Les pays de Visegrád invitent la France à leur réunion de Bratislava
Le chef de la diplomatie tchèque Tomáš Petříček sera ce jeudi à Bratislava pour participer à une rencontre du groupe de Visegrád, qui réunit la Tchéquie, la Slovaquie, la Pologne et la Hongrie. Exceptionnellement, le chef de la diplomatie française Jean-Yves Le Drian a également été invité. Ce rendez-vous diplomatique en Slovaquie intervient quelques semaines après la tribune sur l’Europe publiée par le président français Emmanuel Macron et accueillie de manière plutôt mitigée en Europe centrale.
Lukáš Macek est le directeur de Sciences-Po Dijon:
« Je pense qu’Emmanuel Macron voit bien que le retour à l’Europe des six est un fantasme qui ne va pas marcher et que le couple franco-allemand ne suffit pas à lui tout seul pour faire bouger l’UE aujourd’hui. Il va donc chercher des partenariats en Europe centrale et orientale. Encore faudrait-il que les pays de cette région lui facilitent un peu la tache aussi en étant constructifs. »« Si on prend les propositions formulées par Emmanuel Macron, je comprends que les différents gouvernements en Europe centrale vont chacun trouver des choses qui ne plaisent pas. Mais vu le nombre de propositions il y en a forcément qui peuvent plaire aussi. C’est un peu le problème de l’Europe centrale depuis 2004 : on est toujours très audible pour dire ce qu’on n’aime pas mais on est très discret voire inexistant pour dire ce qu’on aime, que ce soit en proposant nous-mêmes ou en réagissant positivement à des projets de nos partenaires, dont ceux du président français. »
« Les relations fonctionnent et sont plutôt bonnes. Après, il y a une frange de l’opinion publique et de la classe politique en Europe centrale qui rentre dans un ‘Macron-bashing’ soutenu, mais ça c’est vrai partout et d’abord en France. »
Radio Prague : Nathalie Loiseau, tête de liste pour les élections européennes de LaREM - le parti d’Emmanuel Macron - déclarait récemment dans un entretien : « Je ne veux plus que l’argent européen serve à construire des autoroutes en Slovaquie ». Ce genre de phrases semble un peu symptomatique des relations qu’entretiennent parfois les politiciens français avec les pays d’Europe centrale. On a reproché à Paris de ne pas avoir fait assez d’efforts dans le passé. Les relations se sont-elles améliorées selon vous depuis l’arrivée d’Emmanuel Macron à l’Elysée ?
Lukáš Macek: « J’ai eu l’impression qu’il y avait un vrai effort, surtout au début, de la part d’Emmanuel Macron d’inclure cette région dans sa vision européenne et d’y prêter une attention peut-être plus grande que certains de ses prédécesseurs. Il y a eu une volonté de montrer qu’il ne mettait pas tous les pays de Visegrad dans le même panier, notamment avec ce ‘format Austerlitz’ (Tchéquie, Slovaquie, Autriche). Macron a rencontré plusieurs fois le Premier ministre tchèque Andrej Babis et a priori leurs députés devraient siéger dans le même groupe (ALDE) après les élections européennes, donc il y a une relation qui existe. »« Après, je crois effectivement que c’est une dynamique qui s’est peut-être un peu enrayée – la petite phrase que vous avez cité montre que ce n’est pas aussi simple que cela… Je pense quand même que le président français prône une Europe à plusieurs vitesses mais dans une optique qui me paraît plus intéressante et plus réaliste que ce qui a pu être proposé par le passé. C’est davantage l’idée de créer un groupe de pays qui pourraient entraîner les autres et non l’idée de se débarrasser de certains pays qui ne suivraient pas. C’est une grande différence et on voit bien que les quelques projets de coopération renforcée remportent finalement l’adhésion de nombreux pays – c’est le cas de la coopération structurée pour la défense, avec peu d’Etats au départ et aujourd’hui on se retrouve avec 24 ou 25 Etats. »