Législatives 2017 : la participation des communistes au gouvernement à l’ordre du jour
Vingt-huit ans après la révolution de velours, la République tchèque aura-t-elle, pour la première fois de son existence, un gouvernement formé avec la participation du parti communiste ? Pour le parti social-démocrate (ČSSD), la principale formation de gauche dans le pays, ce scénario est tout à fait envisageable. Bien que, depuis 1995, une résolution interne interdit au ČSSD de former une coalition avec les communistes au niveau national, le Premier ministre Bohuslav Sobotka considère que ce document est désormais un anachronisme qui ne correspond pas à la réalité de la République tchèque d’aujourd’hui.
« Cette résolution a été adoptée de manière assez particulière. Elle n’a été initiée ni par la direction, ni par Miloš Zeman, qui était le président du parti à l’époque. C’était une idée avancée par un délégué à l’issue d’un large débat. La résolution est le fruit d’une époque profondément anti-communiste. Avec le temps, elle est devenue davantage symbolique, même si jusqu’à présent personne au sein de la social-démocratie n’a osé ouvrir le débat à ce sujet. »
Un tabou levé donc quelques mois avant les élections législatives, prévues pour l’automne prochain, et à la veille du congrès de la social-démocratie lors duquel Bohuslav Sobotka espère bien être reconduit à la tête du parti.
Pour justifier sa position, le Premier ministre s’est référé, nous l’avons déjà dit, à la présence des communistes dans les structures municipales et régionales, une présence là encore fortement soutenue par le ČSSD. Si, suite aux élections régionales de 2012, les deux partis ont formé des coalitions dans neuf des treize régions du pays, actuellement leurs représentants ne dirigent plus que la région d’Ústí nad Labem, en Bohême du Nord.
Pourtant, l’idée d’une éventuelle coalition gouvernementale orange, couleur du ČSSD, et rouge n’enthousiasme pas tous les sociaux-démocrates. Nombreux sont ceux qui pointent du doigt la politique anti-européenne et anti-Alliance atlantique du parti communiste. La ministre du Travail et des Affaires sociales, Michaela Marksová, ainsi que plusieurs députés et présidents des régions, ont déjà fait savoir qu’une éventuelle collaboration des deux principaux partis de gauche au niveau national devait encore être soumise à un débat de fond au sein de la social-démocratie.
Fort de ses 15% de suffrages recueillis lors des dernières législatives de 2013, le parti communiste serait évidemment favorable à une participation au gouvernement, même si la question n’est pour l’heure que très hypothétique Le président du parti Vojtěch Filip :
« Cette question est prématurée. Le parti communiste négocie la formation des coalitions après la tenue des élections. Ce qui nous intéresse, c’est l’attitude post-électorale des sociaux-démocrates. Le ČSSD n’a pas respecté certains engagements formulés dans son programme, relatifs par exemple à la révision de la loi de restitution des biens aux Eglises. Il ne s’occupe pas non plus des problèmes sociaux. Personnellement, j’ai été très déçu par l’attitude du Premier ministre qui n’a pas profité de l’occasion de bloquer les négociations sur les quotas de répartition des réfugiés. »Pour de nombreux analystes et politologues, la décision de Bohuslav Sobotka d’annoncer d’ores et déjà son intention de former une coalition gouvernementale social-démocrate et communiste est peu compréhensible. Surtout parce qu’une telle coalition ne pourrait pas exister sans le soutien, actuellement inimaginable, d’un autre parti politique de droite ou de centre-droit. La démarche du leader social-démocrate vise sans doute à affaiblir son principal rival politique, le ministre des Finances et président du mouvement ANO, Andrej Babiš. Une figure forte sur l’échiquier politique, capable de convaincre les électeurs libéraux et anti-communistes de la social-démocratie.