L'économie et l'énergie au centre de la visite de Pierre Lellouche à Prague
Le secrétaire d’Etat français chargé des Affaires européennes, Pierre Lellouche, était à Prague ce vendredi, et l’économie, et plus particulièrement le secteur de l’énergie, était au centre de cette visite. Avec l’appel d’offres concernant la centrale de Temelín, mais aussi avec des thèmes plus européens, comme la gouvernance économique et le prochain budget de l’union.
« On a abordé beaucoup de sujets, comme la réforme de la gouvernance économique et la transparence des politiques économiques et budgétaires, qui est en pleine discussion en ce moment dans le groupe Van Rompuy. Il faut faire attention à ce que le processus soit démocratique, c'est-à-dire qu’il engage les Etats, pas seulement des organes autres que les Etats. Les parlements nationaux doivent être respectés, c’est très important. A propos de la gouvernance économique, nous avons parlé des sanctions éventuelles, de la nécessité de prendre des engagements qui soient respectés par les uns et les autres, grands et petits… »
Du contrôle en amont des budgets nationaux ?
« Oui, mais il faut que ce contrôle soit organisé au sein des Etats, c’est important. La Commission européenne a un rôle, mais cela ne peut être un rôle exclusif. Nous avons beaucoup de points communs sur ces sujets. On a également parlé du prochain budget européen et c’est vrai que là, nous sommes bien sûr, nous, plus attachés à la défense de l’agriculture comme acquis stratégique de l’Europe dans le monde. Je rappelle que l’agriculture est massivement subventionnée par les Américains et on ne peut pas ne pas avoir une politique agricole, qui est un outil stratégique très important. »Les Tchèques ont un point de vue quelque peu différent en la matière…
« Les Tchèques insistent plus, et ils ont raison d’ailleurs, sur la nécessité d’investir davantage dans la recherche et l’éducation. C’est ce que nous faisons en France, nous avons mis le paquet sur la mobilisation de moyens avec le grand emprunt en direction des universités, de la recherche, avec le crédit impôt-recherche. Nous faisons un maximum d’efforts. Il y a des grands programmes de coopération européenne qu’il faut maintenir, comme Galiléo et ITER. Sur tous ces points je crois que nous sommes en phase. La difficulté est que, naturellement, il n’y a plus beaucoup d’argent en Europe. On va donc rester à une épure de 1% du PIB pour le budget européen. Ce qu’il faut, et là aussi nous sommes d’accord, c’est faire attention à bien dépenser cet argent, à faire des économies là où c’est possible, y compris parmi les instances européennes et pas seulement parmi les Etats – c’est là un autre point d’accord entre nous. Nous avons longuement parlé des questions énergétiques, de la coopération nucléaire, de la coopération en matière gazière, des mesures qui doivent être prises pour assurer la sécurité des approvisionnements. »A propos du nucléaire, vous avez parlé avec M. Schwarzenberg de la création d’un groupe de travail franco-tchèque.
« Oui, on va mettre en place un groupe de travail franco-tchèque, parce qu’au mois de février prochain il y a un sommet de l’UE consacré à l’énergie et il y a beaucoup de points communs avec la République tchèque. D’abord il y a cette industrie nucléaire qui est présente ici. C’est l’un des très rares pays en Europe où il y a une vraie compétence nucléaire. Ce qu’il faut, c’est arrivé à imaginer les centrales nucléaires françaises en République tchèque non pas comme la vente d’une centrale, mais comme un outil de coopération et de fabrication d’une industrie commune face à des compétiteurs qui sont des compétiteurs venant aujourd’hui de Corée, de Chine et autres. Il faut aller au-delà de l’idée que l’on vend une centrale à un pays. La République tchèque est un grand pays nucléaire, qui a fabriqué au fil des années 26 centrales nucléaires. Donc il y a une vraie expérience, depuis plus de cinquante ans, et c’est un atout pour l’Europe, un atout aussi pour la France d’avoir un partenaire aussi compétent. »Alors, à Paris, on voudrait jouer ‘la préférence européenne’ ?
« De toute façon on est en compétition ouverte maintenant avec des fournisseurs chinois, coréens, ou japonais alliés avec les Américains. La compétition sera très dure, moins d’ailleurs sur les marchés dans le monde développé, où cela prend des années notamment pour obtenir les autorisations. En revanche dans les pays émergents, vous allez avoir beaucoup de commandes de centrales nucléaires, donc il faut que l’industrie européenne soit au rendez-vous. Il y aura ici, je crois au mois de mai, une conférence sur ce sujet, qu’il ne serait pas mauvais de préparer ensemble de manière un peu informelle, là aussi avec les Tchèques mais aussi avec d’autres pays qui sont intéressés. Je pense à la Lituanie, la Pologne, la Slovaquie, qui ont des projets de centrales. Donc, une des choses qu’on pourrait faire est une réunion un peu informelle des pays intéressés soit par le retour au nucléaire soit par de nouveaux programmes. La Finlande, naturellement, fait partie de ces pays. »Vous avez également rencontré ce vendredi matin Václav Bartuška, ambassadeur tchèque en charge de la sécurité énergétique, et l’appel d’offres sur la centrale de Temelin a évidemment été abordé, le plus important appel d’offres en la matière en Europe. La société française Areva fait partie des trois candidats. Il y a des rumeurs de retard dans cet appel d’offres cette semaine, cela a-t-il été le sujet de vos discussions avec M. Bartuška ?
« Je ne sais pas si on peut appeler ça des retards. C’est au gouvernement tchèque de dire quel est son calendrier, je n’ai pas l’impression qu’il y ait la moindre remise en question de son projet, au contraire. Mais l’échelonnement dans le temps est l’affaire du gouvernement tchèque, c’est à lui de communiquer là-dessus. »
Le groupe de travail franco-tchèque qui va être créé doit aboutir à quoi ?
« Il doit permettre de discuter à la fois des problèmes de gaz, de nucléaire et des positions aussi communes que possible en vue du sommet européen de février que l’on voudrait être opérationnel. »