Les relations pas toujours faciles entre les Tchèques de l’étranger et leur pays d’origine
Près de 2 millions de Tchèques vivent hors des frontières de leur pays d’origine. Quel rapport entretiennent-ils avec leur patrie ? Cette question a été au cœur d’une enquête réalisée récemment sur un échantillon de 700 expatriés par l’Ecole tchèque sans frontières, association qui propose aux enfants bilingues un enseignement de langue et de civilisation tchèques et ceci dans une centaine de villes du monde entier.
« Parmi ces personnes, il y en a beaucoup qui ont une expérience professionnelle assez exceptionnelle. Elles pourraient très bien transmettre leurs connaissances et expériences, mais au fond, il n’y a pas de demande. Il semble que la République tchèque n’est pas intéressée par leur savoir-faire. Les gens sont peut-être intéressés à titre individuel, mais la société en tant que telle ne cherche pas à développer ces relations, à un profiter pour mettre en place une collaboration internationale par exemple. Nous avons interrogé, dans le cadre de l’enquête, des chercheurs de pointe qui n’ont jamais été sollicités pour évaluer un article ou pour apporter leurs conseils dans un domaine particulier. »
D’après Lucie Slavíková-Boucher, cette situation ne peut pas s’expliquer par un manque d’initiative de la part des Tchèques de l’étranger :« Il est difficile pour une personne individuelle de s’engager en faveur de son pays, même si elle en a très envie. Car vous ne savez pas à qui vous adresser. Je me souviens que moi-même, avant que je ne réussisse à lancer l’idée de l’Ecole tchèque sans frontières et avant que cela devienne un réseau mondial, je suis allée un jour, en tant qu’étudiante, dans une galerie d’art à Paris qui était en même temps le siège d’une organisation franco-tchécoslovaque. C’était juste après la Révolution de velours. Je m’y suis présentée en disant : ‘Je voudrais faire quelque chose pour la Tchécoslovaquie.’ Je crois que je suis apparue un peu étrange… D’ailleurs, personne ne m’a embauchée. Donc si vous n’avez pas de correspondant, si vous ne répondez pas à un appel, il est extrêmement difficile de manifester votre intérêt. »
Mission réussie, quand même, pour Lucie Slavíková-Boucher, médecin de profession qui a lancé en 2003 à Paris, où elle vit, une première Ecole tchèque sans frontières. Treize ans plus tard, le réseau des écoles tchèques, soutenu par le ministère tchèque de l’Education, compte une centaine de lieux d’enseignement à travers le monde et environ 3 000 élèves.
Néanmoins, il existe pour les Tchèques de l’étranger, et pas seulement pour les chercheurs, un tas de difficultés d’ordre pratique à surmonter lorsque qu’ils souhaitent rester en contact avec leur pays d’origine. Lucie Slavíková-Boucher explique :
« Il faudrait mettre en place, au niveau du gouvernement ou d’un ministère, un seul endroit, un bureau qui prendrait en charge toutes les questions relatives aux Tchèques de l’étranger. On pourrait y régler toutes les formalités concernant l’équivalence des diplômes, la retraite, la sécurité sociale, la nationalité, même les choses basiques comme le permis de conduire. Actuellement, il faut aller à plusieurs adresses différentes et encore, pour obtenir les adresses des bureaux, c’est un parcours du combattant… »Les relations entre l’Etat tchèque et sa diaspora ont été discutées, cette semaine, dans le cadre d’une conférence organisée au Sénat à l’initiative de l’Ecole tchèque sans frontières. Retour sur ce débat, auquel ont notamment participé des représentants de la communauté tchèque en France, dans une de nos prochaines émissions.