Les « Journées de l’inquiétude » pour défendre une certaine idée de la culture à Prague
C’est dimanche en début d’après-midi qu’a été donné le coup d’envoi d’une semaine de protestations d’une partie du monde culturel pragois. Ces « Journées de l’inquiétude » prennent la suite d’une pétition lancée il y a près d’un mois et demi maintenant contre la nouvelle politique de subventions de la Mairie de Prague.
C’est sur l’esplanade du célèbre Théâtre National qu’ont été lancées ces journées. Son directeur, Ondřej Černý, a dans son discours expliqué que son théâtre était financé par le ministère de la Culture, et qu’il ne faisait pas partie des protestataires. C’est par solidarité que le Théâtre national s’est joint à l’événement. Une position saluée par le comédien Miroslav Táborský, une des figures de proue de la protestation :
« Nos collègues du Théâtre national ont bel et bien compris qu’il s’agissait du principe. Du principe du financement et de l’organisation de la culture. Il y a quelques signals qui nous indiquent que la Mairie commence à discuter et à bouger, qu’elle cherche une solution. L’adjoint au maire pour la culture estime que ces événements sont inutiles puisqu’il y a discussion. Mais nous savons par expérience qu’il faut s’exprimer fort, afin que ces discussions trouvent aussi une issue rapide. C’est pour cela que nous allons continuer. Ce n’est pas du tout inutile. »Rappelons que dans la ligne de mire des frondeurs, il y a le principe d’une « subvention au billet vendu » qui défavoriserait les organismes non commerciaux, en faveur des institutions culturelles à profit. Cette refonte du système de dotations pour les théâtres signifie pour les pétitionnaires la mort à court terme de nombreux théâtres. Déjà des festivals comme les Journées du cinéma européen ou le festival de danse Tanec Praha, mais aussi le théâtre des Frères Forman sont menacés, ou ont dû réaménager leur programme à la baisse.
Et c’est l’adjoint au maire pour la culture, Milan Richter qui catalyse toutes les colères. Tant et si bien que la pétition demande sa démission. Celui-ci a tout de même admis jeudi dernier que des changements pourraient être envisagés, tout en réfutant le bienfondé des manifestations :
« Moi je vois là deux camps dont le plus important soutient les mesures de la mairie. Le plus petit camp sont contre la mairie. Ce sont ceux qui ont peur de rejoindre le système de suvention comme tous les autres. Mais ce ne sont pas les politiques qui décident des subventions, ce sont des professionnels du secteur. »
Milan Richter précise que les deux ‘camps’ doivent s’entendre entre eux. Il propose une table ronde pour le 28 mai. Le lendemain, les protestataires entendent manifester une nouvelle fois devant le bâtiment de la mairie de Prague, comme il y a un mois.En attendant, le monde culturel pragois en péril a reçu un soutien fort, et non des moindres, celui de l’ancien président tchèque et dramaturge, Václav Havel, dont la nouvelle pièce est jouée au théâtre Archa, autre scène pragoise en colère. Et sur Internet est déjà apparue une vidéo mixant en musique certaines déclaration du conseiller municipal contesté avec des extraits d’un discours de Milouš Jakeš, un dirigeant communiste d’avant 1989. Un parallèle historique sous forme de satire au cas où le message ne serait pas bien passé.