirmera cette tendance ou, au contraire, permettra d’affirmer qu’il ne s’agissait que d’un effet de mode.